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NESTORIENNE (L'ÉGLISE), THÉOLOGIE SACRAMENTAIRE 310

étonné de voir Sulâqà.dans sa profession de foi, s’exprimer ainsi : » Les anciens ont-ils usé de la confirmation, je l’ignore ; je suis un simple moine ; qui aurait pu m’apprendre cela ? o (liamil, loc. cit., p. 478. Mais, comme dans toutes les Églises orientales, la confirmation est tellement unie au baptême que l’on comprend assez les hésitations de certains à l’en distinguer. Il n’est pas impassible d’ailleurs que la signification de certains rites, et même leur usage, ait disparu aux époques de décadence. Voir Assémani, loc. cit., p.

CC.LXXVII-CX.LXXXV.

La foi de l'Église nestoriennc relativement à l’eucharistie est, dans ses lignes essentielles, la foi de l'Église universelle. Pour l’exposer, Ébedjésus commence par rapporter la doctrine du sacrifice eucharistique ; rien n’est plus juste, ni plus traditionnel. Aux sacrifices anciens s’est substitué le sacrifice de la croix « où le Fils unique de Dieu s’est offert à son Père en victime vivante et raisonnable, réconciliant ainsi le monde avec la majesté souveraine, procurant le salut aux anges et aux hommes. Mais comme il n'était pas possible que l’immolation de la croix fût renouvelée pour le salut de tous en tout temps et en tout lieu, le Fils, dans sa miséricorde, sa clémence et sa sagesse, a trouvé un moyen admirable. » Suit un bref récit de la dernière cène. Puis l’auteur continue : « Par ce cornai uidement du Seigneur le pain est changé en son corps sacré et le vin en son sang précieux, et ils sont (le pain et le vin ainsi changés) pour la rémission des péchés, pour la purification, l’illumination, la propitiation, pour l’espoir de la résurrection et de l’héritage céleste, pour une vie nouvelle dans ceux qui les reçoivent en toute foi et sans hésitation. » L’affirmation de la présence réelle est absolument explicite : « Chaque fois que nous nous approchons de ces mystères, c’est le Christ que nous rencontrons, lui que nous portons dans nos m uns, que nous baisons ; par leur réception nous nous unissons à lui. Son corps sacré se mêle à notre corps, son sang précieux se mélange à notre sang. Par la foi, en effet, nous savons que ce n’est qu’un seul corps, celui qui est au ciel et celui qui est dans l'Église. » Loc. cit., p. 358.

Ce sont là, il est facile de le voir, affirmations toutes pratiques. Ébedjésus ne spécule nullement sur la minière dont le sacrement réalise la présence mystique du Christ sur l’autel. D’autres théologiens avant lui avaient essayé de le faire, et il est assez curieux de retrouver dans, leurs théories, des tendances analogues à celles que l’on remarque, dans l’Occident latin, lors des controverses eucharistiques du ixe et du xi c siècles. Babaï, ici encore, est un de ceux qui a essayé de serrer le problème de plus près, mais il faut bien reconnaître que ses essais ne sont pas toujours heureux. Passe encore pour la comparaison qu’il fait entre les résultats de l’union des deux « hypostases » du Christ en un seul « prosopon de filiation » avec le résultat du changement eucharistique : Vna est (in inciirnatione) persona filialionis, non duæ, sicut una est persona corporis Christi et panis sanctifteati. Trad. p. 124. (Pour le dire en passant, cette comparaison légitime tout à fait ce que nous avons dit antérieurement, col. 152, de la définition du prosopon.) Mais il y a, p. 181, tout un développement sur le pain eucharistique, qui ne laisse pas d’inquiéter quelque peu. Il s’agit d’expliquer, comment, entre autre noms, celui de « pain » convient au Christ. C’est d’abord, répond l’auteur, parce que le Christ vivifie, c’est aussi parce que in pane tradidit mysteria sancta quæ sunt typus corporis et sanguinis ejus et memoriale mortis ejus. Et, après avoir rappelé les textes de l’institution, Babaï de continuer :

Et Dominus noster dixit : « Kgo sum panis qui de cælo dtscendi » (Joa., vi, 51) — non autem de fcœlo descendit

panis qui est in typum et virtutem — ; et sieut dixit : « Panis, quein ego dabo, corpus meum est quod pro vita mundi frangetur » (.loa., vi, 52). 1-xce comportant est uni ttoribus veritatis corpus Dominl nostri, quod ipso panein denominat, non de CfBlo descendisse, sed sainpfuin esse de beata .Maria… sicut dixit Scriptura. Ktenim, (il faut traduire, je pense, semblublement) secundum naturam, panis qui super altare ponitur et frangitur ex tritico est ; per orationem autem et supplicationem sacerdotis et illapsum Spiritus Sancti accipit virtutem, et lit corpus Dominl nostri secundum virtutem et propitiationem et remissioneni peccatorum, et est unuin corpus cum corpore I)omini, quodino ; clo est per unionem, non per naturam ; sed panis, in natura sua servatus, est corpus per unionem, et corpus, in natura sua manens, est panis per unionem. Trad. p. 181.

Il ne serait pas difficile de trouver dans ces développements une doctrine de l’impanation. A la « nature » du pain s’unit la « nature » du corps du Christ..Mais, pour cela, il faudrait traduire nature par substance » et cette traduction ne serait pas adéquate. Accusons plutôt l’incapacité où est notre théologien d’approfondir les concepts de substance et d’accidents, aussi bien que ceux de nature et de subsistence. De même qu’il est incapable de concevoir une nature concrète dépourvue de sa subsistence propre, de même il ne peut imaginer des accidents séparés de leur substance. Il reste que sa comparaison entre le mystère eucharistique et le mystère de l’incarnation est fâcheuse. Voir, ibid, p. 229-233, un développement plus inquiétant encore sur la relation entre le corpus tijpicum, c’est-à-dire l’eucharistie, et le corpus dominicain quod est in ceelo. On y retrouverait quelque chose de l’argumentation de Ratramne contre Paschase Radbert. Georges d’Arbèles (ou l’auteur de V Interprétatif) officiorum) présente des théories étroitement apparentées à celles de Babaï. Qu’on en juge par cette position de question : Quidam theophori viri dixerunt hœc mysteria esse proprio sensu corpus et sanguinem Christi, non corporis et sanguinis ejus mysleriurn. C’est tout à fait la question soulevée par Ratramne, et il serait du plus vif intérêt de voir comment notre théologien cherche la réponse, non dans la distinction de la substance et des accidents, mais dans celle des caractères naturels (hypostatiques) et des caractères personnels. Quoi qu’il en soit, il est impossible de faire même des plus aventureux de ces docteurs des précurseurs des « sacrament aires » du xvie siècle. Pour mystérieux que soit le rapport entre le corps eucharistique et le corps réel du Christ, par l’eucharistie nous entrons vraiment en communion avec le Sauveur.

Sur le rôle respectif que jouent dans la consécration les paroles de l’institution et l’appel adressé au Saint-Esprit (épiclèse), la théologie nestorienne ne semble rien présenter de particulier. La position semble bien être celle de tous les Orientaux. Ébedjésus écrit : Formam impertitur (Christus) vivo verbo suo et per illapsum Spiritus Sancti, p. 359. Mais, chose à signaler, l’une des anaphores encore en usage chez les nestoriens, si elle contient une allusion à la dernière cène, n’exprime pas les paroles mêmes de l’institution. Voir l’art. Orientale (Messe). Renaudot et d’autres liturgistes ont pensé qu’il s’agissait ici plutôt d’un accident qui aurait fait tomber ces paroles, que d’une suppression intentionnelle et tendancieuse. Mais peut-être s’agit-il aussi d’un état primitif du texte. Il y a là un problème assez complexe et qui ne nous paraît pas résolu.

Que la consécration du pain se fasse in jermenlo et non in azymo, ceci n’est pas non plus une particularité des nestoriens. Mais, à partir d’une certaine date, on les voit attribuer une grande importance à la confection de ce fermentum ; il est préparé par le prêtre lui-même avec diverses cérémonies ; on y met de l’huile et une parcelle de malkâ, ci-dessous, col. 310. Voir Martène, Deant. Eccl. rit., éd. de 1788, 1. 1, p. 118 ; Assémani, loc.