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MORALE, HISTOIRE SOMMAIRE, Ile PERIODE


voir Duns Scot, col. 1921. Selon l’enseignement de saint Thomas, les actes du pénitent sont vraiment la matière prochaine du sacrement. Sum. Iheol., III 11, q. lxxxiv, a. 1, 2.

Quant au choix des opinions à l’aide desquelles la conscience peut être pratiquement formée, en cas de doute, aucune controverse théorique n’existe à cette époque. Mais, en fait, assez souvent, les solutions casuistiques auxquelles on s’arrête, supposent l’admission des principes explicitement invoqués plus tard par les partisans du probabilisme modéré, voir particulièrement saint Thomas, Quodlibet, viii, q. vi, a. 13, et saint Antonin de Florence, dans la question de l’usure et dans celle des monts-de-piété, Summa theologica, part. II, tit. i, c. vii, xi, Vérone, 1740, t. ii, col. 90 sq., 160 sq.

4° L’enseignement social, pendant cette période, est assez explicite, au moins en ce qui concerne l’affirmation des principes de théologie morale et de philosophie morale.

1. Au point de vue du droit chrétien, la subordination de la société civile ou du pouvoir civil à la direction suprême de l'Église, en tout ce qui concerne la fin surnaturelle, est expressément affirmée, avec le double devoir qui en résulte, pour le pouvoir chrétien, d’omettre tout ce qui pourrait contrarier la direction ce ; sujets vers leur fin surnaturelle, et d’accomplir, selon le juste commandement de l'Église ce qu’elle juge nécessaire ou utile pour la défense de ses intérêts et de ceux du peuple chrétien. Voir Églisf, t. iv, col. 2212-2217 sq.

2. L’origine divine du pouvoir civil est communément enseignée, avec les devoirs et les droits qui en découlent, selon la doctrine de saint Thomas, De regimine principum, t. I, c. 6, 12 sq., 14 sq., puisée dans la révélation chrétienne et confirmée par la raison.

3. Au point de vue du droit international, la légitimité de la guerre est communément enseignée, moyennant certaines conditions qui doivent être observées dans sa déclaration et dans toute sa continuation. Voir S. Thomas, Sum. theol., U » -U æ, q. xl.

4. Droits et devoirs des individus.

a) Les droits inaliénables de la famille en face de l’autorité de l'État sont implicitement reconnus comme conséquence de l’institution divine du mariage, avec ses propriétés essentielles, selon cet enseignement communément admis par les théologiens, après S. Thomas : Ha de jure naturali est quod fdius antequam habeat usum rationis sit sub cura palris, unde contra juslitiam naturalem esset si puer, antequam habeat usum rationis, a cura parentum sublrahatur, vel de eo aliquid ordinetur invitis parentibus. Sum. theol., II a II a>, q. x, a. 12.

En faveur de ces mêmes droits et en faveur des droits primordiaux des individus vis-à-vis de l'État, on peut encore citer les deux articles de saint Thomas formulant explicitement les limites de l’obéissance due à l’autorité, IIa-IIæ, q. civ, a. 5 ; et les conditions requises pour que les lois humaines soient justes et obligent en conscience, Ia-IIæ, q. xevi, a. 4. Signalons aussi l’enseignement de saint Thomas sur la conduite à tenir en face des excès de la tyrannie de l'État ou du souverain, De regimine principum, t. I, c. 6.

b) Les devoirs mutuels des diverses classes de la société, particulièrement le devoir de la charité et celui de l’aumône, ont été précédemment exposés d’après l’enseignement de saint Thomas communément admis à cette époque. Voir Charité, t. ii, col. 2256 sq. ; Aumône, 1. 1, col. 2565.

c) Relativement au droit de propriété individuelle. C’est un principe communément affirmé que, dans l'état actuel de l’humanité depuis la chute originelle,

l’institution humaine de la propriété privée est nécessaire pour la paix et la tranquillité de la société, et pour une activité suffisante du travail humain. S. Thomas, Sum. theol., II"- !  ! 88, q. lxvi, a. 2 ; et que cette institution, qui n’est point imposée par le droit naturel, mais qui ne lui est point contraire, a été, pour ces sages raisons, établie par la volonté des hommes : unde proprietas possessionum non est contra jus naturale, sed juri naturali superadditur per adinvenlionem rationis humanæ, loc. cit., ad lum. Enseignement communément admis par les théologiens de cette époque. Voir S. Antonin, Summa theolog., part. III, tit. iii, c. ii, t. iii, col. 180 sq. En même temps l’on admet que, par la pratique de la charité, l’usage de toutes choses doit être commun : Aliud vero quod compelit homini circa res exteriores est usus ipsorum ; et quantum ad hoc non débet homo habere res exteriores ut proprias sed ut communes ; ut scilicet de facili aliquis eas communicet in necessitale aliorum. S. Thomas, Sum. theol., II"- !  ! 33, q. lxvi, a. 2.

d) Relativement aux devoirs de justice à observer dans les contrats. — a. C’est aussi un principe communément admis qu il y a obligation de justice à suivre le juste prix dans le contrat d’achat et de vente, et conséquemment dans toutes les transactions commerciales ; et qu’il y a, de soi, injustice, en dehors de circonstances spéciales ou de titres extrinsèques, à vendre ou à acheter une chose à un prix intérieur à sa valeur réelle. S. Thomas. Sum. theol., I I a -Il æ, q. lxxvii, a. 1.

A noter toutefois que, dans le contrat d’achat, la recompensatio secundum œqualitatem doit s’entendre d’une estimation morale : justum pretium non est punctualitcr determinatum sed magis in quadam œstimatione consislit, ita quod modica additio vel minutio non videtur tollere œqualitatem justitiæ, loc. cit., ad lum.

Dans la mesure autorisée par ces principes, le commerce consistant à acheter pour revendre plus cher est, au point de vue moral, considéré comme permis en soi, selon l’enseignement de saint Thomas, pour autant que le profit est ordonné à quelque fin nécessaire, ou à quelque but honnête. Sum. Iheol., IF-Il 38, q. lxxvii, a. 4. Voir aussi S. Antonin, Sum. theol., part. II, tit. i, c. xvi sq., t. ii, col. 247 sq., qui, avec le même enseignement, a beaucoup d’indications pratiques concernant le juste prix et les divers moyens de fraude.

b. On peut affirmer que le principe qui vient d'être cité, concernant l’interdiction, en justice, d’acheter une chose à un prix inférieur à sa valeur réelle, contenait, au moins implicitement, l’interdiction en justice de donner à l’ouvrier, pour le travail qui lui est comme acheté, un salaire inférieur à la valeur de ce travail. C’est ce que saint Thomas indique, bien que très accidentellement. Dans la question du mérite surnaturel qu’il compare au salaire dû en justice à l’ouvrier, il définit incidemment le salaire : Id merces dicitur quod alicui recompensatur pro retributione operis vel laboris, quasi quoddam pretium ipsius ; unde sicut reddere justum pretium pro re accepta ab aliquo est actus justilia', ita etiam recompensare mercedem operis vel laboris est actus justitiæ ; justitiæ autem œqualitas quædam est. Sum theol., I a -Il æ, q. cxvi, a. 1.

La conclusion est expressément formulée par saint Antonin de Florence. Comme l’ouvrier est digne de son salaire ex debito justitiæ, de même il est digne d’un salaire convenable ; sinon il y aurait violation de l'égalité requise par la justice ; comme dans le contrat d’achat et de vente il y a injustice et péché lorsque la chose est achetée à un prix inférieur au juste prix, à cause de la nécessité du vendeur. Sum. theol., part. II, tit. i, c. xvii, p. 8, t. ii, col. 1269.

Ailleurs, en parlant de la fin que l’artisan ou l’ouvrier