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1473 MESSIANISME, LE TEMPS DE L’EXIL : LE LIVRE DES CONSOLATIONS 1474

pousse des cris et dessèche les pays des ennemis par le feu de sa colère, xlii, 13-15, guide ses élus, armée irrésistible qui broie ses adversaires, xli, 14-16, tantôt comme un berger qui conduit les Israélites avec le plus grand soin à la façon d’un troupeau, XL, 10-11.

Le retour se fera par la voie la plus directe à travers le désert, qui, largement arrosé et orné des plus beaux arbres, sera transformé en jardin, xli, 17-20 ; xliii, 19-20 ; xlix, 9-11. Là où passera le cortège, les collines seront abaissées et les vallées aplanies, xl, 3-4. Dès maintenant des messagers de bonne nouvelle sont envoyés aux villes de la Judée pour leur annoncer le relèvement de leurs ruines et le retour de leurs habitants, xl, 9. C’est surtout Jérusalem qui doit se réjouir et se préparer à recevoir avec la plus grande allégresse Jahvé qui lui ramène ses enfants. Ils seront si nombreux qu’elle sera trop étroite, xlix, 20-21. Elle sera donc reconstruite, non seulement en pierres ordinaires, mais en pierres précieuses, liv, Il sq. ; elle deviendra un Éden, où l’on trouvera la joie et l’allégresse, li, 3.

Tout ce rétablissement du pays et de la nation est présenté non pas comme un épisode quelconque de l’histoire d’Israël, mais comme l’inauguration de son bonheur définitif, le commencement de l’ère messianique. Aussi, lors de la sortie de Babylone, des miracles seront-ils opérés qui dépasseront et feront oublier ceux de l’Exode, xliii, 16-18. Les descendants d’Abraham reviendront, et de Babylone, et de tous les pays où ils ont été dispersés, xlix, 12 ; xliii, 5-7 ; les païens eux-mêmes les ramèneront, xlix, 22-23. Les infidélités d’Israël auront disparu comme un brouillard et seront pour toujours oubliées par Jahvé, xliv, 22. Le Très-Haut lui jure, comme à Noé après le déluge, de ne plus s’irriter contre lui : plus tôt s’ébranleraient les montagnes que son alliance de paix conclue avec lui, liv, 9-10, conformément « aux faveurs assurées à David », lv, 3. Israël sera dorénavant le peuple le plus heureux du monde. A l’abri de tous les dangers, ses enfants prospéreront sous la bénédiction de Jahvé comme une prairie le long des rivières, xliv, 3-4. Rois et reines des nations seront à son service, xlix, 22-23 ; des peuples inconnus viendront de loin pour participer à son bonheur, xliv, 5. Comme Ézéchiel, le prophète relève que Jahvé accordera ce bonheur aux Israélites non pas à cause de leurs mérites, mais uniquement à cause de l’honneur de son nom, car si le peuple est purifié par l’exil, XLvni, 10, il n’est pas encore parfaitement fidèle au service de son Dieu, de sorte que celui-ci l’appelle un serviteur aveugle et sourd, xliii, 8 ; xlii, 18-23. Dès son origine, Israël a si souvent et si gravement fatigué et tourmenté son Dieu que, si Jahvé n’avait pas retenu sa colère, il l’aurait depuis longtemps exterminé. S’il l’exalte néanmoins, c’est à cause de son nom, xliii, 25. Par la restauration d’Israël il veut plus que jamais manifester sa grandeur, montrer le néant des faux dieux et forcer les païens à se convertir. Déjà les victoires de Cyrus font trembler devant le Très-Haut les pays du monde les plus lointains, xli, 4-5. La chute de Babylone sera la plus grande honte pour les idoles et pour ceux qui les adorent, xliv, 6-20. Mais ce qui mettra le comble à la révélation de la gloire de Jahvé devant toute chair, ce sera le retour d’Israël à travers le désert, xl, 4-5 ; xli, 20. Alors, quand Israël sera rétabli en Palestine, même les peuples les plus reculés de l’Afrique, les Éthiopiens, les Sabéens, les Égyptiens, viendront se prosterner devant lui et lui diront : « Seul tu as un Dieu, il n’en est point d’autres », xlv, 14-17. Les païens se convertiront et se consacreront à Jahvé, xliv, 5 ; lv, 5. Dans sa bonté Jahvé y invite toutes les extré mités de la terre, xlv, 22 sq. Ceux qui persisteront malgré tout dans leur idolâtrie, ainsi que ceux qui ont maltraité Israël, seront exterminés, xli, 11-16 ; xlii, 13-15 ; xlix, 25-26.

La restauration d’Israël sera donc la manifestation décisive de la puissance de Jahvé. Le règne de Dieu sur la terre sera enfin pleinement réalisé. Le but linal de la création et de l’élection d’Israël sera définitivement atteint : tout genou fléchira devant Jahvé, xlv, 24. Non seulement les Israélites, mais aussi les païens adoreront le vrai Dieu, bien que ces derniers occupent dans le royaume de Dieu un rang inférieur. Plein d’enthousiasme à l’idée que la vraie religion sera répandue dans le monde entier, le prophète invite à plusieurs reprises le ciel et la terre avec tout ce qu’ils renferment à louer Jahvé, xlii, 10 sq. ; xliv, 23. Il les exhorte même à coopérer à la réalisation du salut par les paroles célèbres : Rorate ceeli desuper et nabes pluant juslum, etc., xlv, 8. (D’après l’hébreu il faut prendre juslum dans le sens neutre : le salut, et remplacer dans la seconde partie du verset sauveur par salut.)

Dans les textes qui contiennent ces prophéties sont enclavés quatre poèmes xlii, 1-7 ; xlix, l-9 a ; l, 4-9 ; lu, 13-liii, 12, qui par leur forme et plus encore par leur contenu se détachent du contexte. Ils ont également trait au retour des Israélites de l’exil et au salut du monde tout entier ; mais la manière dont la rédemption est réalisée se présente tout autrement. D’après les oracles précédents, le rétablissement d’Israël et la conversion des païens seront l’unique affaire de Jahvé, qui, en manifestant plus que jamais sa toute-puissance, ôtera d’un seul coup tout ce qui s’oppose à la réalisation du bonheur de son peuple, et forcera les païens à se mettre à genoux devant sa majesté. Au contraire, dans ces quatre poésies, le salut est attribué à un personnage que Jahvé enverra spécialement dans ce but. Ce messager, qui est continuellement appelé ebed Jahve, « le serviteur de Jahvé », accomplira sa tâche lentement et en surmontant avec beaucoup de peine bien des obstacles.

Il sera en premier lieu l’alliance de son peuple, c’est-à-dire l’intermédiaire entre Dieu et Israël. En cette qualité il fera sortir les captifs de prison, xlii, 7, il aura « à rétablir les tribus de Jacob et à ramener les réchappes d’Israël », xlix, 6, « à relever le pays, à partager les héritages dévastés », xlix, 8. Mais cette œuvre « est insuffisante » pour le Serviteur, xlix, 6. Il sera en outre « la lumière des nations » et leur apportera le droit, xlix, 6, pour que le salut de Jahvé arrive jusqu’aux extrémités de la terre, xlix, 6. Les pays les plus éloignés attendent sa doctrine, xlii, 4.

Le Serviteur sera initié à sa vocation par Jahvé lui-même comme un disciple par son maître, l, 4 ; jour par jour il recevra ses instructions. Il les communiquera aux hommes sans ostentation et sans violence. Il s’occupera surtout des malheureux pour les consoler, l, 4. Dans sa bonté il ne brisera pas le roseau cassé et n’éteindra pas la mèche encore fumante, xlii, 3. Hélas ! il ne rencontrera pas seulement des âmes désireuses d’entendre sa parole, mais aussi des adversaires qui chercheront à entraver son œuvre, à tel point qu’il sera tenté de dire qu’il se fatigue en vain et qu’il consume sa force pour rien, xlix, 4. Les ennemis le persécuteront et l’outrageront de la façon la plus cruelle et la plus ignominieuse, et causeront finalement sa mort.Enfacedecet homme de douleurs, un moment les justes eux-mêmes ne sauront plus à quoi s’en tenir, ils le mépriseront et croiront qu’il est frappé par Dieu à cause de ses propres crimes. Cependant ils reconnaîtront en fin de compte que c’est uniquement pour les péchés de son peuple qu’il a souffert, et qu’il en est devenu la victime expiatoire. Son châtiment donnera