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MOZARABE (MESSE), LE SACRIFICE


diffusant. Dans Ruinart, Acla marlijrum sincera, p. 222.

La lecture des noms semble considérée dans les manuscrits comme un rite à part, sous le titre Nomina offerentium. La liste des noms des vivants était suivie de celle des morts. D’ordinaire le diacre ou le prêtre lui-même faisait la lecture ; parfois elle incombait à l’un des canlores. Transfer hec nomina in pagina celi, que levilarum et cantorum luorum officio rccilala sunt, in Libro vivorum digito luo, lit-on au Liber mozarabicus, éd. Férotin, col. 546, et introduction, p. xxi. Voir art. Diptyques du Diction, d’archéol.

L’oraison qui suit est appelée Post nomina. L’oraison précédente comportait en effet la lecture du nom de ceux qui offraient et celui des morts : item pro spiritibus pausantium, P. L., loc. cit., col. 114. Elle est la troisième dans l’ordre suivi par saint Isidore et il la définit ainsi : Terlia autem effunditur pro offerentibus sive pro defunctis fidelibus, ut per id sacrificium veniam consequantur. Le texte varie comme celui des précédentes selon les fêtes. On remarquera qu’ici la mémoire des morts n’est pas séparée de la mémoire des vivants, comme dans la messe romaine. De plus les diptyques en Espagne ne contenaient pas seulement les noms des apôtres et des martyrs, mais encore celui des saints del’Ancien Testament, patriarches et prophètes. Ibid., col. 483 et la note. C’était aussi la coutume des Églises gallicanes et Venance Fortunat a pu dire :

Nomina vestra légat patriarchis atquc prophetis

Quos hodie in temptodiptychuseditebur. L. X, carm.vn.

Voir aussi l’oraison post nomina à la fête de saint Léger, n. 68, p. 283. On retrouve le même usage dans plusieurs liturgies grecques et orientales. Saint Cyrille de Jérusalem disait déjà : Recordamur patriarcharum prophetarum… ut Deus eorum precibus et intercessione orationem nostram suscipiat. Catech. myst., v ; Lesley renvoie en note à ces différentes liturgies, col. 483. L’oraison post nomina présente des caractères analogues dans les liturgies gallicanes. C’était le diacre qui lisait les diptyques et le prêtre disait ensuite l’oraison. P. L., col. 375.

Dom Férotin à propos de la prière post nomina relève avec raison cette secrète du missel romain : Deus cui soli cognitus est numerus electorum in superna felicitate locandus… et omnium fidelium nomina bealæ prædestinationis liber adscripta retineat, qui est une véritable oratio post nomina. C’est par erreur qu’il l’appelle une secrète quadragésimale ; elle appartient aux messes des morts, et son origine gallicane aussi bien que celle de la collecte et de la post communion qui l’accompagnent ne fait pas de doute. Dom Férotin, Liber mozarabicus, p. xxi.

Signalons encore la très longue oratio post nomina, une vraie homélie, rédigée vers la fin du viie siècle par saint Julien de Tolède, et qui fut imposée à tous les prêtres par un concile de Tolède de l’époque, pour mettre fin à un abus intolérable. Certains prêtres ne s’avisaient-ils pas dans l’oraison post nomina de demander la mort de leurs ennemis ? Le texte de l’oraison de saint Julien est une longue et véhémente protestation contre ces criminelles manœuvres. Voir le 5e canon du XVII" concile de Tolède en 694. L’oraison est dans le Liber ordinum, col. 331-334. Cf. aussi Liber mozarabicus, p. xxi.

L’oralio ad pacem est définie dans saint Isidore : Quarta post hœc infertur pro osculo pacis. Le baiser de paix, renvoyé au moment de la communion dans la liturgie romaine, précède en Espagne, comme en Gaule et en Orient, la consécration et même l’illatio. On peut dire qu’il se rattache à la prière des fidèles dont il était la conclusion naturelle. Le baiser de paix primitivement devait être fréquent et faire partie de

toute synaxe. A la messe il dut être de bonne heure fixé à cette place. Il était naturel aussi qu’il précédât la communion. Peut-être dans certaines églises avait-il lieu deux fois ; dans ce cas on dut bientôt supprimer l’un des deux rites comme inutile. Quoi qu’il en soit de la pratique primitive, sur laquelle nous ne sommes pas suffisamment renseignés, de bonne heure, à partir du ve siècle vraisemblablement, nous voyons s’accuser cette singularité dans le rit romain, à la différence des liturgies orientales et des autres liturgies latines, au sujet de la place du baiser de paix. J’ai relevé ailleurs ce fait bien significatif, c’est que dans la Traditio aposlolica de saint Hippolyte qui représente la liturgie romaine au commencement du iiie siècle, le baiser de paix est là aussi, selon l’usage général, rattaché à la prière des fidèles : Et poslea (il est question des néophytes qui viennent de recevoir le baptême ) jam simul cum omni populo orent, non primum orantes cum fidelibus, nisi omnia hœc fuerint consecuti. Et cum oraverint, de ore pacem offerant. Et tune iam offeratur oblatio a diaconibus. Didascaliæ apostolorum fragmenta Veronensia lalina, éd. Ed. Hauler, Leipzig, 1900, p. 111, 112. La suppression de la prière des fidèles dans la messe romaine, au moment où s’établissait le canon romain tel que nous le connaissons, a dû entraîner ce changement pour la place du baiser de paix, comme il en a entraîné bien d’autres.

Ici, comme dans plusieurs autres circonstances, la messe mozarabe nous représente des usages antérieurs à ceux de la messe romaine. L’oratio ad pacem et le baiser de paix se rattachent à un ensemble que saint Isidore désigne sous ce terme post hœc, la prière Per misericordiam, Y Ecclesiam sanctam, le Puri/ica, Domine, ou prière d’oblation, la mémoire des saints patriarches, apôtres, martyrs, etc., la lecture des diptyques des vivants et des morts avec l’oraison post nomina. Alors, et très logiquement, prenait place la prière pour la paix et le baiser de paix. P. L., loc. cit, col. 115. II va de soi que le titre à’oratio ad patrem est une erreur typographique, pour ad pacem comme l’a déjà noté Lesley. En ceci l’usage espagnol était conforme à celui des Églises gallicanes où une oratio ad pacem suit l’oratio post nomina et précède l’illatio ou contestatio. Dans toutes ces liturgies le texte de l’oratio ad pacem varie selon les fêtes ; il y est question soit de la paix, soit des oblations. Les liturgies grecques et orientales ont aussi cette oraison ad pacem suivie du baiser de paix. Voir ces rapprochements dans la note de Lesley, P. L., col. 505.

Nous voyons d’après le Liber ordinum que le diacre intervenait aussi pour le baiser de paix par les mots : Inler vos pacem tradite. Le concile de Compostelle de 1056, c. 1, fait allusion au même usage. Liber ordinum, col. 191 ; cf. Liber mozarabicus, p. xxi. Pendant ce temps le chœur chantait Pacemrelinquo vobis ou une autre antienne de même genre. Le même livre nous donne une formule d’ad pacem où l’oraison est précédée d’une invocation, comme c’est souvent le cas dans cette liturgie et dans la liturgie gallicane. Lib. ordin., col. 236.

2. Le sacrifice.

Après toute cette préparation commence la prière d’anaphorc ou la prière eucharistique proprement dite.

Illatio. — -Dans la liturgie mozarabe elle porte le nom d’inlatio ou illatio, et saint Isidore la définit en ces termes : Quinla infertur illatio in sanctifteatione obla(ionis in quam etiam Dei laudent, lerrestrium creatura, virtutum cœlestium universitas provocatur, et Osanna in Ecclesiis cantatur. Elle est précédée d’un dialogue qui diffère de celui de la messe romaine. Le prêtre incliné et les mains jointes dit : Introibo ad altare Dei : Le chœur : Ad Deum qui lœtificat juventutem meam. Le prêtre en posant les mains sur le calice : Aures ad Dominum. Le chœur : Habemus ad Dominum. Le prêtre :