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MONOPHYSITE (ÉGLISE COPTE), CROYANCES


le sépulcre, afin qu’elle fût pour lui comme une marque d’honneur et de grâce, parce qu’il était leur chef et leur patron ; et cet apôtre avait coutume de s’en entourer la tête chaque fois qu’il ordonnait des évoques et des métropolitains. » Ibid, p. 3-4. Jean Ibn Sabâ dit que « l’Eglise est édifiée sur le roc de la foi qui est Pierre, le chef de tous les apôtres », La perle précieuse, c. xxxiii, loc. cit., p. 704, tandis qu’Abou’l Barakât, sans du reste avoir l’intention de nier la primauté de Pierre, entend le Tu es Petrus de la foi de Pierre. J.u lampe des ténèbres, c. ii, édit. Villecourt-Tisserant, loc. cit., p. 709, 726.

A propos de la primauté du pape, voici comment Sévère d’Aschmounaïn interprète la condamnation de Dioscore par saint Léon : « Après le concile d’Éphèse (449), plusieurs de ceux qui avaient été excommuniés par Dioscore allèrent se plaindre au pape Léon. Ils accusèrent Dioscore d’avoir tenu un synode « sans te réserver une place, disaient-ils, sans te demander de venir, (sans te consulter sur ce qu’il convenait de faire, et d’avoir excommunié le patriarche de Gonstantinople et eux-mêmes, et cela de sa seule autorité, tandis que c’est toi le Père suprême, patriarche de la grande ville de Rome, successeur de Boutros ( = Pierre) prince des Apôtres. Gomment Dioscore peut-il entreprendre de pareilles actions de ton vivant ? » Réfutation d’Eutychius, édit. Chébli, P. O., t. iii, p. 170. Cf. Histoire des conciles, édit. L. Leroy, P. O., t. vi, p. 514. Les coptes trouvent la primauté de l’évêque de Rome exprimée non seulement dans les écrits des Pères antéchalcédoniens, mais aussi dans les Actes et décrets de plusieurs conciles qu’ils reçoivent : tels les canons de Sardique sur le droit d’appel, les Actes du concile d’Éphèse, les canons arabes de Nicée. Dans le 8e de ces derniers canons, le patriarche de Rome est appelé le successeur de Pierre ; dans le 37°, il est proclamé le chef et le président des trois autres patriarches : Etsit princeps ac prsepositusipsis dominus Sedis divi Pétri Romæ, sicut præceperunt apostoli. Hardouin, Collectio concil., t. i, col. 479, 484 ; dans le 44e, son pouvoir de juridiction sur les autres patriarches est clairement affirmé : Et quemadmodum patriarcha potestatem habet super subditos suos, ita [quoque potestatem habet romanus Pontifex super universos palriarchas, quemadmodum habebat Petrus super universos cliristianitatis principes et concilia ipsorum : quoniam (ihristi vicurius est super Rcdemptionem, Ecclesias et curalos populos ejus. Quicumque autem sanctioni huic contradixerit, patres synodi anathemate illum percellunt, Hardouin, ibid., col. 485 ; dans le 71° sont condensés les canons de Sardique sur le droit d’appel au pontife romain. Ibid., col. 491.

Mais ces belles déclarations deviennent pratiquement illusoires et inefficaces par la négation de l’infaillibilité doctrinale du successeur de Pierre. En accusant le pape saint Léon d’être tombé dans l’hérésie, (en refusant de recevoir son tome sur le mystère de l’incarnation, tous les monophysites ont rompu avec le principe de l’unité et versé dans l’autocéphalisme ethnique : A Chalcédoinc, l’empereur dit, après la lecture du tome de Léon : « Voilà la lettre et la croyance de Léon, qui est le premier Père parmi vous. » Dioscore répondit : « Si Léon se maintient dans la foi orthodoxe, il demeure grand et honoré ; mais s’il en dévie, il tombe comme Satanaël. » Sévère d’Aschmounaïn, Réfutation d’Eutychius, P. O., loc cit., p. 173. Ainsi, pratiquement, le patriarche d’Alexandrie est devenu pour les coptes l’autorité suprême, le vicaire « le Jésus-Christ et son apôtre : et c’est bien ainsi qu’ils l’appellent. Cf. Vansleb, op. cit., p. 7. Les théologiens coptes ne paraissent pas avoir jamais agité, comme le font de nos jours les gréco-russes, la question du concile œcuménique. De concile œcuménique, ils n’en

ont pas besoin. D’après eux, le rôle du patriarche est de conserver l’ordre établi, la tradition des Pères. Le progrès doctrinal s’arrête à Éphèse et à Dioscore.

La Trinité.

Il y a peu de chose à glaner chez

les Coptes sur la théologie trinitaire. On ne retrouve même pas chez eux les développements des Pères alexandrins : Athanase, Didyme, Cyrille. Ce qu’ils disent du mystère ne dépasse guère les affirmations dogmatiques du symbole de Nicée-Constantinople. Notons pourtant un essai de spéculation inséré, par Abou’l Barakât, dans le chapitre I er de sa Lampe des ténèbres, et probablement emprunté à Assafî Abou’l Fadaïl Ibn al’Assâl. Les trois personnes de la Trinité y sont appelées « des attributs révélés », et l’on essaie de démontrer par deux arguments de raison qu’il y a trois personnes en Dieu, et qu’il ne peut y en avoir ni plus, ni moins.

Le premier argument est celui de l’intellect, de l’intelligent et de l’intelligible. « La notion d’intelligence a trois degrés : dans son essence on l’appelle intellect, dans son exercice on l’appelle intelligent et, quand elle est au terme de son acte de comprendre, on l’appelle intelligible. Au premier degré, les chrétiens la nomment Père ; au second, ils la nomment Fils parce que l’intelligent provient de l’intellect ; et en tant qu’elle est intelligible, ils la nomment Esprit ; et parce que ces propriétés sont le terme de la perfection, c’est d’elles que dérive réellement l’existence du monde… Il est évident que le mot intellect ne contient pas le sens d’intelligent ni le sens d’intelligible, et que le sens de chaque mot : intellect, intelligent et intelligible, diffère l’un de l’autre. Quand donc le créateur pense son essence et que son essence est pour lui pensée, trois attributs lui sont dévolus, et chacun d’eux diffère l’un de l’autre. Et puisqu’il est une essence simple, qui n’est susceptible d’aucune adjonction, il est la cause des deux autres significations par lesquelles l’essence est décrite, puisque, quand on s’imagine sa disparition, disparaissent les deux significations qui existent par son existence. Il ne se peut pas, d’après ce raisonnement, qu’il y ait pour lui une relation à autre chose que ces trois : pas de quatrième à leur adjoindre, et impossibilité qu’il y en ait moins de trois. Ainsi est exacte l’assimilation de l’intellect, de l’intelligent et de l’intelligible au Père, au Fils et au Saint-Esprit, étant donné que le Père est intellect, cause du Fils et de l’Esprit, et que le Fils est, par sa définition d’intelligent, existant pour l’intellect, consubstantiel à celui-ci sans lui être extérieur, et que l’Esprit est, par sa définition d’intelligible, envoyé du Père, procédant de lui. » La lampe des ténèbres, loc. cit., p. 638-640.

Le second raisonnement est basé sur les trois attributs de vie, de puissance et de science, ou bien d’aséité, de vie et de sagesse : Dieu est décrit comme vivant, puissant et savant ; ou bien comme subsistant en lui-même, vivant et sage. Retrancher un de ces attributs serait diminuer Dieu ; y ajouter serait superflu, tous les autres attributs dérivant de ceux-là. Or ces attributs ne peuvent être ni des accidents, ni des natures ou essences : ils sont donc des personnes. Ibid.. p. 638, 645-646.

Sur la procession du Saint-Esprit, les théologiens coptes n’ont rien retenu de l’enseignement si explicite de saint Athanase et de saint Cyrille, affirmant que la troisième personne procède du l’ère par le Fils, provient des deux, est (le la substance du Fils, est l’image du Fils comme le Fils est l’image du Père. Ils s’en tiennent à l’affirmation du symbole : Qui prochic du Père, ou à cette autre : Qui procède de la substituer du Père. Cf. Abou’l Harakât, op. et loc. cit., p. 708, 722, 72."> ; Sévère d’Aschmounaïn, Histoire des conciles, loc. cit., p. 579 : « Le caractère propre du