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MIGNE, L’ÉDITEUR

Bibliographie de la Presse périodique française, Paris, 1866, p. 533 ; Vapereau, Dictionnaire universel des contemporains, Paris, 1880, p. 1290.

2o L’éditeur. — Migne abandonna la direction de l’Univers religieux pour se jeter dans une entreprise beaucoup plus considérable. Son but était de rassembler dans de grandes collections tous les trésors de la tradition catholique. Aussi ne devra-t-on pas chercher dans ces publications des œuvres nouvelles, des travaux originaux : on ne les trouvera qu’en nombre restreint. « Avec son esprit pratique et simplificateur et l’ignorance un peu naïve des débutants, il concevait toute science sous forme de dictionnaire ou d’encyclopédie. » D. Cabrol, Hist. du card. Pitra, p. 109. Il se contentera de rassembler les anciens produits de l’érudition ecclésiastique, pour mettre facilement à la disposition du clergé des instruments de travail. De ces travaux anciens, quelques-uns étaient restés à l’état de manuscrits, d’autres connus par de simples fragments, la plupart, enfouis au fond des bibliothèques, étaient inabordables par leur rareté et leur prix élevé. Migne veut les réunir en une immense Bibliothèque universelle du clergé, ou Cours complet sur chaque branche de la science ecclésiastique, devant comprendre deux mille volumes, d’un format commode et uniforme, petit in-4o sur deux colonnes, et d’un prix modeste, l’ensemble de la collection ne devant coûter que dix mille francs, ou seulement sept mille six cents francs, pour ceux qui verseraient intégralement le prix des collections, dès la réception des premiers volumes qui en font partie.

Comment réaliser un tel tour de force ? Le peu de ressources dont disposait Migne avait été englouti dans l’Univers religieux. Il sut intéresser à son entreprise un certain nombre d’ecclésiastiques et de laïques qui lui fournirent les premiers fonds nécessaires. Il fit d’abord appel à l’imprimerie de M. Bailly, place de la Sorbonne ; mais bientôt il fondera au Petit-Montrouge, près des barrières d’Enfer et du Maine, le plus bel établissement d’imprimerie et de librairie qui existât alors. On trouvait dans ses Ateliers catholiques à côté des salles de composition, cinq presses à vapeur, une fonderie, une stéréotypie, des ateliers de satinage, de brochage, de reliure, uniquement destinés aux ouvrages qu’il publiait. Réunissant ainsi entre ses mains toutes les branches de la librairie, il pouvait arriver à une production extrêmement rapide, jusqu’à faire sortir de ses presses un volume par semaine, et surtout diminuer les frais d’édition, baisser considérablement le prix des volumes. Trois cents ouvriers étaient attachés à l’établissement du Petit-Montrouge. Parmi eux se trouvaient un certain nombre de prêtres malheureux, que l’éditeur accueillit dans son imprimerie et qui lui furent d’un grand secours pour la composition et la correction des épreuves.

Migne voulait que, au point de vue typographique, ses publications fassent aussi parfaites que possible. A ses presses mécaniques, il substitua bientôt des presses à bras, moins rapides, mais procurant de meilleurs résultats. Des soins tout particuliers furent apportés à la correction des épreuves, au point que les dépenses ainsi occasionnées égalaient celles exigées par la composition. Les corrections étaient revues successivement sur cinq épreuves. Ainsi corrigées et révisées, les feuilles étaient livrées au clicheur, transformées en pages de métal qui les rendaient immuables. Une dernière feuille, tirée sur le cliché, était encore revue. Toutes les grands collections furent ainsi stéréotypées afin d’éviter de nouvelles fautes dans les réimpressions, Enfin, en 1865, il engagea quarante correcteurs, pour dix ans, à des conditions très onéreuses, pour la révision minutieuse des planches stéréotypées. De pareilles précautions devaient aboutir à un travail soigné.

Des deux mille volume annoncés, plus de mille ont été publiés. Il est difficile de suivre exactement l’ordre chronologique, dans l’examen de ces publications ; plusieurs collections parurent d’ailleurs simultanément. Nous grouperons donc l’ensemble de ces œuvres sous trois titres : 1o les principales collections, (sauf les patrologies) ; 2o les patrologies ; 3o les œuvres diverses ; 4o interruption des publications, leur continuation après la mort de Migne.

I. Les principales collections. — a) De 1838 à 1840 parut le Cours complet d’Écriture sainte : Scripturæ sacræ cursus completus, ex commentariis omnium perfectissimis ubique habitis, et a magna parte episcoporum necnon theologorum Europæ catholicæ universim ad hoc interrogatorum designatis, unice conflatus ; plurimis annotantibus presbyteris ad docendos levitas, pascendosve populos alte positis, annotavit vero simul et edidit J. P. M., 25 vol. in-4o. Ces commentaires et traités sont ceux des jésuites J. Bonfrère, Corneille de Lapierre, du dominicain Noël Alexandre, du bénédictin dmn Calmet, des abbés de Vence et Glaire, de Fr. Vatable et de Le Maistre de Sacy, illustrés de notes et de dissertations empruntées non seulement aux commentateurs catholiques, mais aux meilleurs auteurs juifs, luthériens, calvinistes, anglicans, etc… Trois volumes de compléments furent ajoutés à la collection ; le dernier renferme seize Indices et un Atlas géographique et iconographique du Cours complet d’Écriture sainte, in-fol. de 76 planches.

b) Immédiatement après le cours complet d’Écriture sainte, était publié le Theologiæ cursus completus… sous un titre identique à celui du Cursus Scripturæ sacræ, en 25 vol. in-4o. Ainsi que l’énonce le titre, la méthode suivie fut la même que pour le Cours d’Écriture sainte. Les ouvrages sont donnés dans le texte latin ou la traduction française, dans un ordre méthodique, sans aucune préoccupation chronologique. A part le De præcriptionibus de Tertullien et le Commonitorium de saint Vincent de Lérins, tous les traités de théologie reproduits dans cette collection datent du xvie au xixe siècle, avec quelques parties composées par les éditeurs. Le nombre des volumes qui devait être de vingt-cinq fut porté à vingt-huit. Le dernier comprend cinq tables, très utiles pour la consultation du Cours de théologie : 1o une indication méthodique de toutes les matières traitées ; 2o la nomenclature des auteurs par ordre de tomaison ; 3o la liste alphabétique des auteurs et titres des ouvrages ; 4o une table combinée et statistique curieuse des noms, professions, pays et mort des 238 auteurs qui sont contenus dans les deux cours d’Écriture sainte et de théologie ; 5o une table universelle analytique donnant, sous chaque mot essentiel, une analyse complète de la matière qu’il contient. Les deux cours d’Écriture sainte et de théologie ont conservé leur valeur ; il faut évidemment faire un choix parmi ces commentaires et ces traités, dont plusieurs sont excellents, d’autres de valeur moindre. Il est certainement très commode, pour l’exégète et pour le théologien, de trouver réunis les principaux auteurs qui ont traité telle question biblique ou théologique.

c) On peut en dire autant des Démonstrations évangéliques des plus célèbres défenseurs du christianisme, traduites pour la plupart des diverses langues dans lesquelles elles avaient été écrites, reproduites intégralement, non par extraits, annotées et publiées par l’abbé Migne, 18 vol. in-4o. plus un volume d’introduction et un de conclusion. Les seize premiers volumes parurent en 1842 et 1843 ; les quatre autres, quelques années plus tard. Le but de l’éditeur était de réunir ce qu’il y avait de plus convaincant et de plus important pour la défense de notre foi, ce qui permettait de suivre pas à pas les différentes phases de la polémique catho-