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MONOPHYSISME SEVÉRIEN


littéralement la phobie du nestorianisme et traitent de nestoriens quiconque dit Sûo cpûaeiç après l’union.

2. Les expressions : ëvwaiç cpuaixif), ëvwaiç xaxà cpûaiv, ëvcoaiç xxO’ûrcôaTaaiv sont synonymes, en vertu même de la synonymie de cpûaiç et de ÛTCÔaTaaiç. Elles n’ont rien d’hétérodoxe et signifient simplement ce que nos théologiens entendent par Vunion hyposlatique ou dans la personne : l’union de l’humanité et de la divinité dans le Verbe se termine à l’unité, ëvwaiç ; mais c’est une unité d’hypostase ou de personne, non d’essence ou de nature au sens chalcédonien et catholique. Cette unité, c’est la cpûaiç, l’hypostase du Verbe qui, sans éprouver de changement, s’est revêtue de l’humanité, uia cpûaiç too Aôyou aeaapxcoji.évr). Écoutons Sévère s’insurgeant contre saint Léon : « Trois fois, dans son tome, Léon a fait mention de l’union et nulle part il ne s’est servi de l’expression : <i union physique de la divinité et de l’humanité », ou de cette autre : union hypostatique, ou : « de deux choses une chose », ou : « de deux cpûaeiç une cpûaiç ou hypostase du Verbe incarné », ou : « le Fils, ou Dieu, ou le Verbe incarné », ou : « un seul Christ venant de deux cpûaeiç, selon les expressions employées par saint Cyrille. » Deuxième réponse à Sergius le Grammairien, c. 17. Cité par Lebon, op. cit., p. 288-289.

3. Les monophysites emploient aussi l’expression : èvcoaiç xotTà aûvGeaiv, ou cette autre : uia cpûaiç, [lia. ÛTcûaTaaiç aûvŒroç. ou simplement : aûv0eaiç. Traduire ces mots par : Union selon la composition, cpûaiç ou hypostase composée, composition, peut donner lieu à une méprise : on peut y découvrir l’idée de mélange ou de confusion des deux natures, alors que nos monophysites s’en servent justement pour écarter le mélange et la confusion. Ils veulent dire que de la divinité et de l’humanité réunies ensemble et mises comme côte à côte sans mélange ni confusion, résulte une unification, ëvcoaiç, qui se fait dans la personne du Verbe, j1x cpûaiç, subsistant dans les deux, u.îa cpûaiç aûvôeroç. Ils déclarent dans le même sens que le Christ est composé, ô Xpiarôç ctûvŒtoç èa-riv, sans cesser d’être un, eïç, parce qu’il subsiste à la fois, comme sujet concret et indépendant, dans la divinité et dans l’humanité. Ainsi l’expression : ëvwaiç xaxà aûvŒaiv revient à l’ëvtoaiç xaxà cpûaiv eï-rouv xa6’ûrcôaTocaiv.

4. Les monophysites disent : Le Christ, est, vient, résulte de deux cpûaeiç : ’O Xpiaxoç èx Sûo cpûaecov, mais ils refusent énergiqucment de dire avec les catholiques : Le Christ est. existe en deux cpûaeiç après l’union : ’O Xpiax6ç èv Sûo cpûaeai, toujours à cause du sens spécial qu’ils attribuent à cpûoiç. Comment peuvent-ils dire : Ix Sûo cpûaecov, attendu que la nature humaine ou l’humanité du Christ n’a jamais été une cpûaiç, c’est-à-dire un sujet indépendant, une personne ? Ils y arrivent par une pure fiction de l’esprit, xa-r’è7uvoiav, èv 0£wp[a : Ils se transportent par l’esprit au moment où la rencontre, la aûvoSoç de l’humanité et de la divinité va se faire, comme si, antérieurement à cette rencontre, l’humanité prise par le Verbe existait déjà d’une existence séparée et indépendante, était une vraie cpûaiç. Ce moment d’existence séparée antérieur à l’union est une pure fiction de l’esprit du théologien : il n’a, en fait, jamais été donné pour l’humanité du Christ. Mais l’esprit peut le créer de toute pièce pour se faire une représentation sensible de l’union : il voit alors le Verbe et l’homme allant comme à la rencontre l’un de l’autre : l’union, ou plutôt l’unification, ëvwaiç (opposée à la auvâcpeia nestorienne) se produit : La cpûaiç humaine a disparu : il ne reste plus que la cpûaiç éternelle du Verbe, niais qui <sl maintenant composée, en ce sens qu’elle subsiste dans In chair, c’est-à-dire dans l’humanité qui a été prise, qui est revêtue de la chair, aeaapx<i)|i.évY ;.

5. Par le même procédé, par la même fiction de l’esprit, le monophysite, consent à dire : Sûo cpûaeiç avant l’union. Sévère a même poussé la concession jusqu’à accepter : Sûo cpûaeiç [xsxà tt)v ëvwaiv, mais en corrigeant aussitôt la formule parl’addition : èvŒcopîa. Voir dans l’humanité prise par le Verbe après l’union une cpûaiç n’est qu’une abstraction d’un nouveau genre, consistant à revêtir cette humanité d’une qualité qu’elle n’a pas, c’est-à-dire de l’existence indépendante. On l’appellera donc cpûaiç seulement en théorie, c’est-à-dire par représentation fictive et imaginaire. De même que les chalcédoniens, par le procédé d’abstraction mentale, enlèvent à la divinité du Verbe son caractère réel et concret de ÛTCÔaraaiç pour la considérer en elle-même comme essence ou oûaîa ut sic, lorsqu’ils disent : « Le Christ est une seule hypostase en deux natures ; » de même les monophysites, par le procédé d’addition mentale, ajoutent à l’humanité, après l’union, une subsistence idéale qui la fait subsister devant les yeux de leur esprit, Iv Œwpta, comme une vraie cpûaiç : « Voir deux natures, dit Sévère, n’est permis que par l’imagination de l’esprit, qui prononce la différence [de l’humanité et de la divinité] comme en qualité naturelle : îSoû tô fxèv Sûo axorcsiv rf) cpavxaaîa toù voû (jlovov ècpîexai, Staxpîvovxoç ttjv Siacpopàv xrjv coç èv 7to16t7)ti cpuaixî). » Contra Joannem Grammaticum, P. G., t. lxxxvi, col. 908 A. J. Lebon a bien saisi ce procédé des théologiens monophysites, qui ne consentent jamais à donner au mot çûaiç un sens différent de celui de leur école, même lorsqu’ils acceptent de dire : Sûo cpûaeiç |i.exà xrjv ëvwaiv : « En contemplant la divinité et l’humanité, l’esprit peut faire abstraction de l’union qui les compose indissolublement en l’unité du sujet, nature, etc. Il les sépare, les divise, les écarte, l’une de l’autre, les imagine comme existant ainsi à part et d’une façon indépendante ; il retrouve de la sorte deux natures, deux hypostases. deux personnes dans le Christ, s’il s’arrête à ce premier stade d’une opération purement intellectuelle. La restriction èv 0ewpîa l’avertit suffisamment de limiter son affirmation dyophysite à l’ordre logique, dans lequel la dualité des natures (cpûaeiç) est contemplée. Mais voici qu’à l’intelligence ainsi occupée par la considération des éléments distincts qu’elle sépare dans le Christ, se présente la pensée de l’union (ëvwaiç) véritable qui s’est opérée entre eux et les a ramenés à l’unité d’existence individuelle. L’esprit perçoit la vertu de l’union (ëvcotnç) ; il remarque que le terme en est l’unité. Dès lors, ce qui lui apparaît, c’est l’unique nature de Dieu le Verbe incarné : toute dualité cède devant l’union, et l’idée même de deux natures, hypostases et personnes, pinfruit de l’imagination, s’évanouit. » Op. cit., p. 351.

Il s’en faut que tous les défenseurs du concile de Chalcédoine et les historiens du dogme aient ainsi compris les formules monophysites. Partant d’un faux principe, c’est-à-dire identifiant la çpûatç de la définition de Chalcédoine, la natura de saint Léon, avec la cpûatç des théologiens monophysites, la plupart n’ont pu voir en ces derniers que de véritables eutychiens. Pour d’autres, les formules : Sûo cpûcrstç avant l’union, une seule cpûaiç après ; le Christ est de deux cpûaeiç ou hypostases ; Sûo cpûaeiç après l’union ev Œcopia, ont été de véritables énigmes qu’ils ont déchiffrées de travers. A. llarnack va jusqu’à prêter à saint Cyrille d’Alexandrie, chez qui l’on rencontre déjà ces

formules, la théorie platonicienne de la préexistence

de l’humanité du Christ avant l’incarnation, hoç/mengeschichte, .".. « lit., Fribourg, 1894, t.n, p. 333. Domer, Entwicklungsgeschichte der Lettre von der l’erson Christi. 2e édit., t. iii, Stutgart, 1853, p. 7b sq. et Loofs, Leontlus von Byzaru und die gleichnamigen Schriftsteller der griechischen Kirchc, dans Texte und