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MONOPHYSITE (ÉGLISE COPTE), SACREMENTS


tèrent qu’avec l’addition des mots sine confusione, commistione aut alteratione, ce qui est en faveur de leur orthodoxie. Quant à l’adjectif viuificum, que les moines de la laure Saint-Just avaient introduite, les évêques décidèrent de la maintenir comme conforme à la vérité. Cf. Renaudot, Hist. pat. Alex., p. 501-503, 526-527, et LU. or. coll., t. i, p. 255-260.

Sur la transsubstantiation proprement dite, le langage des théologiens coptes est beaucoup moins clair. Il faut reconnaître que plusieurs de leurs expressions suggèrent l’idée de la consubstantiation, voire même de l’impanation : ce qui et une nouvelle preuve que leur monophysisme est fort éloigné de l’eutychianisme proprement dit, qui, par sa théorie de la disparition de l’une des deux natures, sconduirait naturellement à affirmer la disparition du pain dans l’eucharistie. Les coptes, au contraire, comme du reste plusieurs théologiens syriens monophysites, parlent parfois un langage dyophysite quand il s’agit de l’eucharistie, à l’exemple des théologiens nestoriens.

Apportons quelques textes : Dans son ouvrage intitulé Confirmation de la foi orthodoxe, Sévère d’Asehmounaïn écrit : « Lorsque le pain, le vin et l’eau sont offerts sur l’autel et que la grâce du Saint-Esprit y descend, 17 s’unit à eux comme il s’était uni à cette chair et à ce sang par l’incarnation. Ils deviennent sans aucun doute sa chair et son sang ; ainsi il est toujours présent parmi nous. » Ce passage est quelque peu amphibologique. Heureusement que le même théologien s’explique ailleurs plus clairement et dit « que le pain et le viii, quand on les consacre au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ sont faits corps et sang ; qu’ils sont corps et sang par une manière toute secrète que nos yeux, souillés par le péché, ne peuvent pas découvrir. » Voir les textes traduits par Renaudot, Perpétuité, t. II, c. v, col. 125-128.

Plus compromettants sont certains passages des Homélies des dimanches et jours de fête, qui se lisent dans les offices. Dans l’homélie sur le début de l’évangile de saint Luc se trouvent ces mots : « Le Fils, Verbe de Dieu, s’unit au pain et au vin. les faisant son corps et son sang, de la même manière qu’il avait pris l’humanité dans l’Incarnation… Le prêtre prie pour demander la descente du Saint-Esprit sur le pain et sur le vin afin qu’il les sanctifie ; et lorsqu’il les a sanctifiés, alors le Fils s’unit à eux, et ils sont faits son corps et son sang par son union avec eux. » Renaudot, ibid., col. 135-136. Dans l’homélie sur le commencement de l’épîtrc de saint Jacques, l’union de Jésus-Christ avec le pain eucharistique est comparée à l’union de l’âme et du corps, union qui est selon lu nature, parce que la divinité invisible est unie au pain visible, afin que celui qui croit que ce pain lui est uni obtienne la béatitude. II faut avouer que l’auteur qui parle ainsi ne paraît pas avoir la notion de conversion substantielle. Voir d’autres textes semblables dans Kenaudot, loc. cit., col. 128, 137. Aux théologiens coptes, comme aux autres Orientaux, il manque une théorie des accidents eucharistiques. De là l’imprécision, l’impropriété, l’incorrection de leur langage. Très explicites dans l’affirmation de la présence réelle, ils talonnent quand il s’agit de formuler le mode de «-elle présence.

L’Église copte emploie le pain fermenté comme matière de l’eucharistie. Ce pain doit être fait de farine pure, cuit le jour même au four de l’église par le prêtre ou un autre homme, non par une Femme. Ainsi le prescrit une ordonnance île Cyrille Ibn Laqlaq.

Dm-, soi Livre de » sectes, Pierre de Malîg reproche aux lianes, comme nous l’avons vii, de siservir d’hosties vieilles de plusieurs jours. Il les attaque

inssi sur l’usage du pain azyme.

Ce n’est que tardivement, et sans doute sous

l’influence de la polémique grecque antilatine, que les théologiens coptes paraissent s’être posé explicitement la question du moment où s’opère la transsubstantiation. Les trois liturgies dont ils se servent ont toutes, et le récit de la Cène avec les paroles du Seigneur et une formule d’épiclèse suivant ce récit. Les paroles de l’institution sont prononcées à haute voix et accompagnées de gestes et de signes de croix. Le peuple répond Amen après chaque consécration. Il en est de même pour la prononciation des paroles de l’épiclèse. Dans les deux liturgies de saint Basile et de saint Grégoire, c’est non au Père, mais au Fils qu’est adressée la demande de l’envoi du Saint-Esprit, pour qu’il transforme les dons au corps et au sang du Sauveur. De plus, on trouve dans ces liturgies d’autres formules d’épiclèse demandant la conversion des oblats avant le récit de la Cène. Ainsi dans la messe de saint Basile, un peu après le commencem. -nt, on lit ces paroles : Domine, Jesu Christe.. ostende faciem tuam super hune panem et super hune calicem… Bcnedic eosf, sanctificæos f, et consecra eosj : transfer eos, ita ut punis quidem hic fïat corpus sanctum tuum, et hoc mistum in hoc calice, sanguis tuus pretiosus, ut sint nobis omnibus præsidium, medicina, salus animarum. Renaudot, Lit. or., t. i, p. 3. Dans la liturgie de saint Cyrille, il y a aussi une épiclèse après le Sanctus, avant les paroles du Seigneur. Cette multiplicité d’épiclèses favorise la doctrine catholique sur la forme du sacrement, loin de la contredire.

Si nous interrogeons les théologiens, nous en trouvons plusieurs qui attribuent la consécration des dons à l’opération du Saint-Esprit, mais sans déterminer de moment précis. C’est le cas de Sévère d’Aschmounaïn et de Ibn Sabà. Renaudot, Perpétuité, loc. cit., col. 125-126, 134. D’autres sont nettement favorables à l’opinion des Grecs plaçant le moment de la transsubstantiation aussitôt après les paroles de l’épiclèse qui suit le récit de la Cène. Ainsi le patriarche Gabriel dans son Rituel : « Lorsque le prêtre a prononcé ces paroles : Qu’il fasse ce pain le saint corps de Notre-Seigneur Jésus-Christ, le pain est fait le cGrps de Jésus-Christ qu’il a pris de la vierge Marie… Lorsqu’il prononce ces paroles : Et le sang précieux, le vin qui est devant lui est fait, le sang de Jésus-Christ, répandu sur le bois de la croix… Lorsqu’il aura achevé l’invocation, il s’inclinera devant Dieu, étendant les mains ; ce que le peuple fera pareil lement ; il ne fera plus alors aucune bénédiction sur les dons sacrés. » Renaudot, op. cit., I. II.c.ix, col. 154. La même opinion paraît avoir prévalu parmi les coptes modernes. Cependant, au xviie siècle, le patriarche .Matthieu IV (1060-1675) remit à l’ambassadeur de France près de la Porte une profession de foi dans laquelle il disait : « Jésus-Christ fait son corps par sa parole en disant par la bouche du prêtre : Ceci est mon corps. « Arnauld, Perpétuité de la foi touchant l’eucharistie, édit. Migne, t. ii, col. 1265. Il ne faut pas oublier non plus qu’on lit au peuple, le Jeudi saint, la première homélie de saint Jean Chrysostome sur la trahison de Judas, où ce docteur attribue explicitement la consécration aux paroles du Seigneur.

La communion est donnée aux fidèles sous les deux espèces per modum intinctionis avec une petite cuillère, comme cela se pratique chez les Grecs. Les petits enfants reçoivent l’eucharistie aussitôt après la confirmation sous la seule espèce du vin.

Un usage particulier de l’Église copte, qui s’est perpétué jusqu’à nos jours, est de ne point garder la

sainte réserve même pour les malades. « si quelqu’un

tombe en danger de mort, on dit la messe pour lui à quelque heure que ce soit du jour ou de la nuit, et on lui porte le viatique en la seule espèce du pain, sur lequel ont été faites deux croix avec l’espèce du