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MINISTRE DES SACREMENTS, CONDITIONS A REMPLIR


7. Mariage. - — C’est encore un sacrement tout spécial, puisqu’il n’est autre chose que le contrat de mariage élevé, pour les chrétiens, à la dignité de sacrement. Les ministres du sacrement sont donc les ministres du contrat, c’est-à-dire les contractants. Voir art. Mabiage, t. ix, col. 2205 sq., 2255 sq.

Le ministre doit être différent du sujet.

Autrement

dit, on ne peut se conférer à soi-même un sacrement.

C’est ce que déclarait Innocent III, dans une lettre du 28 juin 1206, à Bertold, évêque de Metz, qui l’avait questionné à propos d’un cas assez curieux : un juif, en danger de mort et n’ayant près de lui personne pour lui donner le baptême, s’était plongé dans l’eau en disant : « Je me baptise, au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il. » Le pape déclare invalide un pareil baptême, car, dit-il, « il faut que celui qui baptise soit distinct de celui qui est baptisé : cela ressort évidemment des paroles du Seigneur disant à ses apôtres : Allez, baptisez toutes les nations. Le juif dont il s’agit doit donc être à nouveau baptisé, mais par un autre, pour bien montrer que autre est celui qui baptise, autre celui qui est baptisé. » Epist.. eux, P. L., t. ccxv, col. 986, Denz-B., n. 413.

Cette réponse ne concerne directement que le baptême ; mais elle s’applique a fortiori aux autres sacrements qui sont moins nécessaires. Pour eux, comme pour le baptême, la forme requise pour la validité oppose nettement ministre et sujet : ego te absoluo, etc. Il faut excepter naturellement la distribution de la communion : en cas d’absolue urgence, un laïc pourrai l se communier lui-même, et c’est la règle pour le prêtre qui célèbre la messe. Cf. Conc. Trident., sess. xiii, can. 10, Denz-B., n. 892.

II. Conditions que doit remplir le ministre

    1. DANS L’ADMINISTRATION D’UN SACREMENT##


DANS L’ADMINISTRATION D’UN SACREMENT. En plus

des conditions que nous venons d’énumérer et qui concernent sa personne même, il en est d’autres que le ministre doit réaliser en administrant le sacrement, faute desquelles le sacrement serait ou invalide ou illicite.

Plusieurs ont déjà été énumérées et il n’y a pas lieu de les exposer avec plus de développements.

Il faut, avant tout, que le ministre donne le sacrement tel qu’il a été institué par Jésus-Christ, sans en altérer la matière ou la forme. Il n’est pas le maître du sacrement, mais seulement son ministre. Une altération cjui atteindrait l’essence du sacrement rendrait celui-ci inexistant. Une altération accidentelle volontaire serait une faute plus ou moins grave, selon son importance.

Il faut, de plus, qu’il accomplisse intégralement et correctement les rites, cérémonies et prières dont l’Eglise a’voulu entourer le sacrement. Ministre de l’Église, il doit être fidèle à observer ses prescriptions et se garder de toute précipitation ou négligence qui les lui ferait omettre, comme de tout arbitraire qui les lui ferait modifier. D’où une certaine attention est requise. Voir Attention, t. i, col. 2219.

C’est surtout l’intention de faire ee que fait l’Église qu’il doit avoir sous peine de ne pas donner un sacrement valide. Voir Intention, t. vii, col. 2271 sq. C’est, d’après les conciles, une condition absolue de validité, et même la seule, avec l’emploi de la matière et de la [orme. Il suffli de rappeler les expressions du concile de Florence : Omnia sacramentel tribus perficiuntur videlicel rébus tanquum maleria, verbis tamquam forma et persona ministri confleientis sacramentum cum intentione faciendi quod facit Ecclesia ; quorum si aliquld deest, non perfleilw sacramentum. Decr. pro Armenis, Denz.-B., n. 695. Le concile de Trente a également condamné comme hérétique quiconque soutiendrait : tn ministris, dum sacramentum conflciunt et conférant, non requirl tntentionem sallem faciendi quod facit

Ecclesia. Sess. vii, De sacr. in génère, can. 11, Denz.-B., n. 854.

Deux questions seulement restent à traiter. Faut-il que le ministre ait la foi ? faut-il qu’il soit en état de grâce ?

La foi.

La question de la foi chez le ministre

des sacrements fut soulevée dès le début du iiie siècle. Avec saint Cyprien, elle revêtit une gravité exceptionnelle et faillit séparer de l’Église de Rome les Églises d’Afrique et certaines Églises d’Orient, qui ne voulaient reconnaître aucune valeur au baptême reçu dans l’hérésie. Ce furent ensuite les donatistes qui, à leur tour, niaient l’efficacité du baptême reçu dans l’Église catholique. Ce furent, postérieurement à ces grands courants, d’infinies variations de discipline, indice d’incertitudes doctrinales, qui faisaient réitérer les sacrements des hérétiques ou de ceux que l’on voulait bien leur assimiler. L’histoire de ces doutes, de ces discussions et de ces pratiques, quelquefois incohérentes, a été retracée à propos du baptême, voir Baptême des hérétiques, t. ii, col. 219 sq., et à propos de la confirmation, voir Confirmation chez les pères, t. iii, col. 1049 sq. L’étude plus détaillée et plus complète en a été faite, après dom Chardon, Histoire des sacrements, dans Theolog. cursus complet. de Migne, t. xx, col. 118 sq., 183 sq. 6^882 sq., par Saltet qui, à propos des réordinations, étudie très doctement toutes les réitérations des sacrements donnés par des ministres hérétiques ou indignes. Les réordinations, étude sur le sacrement de l’ordre, Paris, 1907. Il ne semble pas utile de recommencer ce travail, mais plutôt de mettre en lumière les affirmations de la vraie doctrine auxquelles ces divers faits ont donné occasion.

En face de saint Cyprien et des conciles de Carthage qui soutenaient la nécessité de rebaptiser les hérétiques, le pape saint Etienne dresse la doctrine et la pratique de l’Église romaine. De ses déclarations il n’est resté que des fragments très courts, conservés dans les écrits de Cyprien ou de Firmilien de Césarée qui les réfutaient : on peut cependant reconstituer suffisamment la pensée du pape. Il veut avant tout qu’on s’en tienne à la tradition et qu’on ne rebaptise pas les hérétiques qui se convertissent, mais seulement qu’on leur impose les mains pour la pénitence. S, Cyprien, Epist. lxxiv, 1, éd. Hartcl, p. 799 Denz.-B. , n. 46. Cette décision, le pape la fonde sur la valeur du baptême en lui-même, indépendamment de la valeur personnelle de celui qui le confère : « Il ne faut pas considérer celui qui baptise ; le baptisé peut obtenir la grâce par l’invocation de la Trinité, des noms du Père et du Fils et du Saint-Esprit. » Firmilian. epist. ad Cypr. contra epistolam Slephani = Cypr. epist., lxxv, 9, Ffartel, p. 815. La grâce du Christ et sa sainteté sont capables de conquérir les âmes, même en dehors de l’Église, ibid., 12, p. 818, et « quelque soit celui qui est baptisé, où qu’il le soit, pourvu qu’il le soit au nom du Christ, il reçoit de suite la grâce du Christ ». Ibid., 18, p. 822. Cf. Epist., lxxiv, 5, p. 803.

Le concile d’Arles, en 314, revient sur la même question, soit à propos des rebaptisants d’Afrique, soit peut-être à propos des donatistes, et semble la trancher définitivement par son canon 8 ainsi conçu : De Afris, quod propria lege sua utuntur ut rebaptizent, placuil ut, si aliquis de hicresi venerit, interrogent cum sijmbolum, et si perviderint cum in Pâtre et Filio et Spiritu Sancto esse baptizalum, manus ci tdntum imponatur ut accipial Spiritum Sanctum. Quod si inlcrrogalus non responderil liane Trinitatem, baptizetur..Mansi, Concil., 1. 1. col. 472 ; Hefelc-Leclercq, Histoire des conciles, 1. 1, p. 285.

Les donatistes refusèrent, pendant longtemps, de