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MESSIANISME, LES PROPHÈTES PRÉEXILIENS : OSÉE


paire de jambes ou une oreille, ainsi seront sauvés les Israélites », iii, 12. Il avait expressément dit que seuls les pécheurs périraient, et que les justes seraient conservés au milieu des épreuves comme les grains de blé dans un crible, ix, 9-10. Il annonçait toujours la ruine du royaume et du peuple de Samarie comme telle, jamais l’extermination absolue de tous ses membres.

La prétendue contradiction entre ix, 11-15 et i, 1-ix, 10, n’existe donc pas. D’autre part, en considération des prophéties messianiques des temps anciens, il est naturel qu’Amos ait entrevu le salut par delà la ruine. C’est pourquoi il termine ses oracles par les promesses suivantes : « En ce jour », c’est-à-dire quand Samarie sera tombée, « Jahvé rétablira la hutte délabrée de David », ix, 11. Cette dernière expression signifie le royaume de Juda, bien affaibli et amoindri par rapport à l’époque de David. Grâce à la conquête des nations voisines, ix, 12, et surtout par le rétablissement des tribus du Nord, la reconstruction et le repeuplement de leurs villes dévastées, ix, 14, ce royaume aura de nouveau l’étendue qu’il avait au temps de ce roi glorieux. Il y aura alors une fertilité paradisiaque dans le pays : à peine aura-t-on semé qu’on moissonnera, ix, 13, promesse qui se trouve déjà dans Lev., xxvi, 5 ; toutes les montagnes suinteront de moût, _ix, 13. Les Israélites, au milieu de leurs vignes dont ils boiront le vin et de leur jardin dont ils mangeront les fruits, seront heureux à tout jamais, ix, 15.

Ainsi tout en étant très bref dans sa description de l’avenir messianique, Amos en précise déjà quelques éléments auxquels presque tous les prophètes reviendront : sanctification du peuple par l’extermination des pécheurs, restauration du royaume de David par la réconciliation des douze tribus et l’assujettissement des peuples des alentours. Grande félicité matérielle, causée par une fertilité exubérante, et finalement durée sans fin de ce bonheur.

Les commentaires des douze petits prophètes de P. Schegg, 1854 ; Trochon, 1883 ; J. Wellhausen, 1898 ; L. A. Smith, 1900 ; K. Marti, 1904 ; Driver 1906 ; A. van Hoonacker, 1908 ; C. von Orelli, 1908 ; Procksch, 1910, 1916 ; P. Riessler, 1911 ; Duhm, 1911 ; Nowack, 1922 ; Knabenhauer-Hagen, 1922 ; E. Sellin, 1922.

Les commentaires d’Amos seul de Driver, 1898 ; d’Œttli, 1901 ; de W. R. Harper, 1905 ; Stærk, 1908 ; Valette, 1908 ; Touzard, 1908 ; Guthe, dans Kauizsch, 1923.

Condamin, Les chants lyriques des prophètes ; strophes et chœurs, i, Amos, dans Revue biblique, 1901, p. 352 sq. ; E. Baumann, Der Aufbau der Amosreden, 1903 ; J. Bôhmer, Die Eigenart der prophetischen Heilspredigt des Amos, dans Sludien und Kritiken, 1902 ; F. Lockert, Le prophète Amos, 1909 ; W. Baumgartner, Kennen Amos und Hosea eine Heilseschatologie ?1913 ; Budde, Zur Geschichte des Bûches Amos, dans Wellhausenfestsclirift, 1914, p. 65-77 ; Caspari, Wer hat die Ausprùche des Prophelen Amos gesammell ? dans Neue kirchliche Zeitschrift, 1914, p. 704-715 ; L. Desnoyers, Le prophète Amos, dans Reu. bibl, 1917, p. 218 sq. ; P. Humbert. Un héraut de la justice, Amos, 1917 ; E. Balla, Die Drohund Schellworle des Amos, 1926 ; K. Refer, Amos, 1927.

/II. OSÉE. — Le ministère d’Amos a été de très courte durée. A cause de ses reproches et de ses menaces, il fut bientôt expulsé de Samarie, et retourna en Judée. Mais, quelques années après, entre 750 et 720, un autre prophète, Osée, tenait aux habitants du royaume du Nord le même langage sévère. Bien que celui-ci fût leur compatriote et qu’il les aimât tendrement, vi, 4 ; xi, 7sq., il fut obligé à son tour de les accuser et de leur prédire le châtiment. Ses incriminations sont encore plus détaillées, illustrées qu’elles sont par des descriptions de la corruption du temps présent, xiv, 1 sq. ; vii, 1-7, ainsi que par des aperçus rétrospectifs sur le passé, x, 9 sq. ; xi, 1-6 ; xii ; xiii, 1-6. Pour bien mettre sous les yeux de ses auditeurs leur infidélité, Osée épousa sur l’ordre de Dieu une « femme de fornication », i-m.

A ces accusations correspondent les plus sinistres menaces : Jahvé qui avait eu une prédilection pour Israël, ne peut dorénavant que le haïr, ix, 15 ; xiii, 14. Devenu son pire ennemi, le Très-Haut sévira contre lui comme un lion, une panthère et une ourse en furie, xiii, 7-8. Quand il mettra fin sous peu, i, 4, au royaume d’Israël, « les jours du châtiment et de la rétribution viendront », ix, 7 ; la tribulation sera si grande que les hommes diront aux montagnes : « Couvrez-nous », et aux collines : « tombez sur nous », x, 8. Dès maintenant la punition a commencé : par suite d’une sécheresse tout languit, la terre et ses habitants, même les oiseaux et les poissons, ix, 3. (Rien n’oblige de prendre ce verset avec Guthe, Nowack et en partie avec Sellin pour une glose). Des armées ennemies inonderont le pays, le dévasteront surtout aux endroits du faux culte, ix, 6 ; x, 8, tueront impitoyablement les habitants, x, 14-15, iv, 6 ; xiii, 15 ; xiv, 1, ou les chasseront de leur domicile, ix, 3-17 ; xi, 5. Pour exterminer les Israélites, Jahvé les frappera en outre de stérilité et ordonnera à l’enfer et à la mort d’envoyer la peste et toutes sortes de maladies contagieuses, xiii, 14. Parfois et incidemment Osée gourmande et menace également Juda, iv, 15 ; v, 5 ; v, 12-14 ; vi, 4, 11, viii, 14 ; xiii, 1 (par contre, dansxii, 3 et x, 11, Juda est à remplacer par Israël).

Tel est le contenu de la majeure partie des quatorze chapitres du livre. Il pourrait donc sembler qu’il n’y ait plus de place pour des prophéties de salut. Plusieurs fois cependant le prophète laisse percer, à travers ces sombres nuages, le soleil de la bonté divine et le fait même briller avec éclat. A cause du contraste qui existe entre les nombreuses menaces et ces rares promesses, ces dernières sont tenues pour inauthentiques par les mêmes auteurs, ou à peu près, qui enlèvent la conclusion rassurante du livre d’Amos. Mais ici leurs arguments sont plus faibles encore ; car, pour les mots comme pour les idées, il y a « une relation si intime entre une grande partie des oracles contestés et le reste du livre que tout proteste contre l’idée d’une interpolation ». Sellin, p. 18. D’autre part, il faut savoir que le livre actuel combine des fragments de discours qui n’ont aucune connexion entre eux, et que précisément la plupart des promesses ne se trouvent plus à leur place primitive, ce qui explique qu’elles jurent avec le contexte. Il nous semble assez probable qu’elles datent plutôt du temps qui suivit la ruine de Samarie (722), comme les oracles messianiques de Jérémie et d’Ézéchiel sont en leur majeure partie postérieurs à 586. A défaut de moyens sûrs pour en fixer la suite chronologique, il faut se contenter d’un exposé systématique.

Dans v, 8-vii, l a, passage où Osée s’adresse autant à Juda qu’à Israël, il fait dire à Jahvé qu’après avoir sévi contre les deux royaumes, il retournera au ciel dans la conviction que les Israélites, terrifiés par le châtiment, le rechercheront et lui demanderont de guérir leurs plaies, v, 8-vi, 3. Entendant leurs prières, Jahvé hésite un moment, mais finalement il se déclare prêt à rétablir Israël, en particulier Juda, vi, 11 ; vii, l a. (C’est, nous semble-t-il, la meilleure explication de ces versets difficiles ; dans tous les cas il n’est pas nécessaire de les sacrifier entièrement comme le font Guthe, Nowack, et en partie Sellin.)

La raison pour laquelle Jahvé épargnera au moins un reste des Israélites, c’est sa miséricorde qui triomphera de sa juste colère et l’amènera à pardonner à ce peuple, à ne pas se contredire au point de le perdre après l’avoir élu, xi, 8-9 : Quand les Israélites du Nord auront vécu longtemps « sans roi et sans sacrifice », iii, 4, à la fin des temps, iii, 5, c’est-à-dire à la fin du temps de pénitence, ils reviendront à Jahvé.