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NICETAS DE REMÉSIANA — NICETAS STETHATOS


appelle, d’après le témoignage du meilleur ms., De utililale hymnorum. N’icéta y justifie contre diverses critiques certains usages qui commençaient à s’introduire, celui de l’office de nuit (au moins dans la nuit du vendredi au samedi et la suivante) et celui du chant des psaumes et des hymnes. Texte dans P. L., t. lxviii, col. 365-372, 371-376, sous le nom de Nicétius de Trêves ; Burn, p. 54-82. La nouvelle édition de C. H. Turner doit être consultée de préférence ; les deux traités y sont présentés pour la première fois sous une forme ordonnée et intelligible, dans Journal of theol. studies, 1920-21, t. xxii, p. 305-320 = De vigil. ; 1922-23, t. xxiv, p. 225-252 = De util, hymn., avec l’introduction au traité précédent. C’est dans le De alilit. hymn. que se trouve à deux reprises, c. ix et xi, l’attribution fort explicite du Magnificat à Elisabeth.

3. Quant à l’attribution à Nicéta de l’hymne Te Deum, elle a donné lieu à de très vives discussions. On a fait valoir en sa faveur l’indication fournie par une dizaine de mss d’origine irlandaise, voir la liste et le détail dans Burn, p. c sq. ; et pour corroborer ce témoignage on a invoqué l’intérêt que, d’après les deux sermons cités plus haut, l’évêque de Rémésiana prenait au chant d’Église. Mais le dernier mot n’est pas dit.

Ainsi, comme le fait remarquer J. Zeiller, « l’ensemble des ouvrages (de Nicéta) révèle l’orientation pratique plutôt que théorique de son esprit : ceux d’entre eux qui sont d’un caractère dogmatique s’adressent aux catéchumènes, les autres concernent la liturgie. Tout cela est conforme au type de l’évêque missionnaire que dans une large mesure Nicéta a réalisé. » Op. cit., p. 557.

Textes. — Xous avons indiqué au fur et à mesure les endroits où les trouver commodément. Voici leur histoire sommaire. En 1799, le cardinal Borgia publie à Padoue l’Explanatio symboli, sous le nom de Nicétas d’Aquilée. En 1K02, Michel Denys fait connaître les fragments contenus dans un Ordo de catechizandis rudibus du cod. Palutiuus-Vindobonensis 1370 (voir Codiees mss theol. biblioth. Palat. Vindob., t. ii, 3° part., p. 2042 sq.). En 1827, A. Mai, publie d’affilée les trois traités De ratione fîdei, DeS.S. potentiel, De div. apell. et aussi le De symbolo, sous ce titre : Sanctorum episc. Nicetæ et Paulini scripta, Rome ; repris dans Script, vel. nova collectio, t. vii, Rome, 1833. Jusqu’à ce moment on attribue ces divers textes à Nicétas éuêque d’Aquilée (454-485), dont l’identification avec le Nicétas de Romésiana de Gennade avait été âprement soutenue par P. Braida, Udine, 1810. Voir sa dissertation dans P. L., t. lii, col. 875-1134. (l’est dom G. Morin qui oriente la recherche dans la direction de Nicéta de Rémésiana : L’auteur du Te Deum, Rev. bénéd., 1890, t. vii, p. loi, sq. ; 1894, t. xi, p. 49 sq. et 337 ; 1898, t. XV, p. 99. C’est A. E. Burn, qui a le plus contribué à établir solidement la position actuelle.

Travaux. — E. Humpcl.iVirefas Bischo/ von Rémésiana, eine lilterarkrit. Studie zur Gesch. des allkirehl. 7°aufsymbnls (thèse), Erlangen, 1895 ; A. E. Burn, Nicéta of Rémésiana, his life and works, Cambridge, 1905, donne en une longue introduction une étude sur l’auteur et ses œuvres, puis les textes ; du même, The hymne « Te Deum » and its auihor, Londres, 1920 ; W. A. Patin, Nicéta, Bischof von Rémésiana, ah Scliriflsteller und Theoloye, Munich, 1909. Voir aussi les notices littéraires : O. Bardenhewer, Altkirchliche I.iteratur, t. iii, 1912, p. 598-605 ; M. Schanz, Gesch. der rômischen Lilterutur, t. IV a, 2e édit., 1914, § 964-966 ; .1. Zeiller, Les origines chrétiennes dans les provinces danubiennes de l’empire romain, Paris, 1918, p. 549-558.

É. Amann.

6. NICÉTAS STETHATOS ou PECTO RATUS (xie siècle), connu comme polémiste antilatin, mérite de l’être davantage encore comme théologien ascétique et mystique. — I. La personne. — IL Les écrits. III. La doctrine.

I. La personne.

Moine et prêtre de Saint -Jean-Baptiste de Stoudion, disciple et biographe de l’hi goumène de Saint-Mamas de la Xylokerkos, Syméon le Nouveau Théologien (949-1022), en même temps qu’éditeur de ses écrits, Nicétas Sthétatos vécut dans la première moitié du xie siècle. Nous lui devons les maigres renseignements que nous avons sur sa vie. Il nous confie que, quelques trois ans avant la mort de Syméon. il venait à peine de se fleurir du premier duvet de l’adolescence. Hausherr, Vie de Syméon le Nouveau Théologien, Rome, 1928, p. 192, n. 133. Ce cliché pourrait signifier qu’en 1019 Nicétas avait tout au plus vingt ans, et donc qu’il était né aux environs de l’an 1000. Compromettant le couronnement de ses études littéraires pour entrer au Stoudion à quatorze ans, il fut, encore que studite, le disciple préféré de l’higoumène de Saint-Mamas, réfugié pour lors à Sainte-Marine au-dessus de Chrysopolis. Une lettre de 1019, à ce qu’il semble, nous montre le vieux maître exprimant à son jeune disciple sa confiance et son espoir de voir par lui ses écrits propagés partout et transmis aux générations futures. Ibid., p. 190-192, n. 132. Entre temps, Nicétas en butte non pas aux Latins, ni aux Juifs, ni aux Arméniens, ni même aux accusateurs du saint, mais à l’hostilité des moines de son propre monastère, comme cinquante ans auparavant le Nouveau Théologien, dut quitter le Stoudion. Revenu au monastère. il y fut favorisé, vers 1025, d’une vision extatique qui le décida à publier la vie et les écrits de son maître. Ibid., p. 192-194, n. 133. Sa timidité s’essaya d’abord à un éloge funèbre, à des hymnes et à des panégyriques. Ibid., p. 198, n. 136. Puis fort de l’approbation d’un anliquus rf/eru/n, qui les déclarait égaux aux chefs-d’œuvre des anciens hymnographes. et relancé par de nouvelles voix intérieures, il se mit au grand œuvre, la course de sa plume devant renoncer à égaler la dictée de l’Esprit qui, le favorisant, en manière de récompense, d’une nouvelle vision, en fit l’homme-lige du Nouveau Théologien et brûla toutes ses forces à la glorification du maître de sa jeunesse. Ibid., n. 135, 137 et 140. Il semble bien qu’il faille placer sa composition de la Vie de Siméon en 1053. Auquel cas la polémique anti-latine de 1054, sur laquelle nous n’avons pas à revenir, voir l’article Michel Cérulaibe, t. x, col. 1691-1693, ne fut qu’un accès subit sans préméditation, comme le laissait du reste deviner le ton méritoirement retenu de la réplique de Nicétas au fougueux cardinal Humbert. Ajoutons que les données actuelles ne permettent pas d’assigner une date à sa mort. Tout au moins veut-elle être reculée au delà de 1050, contrairement à l’opinion hâtive du P. Pargoire, Monl-Saint-Auxence. dans la Bibliothèque hagiographique orientale, Paris. 1903, t. i, p. 89.

Encore qu’il s’en défende, cf. Haussherr. op. cit.. p. 199, Nicétas Stéthatos prend rang parmi les bons écrivains byzantins. Par cette chaude imagination qui jette sur les choses les plus insignifiantes ces couleurs mystiques qu’il croit tenir d’une vision d’en haut, il ne peut manquer de séduire le lecteur le plus difficile. Persuadé d’être sous la conduite habituelle et consciente du Saint-Esprit, il se dispense, sous raison de reconnaissance et d’édification, des règles élémentaires de la modestie pour vous accabler de confidences sur ses propres expériences mystiques. Tout de même, le culte qu’il professe pour Syméon le Nouveau Théologien, comme son aversion impulsive contre ses adversaires en général, si elles ne vont pas à altérer les faits matériels, lui dictent au moins une manière de les présenter qui n’est pas sans ruse, et lui suggèrent des explications qui pourraient bien donner le change sur la vérité objective. Tous défauts engendrés par un sentimentalisme religieux, outrancier et sans contrôle qui veut le lecteur averti.