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MORALE, LES DIVERSES MÉTHODES


De même aussi la légitimité du droit de propriété individuelle est appuyée sur ee fait d’observation et d’expérience commune, qu’il y a, dans la société, plus d’activité au travail, plus d’ordre et de tranquillité, là où chacun possède en propre, Sum. theol., IIa-IIæ, q.LXVi, a. 2 ; I a -Il æ. q. cv, a. 2, et ad 3um. La légitimité du droit de propriété individuelle repose aussi sur cet argument de raison, que l’on doit préférer, pour la société civile, le régime de propriété qui lui est le plus avantageux. II"-Il ffi, q lxvi, a. 2. De même encore l’indissolubilité du mariage repose, en partie, sur ces données d’observation et d’expérience, que l’union permanente de l’homme et de la femme est, communément et de soi, nécessaire pour la lente et complète éducation de l’enfant. Cont. Gent., . III, c. cxxii ; voir Mgr Deploige, Le conflit de la morale et de la sociologie, 2e édit., Paris, p. 358 sq., 364 ; M. Nivard, op. cit., introduction, p. xviii sq.

/II. méthode pratique. — Avec la méthode positive et la méthode scolastique, la théologie morale doit, pour répondre à son but qui est de diriger les actes humains vers la fin dernière surnaturelle, employer aussi une méthode d’application pratique dont saint Thomas démontre ainsi la nécessité : Sed quia operaliones et aclus circa singularia sunt, ideo omnis operativa scientia in particulari perficitur. Enseignement répété aussi dans le prologue de la Il a -Il æ : sermones enim morales uniuersales minus sunt utiles eo quod actiones in parlicularibus sunt.

1° En ce qui concerne la casuistique, l’usage de cette méthode d’application pratique a déjà été décrit, avec les conditions que l’on doit y observer. On se rappellera notamment que les décisions ou solutions pratiques ainsi obtenues, doivent toujours être appuyées sur des déductions théologiques suffisamment indiquées. Voir Casuistique, t. ii, col. 18C0 sq.

Notons aussi, que même en cette matière, saint Thomas nous donne d’excellents exemples de questions pratiques, traitées avec toutes les qualités qui conviennent à la bonne casuistique : distinctions nettement posées, principes toujours rappelés et conclusions formulées dans la juste mesure autorisée par les distinctions posées et les principes rappelés.

Nous signalerons particulièrement, dans la vertu de foi, plusieurs questions pratiques concernant les infidèles, II B -Il æ, q. x, a. 7 sq., les hérétiques et les apostats, q. xi sq., et le blasphème, q. xiii ; dans la question de la charité, ce qui concerne l’ordre de la charité, q. xxvi, l’aumône, q. xxxii, la correction fraternelle, q. xxxiii, la guerre, q. XL, la sédition, q. xli, a. 2, le scandale, q. xliii ; et relativement à la justice, q. lxii, lxiv sq.

2° En théologie pastorale, l’application de cette méthode comprend, outre la casuistique proprement dite appliquée au ministère sacerdotal, des conseils, recommandations ou directions concernant tout ce qui est utile, pour assurer un fructueux accomplissement des principales fonctions du ministère sacerdotal et pastoral.

Ici encore, il est évident que pour conserver à la théologie pastorale le titre effectif de science théologique, on doit veiller à ce que les directions ou recommandations pratiques, soient suffisamment appuyées sur les enseignements ou’les préceptes de l’Église et sur la doctrine théologique, dont les principes sont particulièrement rappelés par saint Thomas, Sum. theol., IIM1°, q. clxxxiv, a. (i, 8 ; Cont. Cent., t. IV,

C. LXXIV.

3° lui théologie ascétique et mystique, l’application <ic ( « lie met Mode comprend, d’une manière générale, l’emploi des moyens nécessaires ou utiles pour la bonne direction effective de la conscience dans la pratique de la perfection chrétienne. Voir Ascétique.

De cette application, d’excellents exemples nous sont donnés par saint Thomas ; pour la pratique de la dévotion, II a -Il æ, q. lxxxiii, pour la pratique de l’obéissance en ce qu’elle a de plus parfait, q. civ, a. 4, q. clxxxvi, a. 5 ; pour la pratique de la tempérance et de la mortification corporelle, q. cxli, a. 6 ; q. clxxxvi, a. 2, ad 3um ; pour la pratique de l’humilité, q. clxi ; pour l’application à l’étude, q. cxlvi ; pour la vie contemplative, q. clxxx.

IV. PART RESPECTIVE DE CES TROIS MÉTHODES

EN théologie uorale. — Outre ce qui a été dit de la méthode scolastique à l’art. Dogmatique, t. iv, col. 1540, et qui convient également à la théologie morale, nous proposons les remarques suivantes.

1° Dans l’enseignement théologique proprement dit. - 1. Dans l’enseignement classique intégral comprenant toutes les matières du programme et ayant pour but immédiat la formation du prédicateur, de l’apologiste et du confesseur, on doit constamment unir les trois méthodes, en tenant compte des exigences particulières des diverses questions traitées, et en donnant toujours à la méthode scolastique dans la morale générale, et même dans la morale spéciale, une part qui, sans être nécessairement prépondérante, soit toujours importante. « * ! --}

a) On tiendra compte des exigences particulières des diverses questions traitées. Dans la morale générale, traitant de l’obligation de tendre à la fin dernière surnaturelle et des principes généraux concernant les lois, la conscience, les actes humains, les péchés et les vertus, une plus grande part devra être attribuée à la méthode scolastique, pour combattre, avec plus d’efficacité, les erreurs attaquant les principes fondamentaux et pour établir la doctrine morale sur des bases solides.

Dans les matières où les décisions de l’Église sont plus abondantes, comme en ce qui concerne les sacrements, une plus forte documentation positive est nécessaire, tandis que, dans la partie pratique du traité de la pénitence, on insistera sur les règles et conseils pratiques qui doivent diriger le confesseur dans l’accomplissement de ses divers devoirs, de manière à n’avoir qu’à signaler, dans le reste de la théologie, ce qui concerne l’application immédiate de ces mêmes devoirs.

b) La part assignée à la méthode scolastique, sans être nécessairement prépondérante, sera toujours importante, non seulement dans la morale générale, mais aussi dans la morale spéciale. C’est surtout par cette méthode que l’on fournira au confesseur les principes doctrinaux qui doivent le diriger dans la solution des cas de conscience, et que l’on assurera au prédicateur et à l’apologiste la doctrine solide qui leur est si nécessaire. La raison en est péremptoire. La casuistique pure ne fournit que des exemples ; et les cas similaires ne peuvent être convenablement résolus que si l’on a bien compris les principes d’où émane la solution pratique. De même, les autorités positives, ainsi que le montre l’expérience, ne peuvent être d’un usage bien profitable sans les connaissances théologiques qui éclairent leur véritable sens, facilitent leur justification et aident les déductions que l’on doit en tirer.

N’est-ce pas aussi, pour autant que la théologie morale le comporte, la conclusion que l’on doit retirer de renseignement de Léon XIII, demandant, dans l’encyclique.Lierai Patris, § Hoc au/fin novitatis sludium, que la théologie, sans distinction entre dogmatique et morale, soit traitée selon la grave méthode des scolastiques, en joignant le travail de la raison aux lumières de 1 ; > révélation, de manière à ce que la défense de la foi soit invincible ?

C’est d’ailleurs la pensée qui se dégage du canon