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MŒHLER, ŒUVRES


incidents ; on peut parler de tous les grands faits de i l’époque, sans être conduit à nommer ce grand homme. » Goyau, Moehler, Paris, 1905, p. 9. Il naquit le 6 mai 1796, au village d’Igersheim, près de Mergentheim, en Wurtemberg ; suivit avec succès d’abord les classes du gymnase de Mergentheim (1809-1813), puis celles du lycée d’Ellwangen (1813-1815), enfin (18151818), les cours de la faculté de théologie d’Ellwangen qui fut transférée à Tubingue en 1817 et incorporée à l’université wurtembergeoise ; cf. Vermeil, Jean-Adam Môhler et l’école catholique de Tubingue, Paris, 1913, p. 24-25. Il y fut l’élève de Drey, Hirscher, Herbst, Feilmoser. Entré au séminaire de Rottenbourg le 1 er novembre 1818, il fut ordonné prêtre le 18 septembre suivant. Après un an de ministère pastoral comme vicaire à Weil et à Riedlingen, il fut nommé répétiteur à l’école normale de Tubingue, où il demeura deux ans, « presque uniquement occupé de la lecture des classiques anciens, surtout des philosophes et des historiens grecs. » Reithmayer, art. Môhler, dans le Dict. encyclopédique de la théol. calh. de Wetzer et Welte, trad. Goschler, Paris, 1870, p. 166.

Le 8 septembre 1822, Mœhler était nommé comme Privatdocent à la chaire d’histoire ecclésiastique de la faculté de théologie catholique de Tubingue. « Il fut décidé qu’avant son entrée en fonctions, il ferait un voyage d’études à travers les universités allemandes. L’itinéraire à suivre passait par Wurzbourg, Bamberg, Iéna, Leipzig, Halle, Gœttingue, Berlin, Breslau, Prague, Vienne, Landshut et Munich. :. De Tubingue à Berlin, Môhler verra aux prises toutes les tendances qui, vers 1820, étaient en conflit dans la théologie protestante. De Berlin à Tubingue, il constatera la décadence et aussi l’essor naissant des universités catholiques. De là son désir ardent de hausser la théologie de sa confession au niveau de la science protestante. Son attention se portera de préférence sur les historiens, sur Planck à Gœttingue et Neander à Berlin. » Vermeil, op. cit., p. 150. A Berlin, il fut aussi en relations suivies avec Marheineke et Schleiermacher ; cf. Strcehlin, art. Mœhler, dans V Encyclopédie des sciences religieuses de Lichtenberger, Paris, 1880, p. 258. < « Mon séjour à Berlin, dira plus tard Mœhler, doit être réputé le moment le plus décisif et le plus important de ma vie : ce qui, d’après les présomptions humaines, était de nature à détacher de la cause catholique mon esprit, indécis encore, devint précisément, entre les mains de Dieu, un moyen pour que le catholicisme se révélât à moi dans sa robuste et indestructible force, dans son éternelle élévation, dans sa dignité. » Cité par Goyau, p. 15. Ce moyeu providentiel, ce fut la théologie de Schleiermacher. « Schleiermacher, qui régnait à cette date sur l’Allemagne protestante, avait ramené la foi au Christ à être l’expérience de la communauté chrétienne. Neander… était l’élève de Schleiermacher ; il se faisait, à proprement parler, l’historien de cette expérience… Ce qui s’introduisait dans le protestantisme sous l’action de Schleiermacher, c’était cette affirmation que le faR religieux a un caractère social, et que la pensée chrétienne est une pensée sociale ; et c’est ainsi que l’on pouvait emprunter à ce protestantisme récent quelques arguments pour une théorie de l’Église. » Goyau, op. cit., p. 14-16. — De Berlin, Mœhler rapportait encore une méthode de travail qui allait permettre de renouveler la science catholique allemande, à savoir l’étude des sources. Goyau, p. 17-18.

Mœhler enseigna douze ans (1823-1835) à Tubingue, d’abord comme Privatdocent, puis comme professeur extraordinaire (16 mars 1826), enfin comme professeur ordinaire (1828). — Les attaques violentes dont il fut l’objet de la part des protestants après la publication de la Symbolique et des Nouvelles recherches, le

déterminèrent à quitter Tubingue ; cf. Vermeil, p. 448. Par décret du 30 avril 1835, le gouvernement bavarois le nomma professeur d’exégèse du Nouveau Testament à l’université de Munich ; cependant, au bout de quelque temps, il remplaça Dœllinger dans son cours d’histoire ecclésiastique ; cf. Reithmayer. op. cit., p. 168. Mais la maladie (choléra, grippe, phtisie pulmonaire) le força à interrompre ses cours durant l’année scolaire 1836-1837. Il les reprit le 18 janvier 1838, mais pour huit jours seulement. Nommé doyen du chapitre de la cathédrale de Wurzbourg le 22 mars, il mourait le 12 avril 1838, Jeudi saint, et était inhumé le samedi au cimetière de Munich, où, la veille de la fête des Trépassés 1842, un monument lui fut érigé ; une inscription qu’on y lit, lui décerne les titres de defensor fidei, litterarum decus, Ecclesise solamen. Cf. la notice biographique en tête du t. i de VHisl. de l’Église, par J. A. Mœhler, publiée par le R. P. Gams, trad. Bélet, Paris, 1868, p. i.xxix.

II. Œuvres. — On peut les diviser en trois groupes : Ouvrages de théologie ou de controverse, ouvrages d’histoire, de patrologie ou de droit canonique, et œuvres diverses.

1e Ouvrages de théologie ou de controverse. — 1. Die Einheit in der Kirche, oder das Princip des Katholicismus, dargestellt im Geist der Kirchenvûter der drei erslen Jahrhunderle, Tubingue, 1825. Il en existe une traduction « généralement suffisante » (Goyau, p. 6) ; signée de Ph. Bernard (Bruxelles, 1839), sous ce titre : De l’unité de l’Église, ou du principe du catholicisme d’après l’esprit des Pères des trois premiers siècles de l’Église. Dans un projet de préface, publié par Friedrich et traduit intégralement par M. Goyau, op. cit., p. 18-22, Mœhler indiquait comment il avait été amené, lui historien, à écrire ce livre de théologie : il avait entrepris de travailler à une partie de l’histoire de l’Église du Moyen Age, mais il manquait encore de « synthèse », d’ « idée supérieure susceptible de contenir et de pénétrer l’histoire » ; pourtant il ne pouvait se résigner « à ne trouver aucune liaison nécessaire avec l’époque précédente », il ne pouvait renoncer « à admettre un développement permanent ». Mais « si une nécessité intérieure me conduisait à présupposer la nécessité d’une liaison plus profonde dans l’ensemble de l’histoire, je devais savoir quel était le point d’attache des apparitions historiques postérieures ; si j’aimais mieux ne rien savoir de l’ensemble de l’histoire, que de ne pas croire à un développement interne permanent, il me fallait connaître le point de départ du développement, le germe solide et durable. » Goyau, p. 19. Texte capital pour comprendre dans quel esprit Mœhler aborde l’étude des Pères des trois premiers siècles : a priori, en vertu de sa formation romantique, cf. Vermeil, op. cit., p. 2-11, Mœhler croit à un développement interne permanent du christianisme à travers les siècles ; « à toute époque, depuis que le Christ fonda l’Église, le christianisme et l’Église furent toujours identiques, parce qu’il était, et est, et sera toujours le même ». Goyau, p. 20. Ainsi, en Mœhler, le théologien mystique va guider l’historien. L’ouvrage se divise en deux parties, comprenant chacune quatre chapitres ; première partie, unité de l’esprit de l’Église : l’unité mystique, l’unité intelligente, la pluralité sans unité, l’unité dans la pluralité : deuxième partie, unité du corps de l’Église : l’unité dans l’évêque, l’unité dans le métropolitain, l’unité de tout l’épiscopat, l’unité dans le primat. Qu’on ne peut aller au Christ que par l’Église, qu’on ne peut connaître le Christ que par l’Église, telle est la thèse fondamentale » du livre. Goyau, p. 16. « Mœhler, qui semblait faire l’apologie de l’Église au nom même de l’Esprit, survenait à propos pour rattacher à la vie collective de la vaste