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MESSE DANS LA LITURGIE, LA MESSE ROMAINE


n’est pas primitif ; les païens en faisaient un tel abus dans le culte des idoles qu’il fut prohibé dans les premiers siècles. C’est à peine si l’on en faisait usage pour les funérailles. Mais, à partir du ive et du ve siècle, quand le paganisme eut perdu à Borne et dans tout l’empire une partie de ses fidèles, le même inconvénient n’existait plus, et du reste la pratique en était justifiée par l’Ancien Testament.

Le Kyrie est d’origine byzantine et a été importé à Rome probablement dès le v siècle. C’est à tort qu’on y a "vu quelquefois un reste de la langue grecque qui fut en usage à Rome jusqu’au milieu du nie siècle. C’est du reste une prière adventice qui, comme le Gloria, le Credo et l’Agnus Dei, ne se rattache ni à ce qui précède, ni à ce qui suit et pourrait se lire à d’autres offices qu'à la messe, comme ce fut du reste le cas. La forme actuelle, trois Kyrie, trois Christe, trois Kyrie, auxquels on a naturellement cherché un sens mystique, ne remonte guère au de la du xie siècle. Au temps de saint Grégoire il formait une sorte de litanie qui rappelle la litanie diaconale de la messe grecque. Cette acclamation a son histoire qui a fortement intrigué les liturgistes, les théologiens et les archéologues. On a voulu lui trouver une origine païenne, et il est certain en effet qu’il est fait allusion dans Arrien et même dans Virgile à un Kyrie eleison. Mais cette acclamation se trouve aussi plusieurs fois dans l’Ancien et dans le Nouveau Testament, et son origine païenne n’est rien moins que démontrée. Nous avons aussi le Kyrie sous une autre forme dans les litanies du samedi saint, dans celles des rogations et en général dans toutes les prières de ce genre. Ed. Bishop en a étudié savamment l’histoire et nous avons résumé ses conclusions dans les articles Kyrie eleison et Litanies du Diction, d’archéol.

Le Gloria in exeelsis Deo est une hymne d’origine ancienne que l’on chantait dans les synaxes en l’honneur du Christ. Les plus anciens textes que l’on connaisse sont celui des Constitutions apostoliques, t. VII, c. xlvii, et celui du Codex alexandrinus, v siècle, comme appendice à la Bible grecque. On l’appelle la grande doxologie pour la distinguer de la petite doxologie, Gloria Patri et Filio, et des autres doxologies. On le chantait à l’office du matin. A Borne on l’admit à la messe le jour de Noël, et cette place était justifiée par les premiers mots qui sont le salut des anges au jour de la nativité. Le pape Symmaque (498-514) en étendit l’usage à tous les dimanches et aux fêtes des martyrs, Liber pontif., éd. Duchesne, 1. 1, p. 129 et 263, mais seulement aux messes célébrées par l'évêque. Les simples prêtres ne devaient le chanter que le jour de Pâques, quand ils remplaçaient le pape empêché, ou le jour de leur installation. Duchesne, Origines, p. 176. Le texte des Const. apost. n’est probablement pas le texte primitif ; tel qu’il est cependant, on peut conjecturer que c'était une doxologie à deux termes, le Père et le Fils ; le Saint-Esprit n’intervient qu'à la fin, et cette insertion, qui n’est pas dans le texte des Const. apost., semble une addition dont le résultat fut d’en faire une doxologie trinitaire, comme la plupart des doxologies à partir du milieu du ive siècle. Le texte d’allure subordinatienne des Const. apost. a été corrigé ; on y affirme la divinité du Fils, son égalité avec le Père dans le Saint-Esprit ; le Gloria est ainsi devenu, comme le Credo, une profession de foi en même temps qu’un chant de louange. Dans les liturgies latines anciennes, le cantique Benediclus, Luc, i, 68 sq., rivalisa avec le Gloria in exeelsis, mais celui-ci finit par l’emporter.

Dans la messe primitive romaine, avant ces diverses additions, le célébrant, après avoir baisé l’autel, a pris place à son siège où il restera jusqu’après l'évangile, et il salue le peuple par ces mots Pax vobis,

et, s’il est simple prêtre, par le Dominus vobiscum. Après la réponse et cum spiritu tuo, il dit Oremus et la collecte, titre qui rappelle que le prêtre prie au nom de toute l’assemblée, ou qui fait allusion à la réunion des fidèles pour la messe.

La collecte, comme la secrète et la postcommunion, est une prière essentiellement romaine. Toutes ces oraisons ont un caractère de sobriété, d'élégance, en même temps qu’une richesse et une sûreté de doctrine qui met la liturgie romaine si au-dessus des autres liturgies latines et même des liturgies orientales. On trouve souvent à la vérité dans celles-ci plus d'élan, une piété plus affective, des exposés dogmatiques plus étendus, mais combien souvent aussi ces qualités sont gâtées par la prolixité, par le mauvais goût, par un verbiage inutile ! Les anciennes collectes romaines, en même temps qu’elles sont la première prière de la messe dite par le pontife au nom des fidèles, ont d’ordinaire pour objet de définir le caractère de la réunion. Par exemple Deus qui Ecclesiam tuam annua quadragesimali observatione purificas, prsesta familiæ tuse ut quod a te obtinere abstinendo nititur, hoc bonis operibus exequatur. (1 er dim. de carême.)

Lectures et chants des psaumes.

A partir du

vi° siècle il n’y a plus à Borne, à l’avant-messe, que deux lectures : l'épître et l'évangile ; à l’origine elles furent plus nombreuses et d’ordinaire trois ; aujourd’hui encore aux quatre-temps et à certaines vigiles, il y a trois, six ou même douze lectures. La suppression de la leçon prophétique a dû se faire à Borne au v » siècle selon Duchesne. Loc. cit., p. 178. Les lectures sont d’ordinaire suivies du chant d’un psaume, comme on le voit encore au vendredi et au samedi saint, aux quatre-temps et même à l’office de matines. Le chant qui suit la lecture est en général un psaume appelé répons, parce qu’il est chanté par un chantre, avec reprise par le chœur ; celui qui suit l'épître s’appelle graduel ; d’autre fois le psaume est chanté en trait, tractim, c’est-à-dire sans reprise. Le chant de Yalleluia qui suit aujourd’hui directement celui du graduel, se présente dans des conditions spéciales qui n’ont pas encore été bien nettement définies. On sait toutefois que Yalleluia est une acclamation qui se rencontre dans l’Ancien Testament et que les chrétiens ont hérité des juifs, comme l’Amen, YHosanna et autres. Il était d’abord chanté à Pâques et au temps pascal, puis à tous les jours de fête. Il est aujourd’hui accompagné d’un psaume. Les diverses théories sur l’origine et l’introduction du chant responsorial, par un seul chantre, avec reprise du chœur, ont été longuement discutées par les liturgistes, mais n’ont pas à être étudiées ici. Il nous suffira de rappeler que les psaumes d’introït, d’offertoire et de communion sont antiphonés, tandis que le graduel et les répons de la psalmodie sont responsoriaux. Le chant des psaumes et des répons est un emprunt fait à la Synagogue, comme la lecture des livres saints, tandis que les chants de l’introït, de l’offertoire et de la communion, ont été institués au rve siècle et motivés par les besoins particuliers du culte. Le graduel dont l’importance paraît avoir été plus grande, fut réservé d’abord aux seuls diacres, puis aux sous-diacres, puis à des chantres très spécialement formés ou aux lecteurs. Le caractère du trait est d'être chanté sans reprise ; quant à la séquence qui se rattache à Yalleluia, d’origine très postérieure, elle eut une grande fortune au Moyen Age ; l'Église romaine, toujours sévère pour la poésie, n’en a retenu que cinq qui sont des chefs-d'œuvre.

Quant aux lectures, l'Église de Borne se montra toujours sévère dans leur choix ; les seuls livres de l’Ancien et du Nouveau Testament y furent admis selon un canon établi dès les premiers siècles, et pro-