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MONOPHYSISME, LES ÉGLISES MONOP H YSITES


c’est la même doctrine qui prévaut. Après la conquête arabe (G39-641), l’Église copte garde le credo de Dioscore, de Sévère et de Théodose.

2. La croyance de ces Églises n’apparaît pas moins clairement : 1° dans le culte qu’ils rendent aux Pères de l’Église antérieurs au concile de Chalcédoine ; 2° dans les professions de foi et les décrets de leurs conciles particuliers ; 3° dans leurs livres liturgiques ; 4° dans les écrits de leurs principaux théologiens postérieurs aux controverses des ve et vie siècles.

a) Tous les grands docteurs de l’Église antérieurs au concile de Chalcédoine prennent rang dans le calendrier des Églises monophysites. Les postnicéens y figurent comme les anténicéens. Celui à l’autorité duquel ils en appellent le plus souvent est évidemment saint Cyrille d’Alexandrie, que personne d’informé n’accusera d’eutychianisme. Les Arméniens font le plus grand cas de l’épître dogmatique que leur écrivit Proclus de Constantinople, où le dogme de l’union des deux natures est clairement exposé, Mansi, Concilia, t. v, col. 421-438. Coptes et jacobites de Syrie célèbrent comme une lumière de leur Église Sévère d’Antioche, qui a écrit plusieurs traités contre l’eutychianisme et a combattu jusqu’à la fin le julianisme.

b) Les pro/essions de)oi officielles de ces Églises expriment en terminologie monophysite une christologie orthodoxe. Quelques citations suffiront à nous en convaincre.

a. Écoutons d’abord l’Église arménienne :

Le second symbole de foi reçu par les Arméniens s’exprime ainsi au sujet de l’incarnation : « Alors qu’il était Dieu parfait, il s’est fait homme parfait avec l’âme, l’esprit et la chair : une hypostase, une personne et une nature unie. » L’expression : une nature unie est équivalente aux formules grecques : uia cpôaiç oeaapxco[j.évr), p ; îa cpûatç oÔvÔetoç.

Au concile syro-arménien de Manazgherd tenu sous le catholicos Jean Oznetsi (719-726), on lut une profession de foi où se rencontre le passage suivant : « Nous confessons que le même Dieu le Verbe a opéré des miracles comme Dieu, et qu’il a éprouvé les infirmités humaines comme homme ; le même, en effet, est Dieu parfait et homme parfait. Il a véritablement souffert et est mort dans un corps passible, lui qui comme Dieu ne pouvait souffrir. » Tournebize, Histoire politique et religieuse de l’Arménie, Paris, 1900, p. 391. Dans les anathématismes qui font suite à cette profession de foi, l’eutychianisme et le théopaschitisme sont clairement condamnés : « Si quelqu’un ne confesse pas que le Christ a éprouvé dans son corps humain toutes les passions humaines, hormis le péché, mais affirme que la divinité a été sujette aux souffrances ou que son corps (du Christ) a été exempt des infirmités humaines, qu’il soit anathème (anathème 8).

— Si quelqu’un ne confesse pas que cette unique nature (— çûaiç) de la divinité et de l’humanité, c’est-à-dire du Christ, qui a été formé de la divinité et de l’humanité, n’a pas été unie d’une manière ineffable sans mélange, division ni confusion, qu’il soit anathème (an. 4). » Tournebize, ibid., p. 392-39.’".

Même doctrine dans les canons du synode de Cbiragavan, qui anathématise expressément Eutychès : « Si quelqu’un ose dire, suivant la folie d’Eutychès, que la chair du Verbe divin a été apportée du ciel, ou est d’une autre substance que la nôtre ; ou bien s’il affirme que la nature divine a été confondue avec la chair ou transformée en la chair, rendant ainsi vaine notre rédemption, qu’il soit anathème (can. G). — si quelqu’un ne confesse pas que le Verbe du l’ère fait homme n’est pas Dieu parfail ci homme parfait,

Composé de deux nal nies < I : i n s un seul suppôt et une seule personne, COnsnbstantiel au l’ère selon la divinité et notre consubstantiel en tout, hormis le [léché,

selon l’humanité, qu’il soit anathème (can. 7). » Balgy, Historia doctrinæ catholicm inter Armenos unionisque eorum cum Ecclesia romana in concilio Florentinn, Vienne, 1878, p. 218-219. D’autres canons condamnent le théopaschitisme.

Les mêmes déclarations abondent dans les actes des synodes arméniens. Au xiie siècle, le catholicos Kersès IV, dit le Gracieux, envoie successivement à l’empereur byzantin, Manuel Comnène, trois professions de foi où l’équivoque créée par l’expression [lia. çûaiç, una naturo, est entièrement dissipée. Le patriarche arménien s’y montre d’une orthodoxie irréprochable sur le mystère de l’incarnation, ei. en vient jusqu’à reconnaître comme également légitimes la terminologie monophysite et la terminologie de Chalcédoine et de saint Léon. Citons ce passage de la troisième et dernière profession de foi :

Ex isto examine palam facturn est mutuum mendacium absconditum, fuitque expulsum, ac manifestata est veritas ; fuitque firmatum vos longe abesse a Nestorii divisione nosque ab’Eutychetis mistione ; atque alter ad alterum per Dei gratiam prope facti sumus recta fidei professione… Quapropter haud separamus, juxta Nestorium, unum Christum in duas naturas atque in duas personas ; neque juxta Eutychen ejusque sectatores, in unam naturam adunamus confusione et mutatione : veruni duie natures dicendæ sunt nobis juxta magnum Gregorium Theologum, qui in epistola ad Claudium data adversus Apollinarem ejusque fautores inquit duæ naturæ, causamque addit : quia Dois et homo, idque rectum est. Si fuisset enim solus Deus aut solus homo, tune dicendum esset unam solam habuisse naturam sive Dei, sive hominis ; at quum Deus esset et homo per ineffabilem mistionem, sine mutatione unitus, patet divinam humanamque habuisse naturam, imitas tamen atque indi visibiles, ad instar animæ et corporis ; atque etiam exemplo excellentior est veritas de duarum naturarum unione… Quo autem modo unam dicimus naturam, nemo credat alio sensu dici nisi ob indivisibilem unionem duarum naturarum : quod et didicimus ab orthodoxis Ecclesiæ doctoribus, prsesertim a sancto Cyrillo Alexandrino adversus Nestorium… Quare et nos, iisdem ductoribus, in veritatis viam, quæ ad Deum perducit, recte et libère in duplicem ferimur verborum contemplationem, dicentes unam naturam Verbi incarnait juxta sanctum Cyrillum, ob ineffabilem unionem, et duas naturas juxta Theologum Gregorium quia immutabiles et inconsumptibiles comperiuntur duæ naturæ, divina et humana ; non ab uno latere usurpantes arma justitiæ verum, juxta Apostolum, a dextris et a sinistris. J. Cappelletti, Sancti Nersetis Clajensis, Armenorum catholici, opéra, Venise, 1838, 1. 1 : Libellus confessionis fidei Ecclesiæ armenie, p. 232, 234237.

Nersès, r on le voit, dépasse les monophysites antichalcédoniens : il abandonne leur exclusivisme, et son monophysisme rejoint le monophysisme orthodoxe, dont nous parlerons tout à l’heure.

b. Les patriarches syriens jacobites, tout en enseignant la même doctrine que lui, se montrent moins tolérants à l’égard des formules dyophysites dans leurs lettres synodiques adressées aux Coptes et aux Arméniens en signe de communion. Ils y confessent communément une seule nature du Christ composée de la divinité et <le l’humanité, qui restent sans changement, sans mélange ni confusion. En les comparant entre elles, on voit clairement que nature, la çûaiç de Sévère, est synonyme pour eux d’hypostase et de personne. Ils disent, en effet, que le Christ est de deux natures ou de deux personnes : ce qui doit s’entendre clans le sens expliqué plus haut. Cf. Assémani, Dissertatio de monophysitis, p. 14-15, et dans la Hibliotheca orientalis, t. ii, p. 125, 137, 152, 198,

r. Il faut dire la même chose des professions de foi di’s patriarches coptes, à leur avènement. On en trouve plusieurs dans Vllistoria patriarcharum Alexandrinorum jacobilartun de Kenuudot. Voici, par exemple, ce qu’on lit dans une lettre pastorale du patriarche