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MINISTRE DES SACREMENTS, ORLIGATIONS


des incertitudes inextricables : car pourrait-on savoir si le ministre du sacrement est vraiment digne, et donc capable de le conférer’.' Et ù supposer même qu’il fût digne, que de problèmes se poseraient ! Le sacrement varierait de valeur suivant la plus ou moins haute valeur du ministre ; en réalité, chaque homme ayant sa valeur propre, il y aurait autant de sacrements que de ministres différents. Avec la doctrine qui affirme l’efficacité objective des sacrements, toute incertitude disparaît. Il n’est pas besoin, ainsi que le remarquaient saint Ambroise et saint Grégoire de Nazi an ze dont les textes ont été cités plus haut, de rechercher les ministres les plus distingués, les plus saints ou les plus élevés en dignité ; pourvu qu’ils aient les pouvoirs requis et accomplissent correctement ce qu’il doivent accomplir, le sacrement existe, toujours identique à lui-même. Saint Augustin souligne expressément la sagesse pratique de cette doctrine : Si />ro diversitate meritorum baplisma sancttim est, quia diversa sunt mérita, diversa crunt baptismala… Sunt alii aliis sanctiores, sunt alii aliis meliores. Quare ergo, si unus ab illo, verbi gratia juslo, sancto, baptizetur, alius ab alio injerioris meriti apud Deum, injerioris gradus, in/criuris continentiæ, injerioris vitse, iinum tamen et par et xquale est quod acceperunt, nisi quia hic est qui baptizat ? In Joan., tr. vi, 8, P. L., t. xxxv, col. 1428. Cette doctrine sur le rôle du ministre des sacrements n’a pas été officiellement et en termes exprès consacrée par l’Église. Mais elle est affirmée par tous les théologiens à la suite de saint Thomas ; elle est supposée par toutes les décisions concrètes qui affirment la validité objective du sacrement, quelles que soient les dispositions morales de celui qui le confère ; elle est la conséquence de la doctrine de l’efficacité des sacrements ex opère operato ; elle est, en somme, une partie intégrante de la théologie sacramentaire, et l’on ne peut la nier sans ébranler toute cette théologie elle-même. IV. Obligation de donner ou de refuser les sacrements. — Il semble superflu de reproduire tous les détails pratiques dans lesquels descendent les moralistes. Il suffira, après avoir rappelé les lois formelles de l’Église, d’énoncer les règles générales qui doivent dicter au ministre des sacrements sa conduite.

Obligation d’administrer les sacrements.

 1. Lois

de l’Église. — Parmi les devoirs du curé, le Code de droit canonique place celui « d’administrer les sacrements aux fidèles chaque fois qu’ils les demandent légitimement », can. 107, § 1. Ce devoir s’impose avec plus d’urgence quand il s’agit de malades, surtout de malades en danger de mort : les curés devront employer tous leurs soins à les réconforter par les sacrements, can 1(58. Car les laïcs ont le droit de recevoir du clergé les biens spirituels et surtout les secours nécessaires au salut, can. 682.

2. Enseignement des moralistes. Ces dispositions légales ont besoin d’être interprétées et complétées par l’enseignement des moralistes. Ils distinguent parmi les ministres des sacrements, ceux qui sont pasteurs et ceux qui ne le sont pas ; parmi les sacrements eux-mêmes, ceux qui sont nécessaires et ceux qui ne le sont pas.

Ces pasteurs, c’est-à-dire tous ceux qui ont charge d’âmes, contractent, par leur fonction même, une obligation de justice vis-à-vis de leurs ouailles. Ils ne st.n 1 placés à leur tête que pour leur donner ce dont elles ont besoin pour leur vie spirituelle, et en particulier les sacrements. Leur responsabilité est donc gravement engagée : non seulement ils ne doivent rien faire pour écarter les fidèles des sacrements, niais il

y a un minimum de zèle absolument obligatoire pour leur en l’aeiliier l’accès. Certaines sévérités qui découragent, certains relus Injustifiés, certaines nonchalances a se rendre à l’appel des aines, tout cela nuil

à l’intérêt spirituel des fidèles, tout cela est directement contraire au devoir d’état du pasteur : et parce qu’il s’agit d’intérêts graves et d’une obligation de justice, il est aisé d’arriver à une faute mortelle. Il faut remarquer cependant que le pasteur n’est pas tenu d’administrer par lui-même les sacrements : il peut se faire aider ou remplacer par un vicaire ou un autre prêtre. Ce qui importe, c’est que les fidèles puissent aisément recourir au ministère dont ils ont besoin. Le devoir du pasteur est d’autant plus impératif qu’il s’agit de sacrements plus nécessaires au salut. Ce n’est plus seulement son temps, ses efforts, ses fatigues qu’il doit donner sans compter : s’il lui faut sacrifier sa vie pour sauver une âme, il le fera sans hésiter, se souvenant de la parole du Maître : « Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis », Joa., x, 11 ; il est condamné à l’héroïsme, sous peine de manquer gravement à son devoir. Ces sacrements nécessaires sont avant tout le baptême et la pénitence. Une décision de la Cong. du Concile, en date des 12 et 26 octobre 157(3, faisait un devoir au curé d’administrer ces sacrements à ses paroissiens atteints par la peste, dût-il y contracter lui-même la maladie. Benoît XIV, De sgnodo diœcesana, t. XIII, c. xix. La plupart des théologiens en disent autant de l’extrêmeonction et du viatique. Benoît XIV, par une décision du Saint-Office du Il juillet 1751, demandait avec instance au vicaire apostolique d’Algérie, de procurer à ses administrés la saintecommunion et l’extrême-onction, malgré la peste qui régnait dans le pays. Évidemment ce texte ne formule pas une obligation précise : et l’on peut discuter sur le caractère de nécessité que revêtent ces deux sacrements pour les malades en danger de mort. Mais un pasteur éclairé sur le prix des âmes, conscient de sa propre responsabilité et craignant de scandaliser, comprendra l’avis que lui donne Lehmkuhl : « Une crainte excessive et une trop grande prudence du curé ou d’autres prêtres est vraiment à blâmer ; car les fidèles seront peu édifiés, ils seront plutôt scandalisés de voir le prêtre craindre à un tel point. Que le prêtre ait confiance en Dieu ; en prenant quelques précautions dictées par une sage prudence, il écartera suffisamment le danger. Saint Charles Borromée a donné un parfait exemple d’héroïsme dans la charité, quand pendant la peste de Milan, il allait voir les pestiférés dans les hôpitaux, non seulement pour leur donner les sacrements nécessaires, mais pour leur administrer la confirmation. » Theolog. moral., t. ii, n. 51.

Quant aux prêtres qui ne sont pas pasteurs, ils n’ont aucune obligations de justice vis-à-vis des fidèles, mais seulement une obligation de charité. Si cette obligation est grave, si elle doit imposer des sacrifices et aller même jusqu’à mépriser la mort, les théologiens le déterminent d’après les règles qui établissent l’ordre à suivre dans la charité.

2° Obligation de re/uscr les sacrements. — 1. Lois de l’Église. — I.e Code défend d’administrer les sacrements « aux hérétiques ou aux schismatiques, même s’ils sont dans l’erreur de bonne foi…, à moins qu’ils n’aient auparavant rétracté leur erreur et n’aient été réconciliés avec l’Église », can. 731, S 2. Pour ce qui regarde la communion, il distingue entre les fidèles qui sont publiquement indignes et ceux qui le sont en secret ; aux premiers, on refusera la communion à moins qu’en ne les sache corrigés et repentants, et qu’ils n’aient réparé le scandale ; aux autres, on la refusera également s’ils la demandent en secret, on l’accordera s’ils la demandent eu public et qu’on ne puisse les passer sans scandale, can. 855. I.e Rituel romain est plus explicite que le Code, mais eu somme les dispositions sont les mêmes, tit. iv, c. i. De sanctissimo eucharistise sacramento. — I.e ministre qui