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MÉTHODISME — MÉTROPHANE CRITOPOULOS

Wesley redoutait pour son œuvre le danger de la richesse. Il disait : « La pratique de la religion suppose nécessairement l’activité et la frugalité ; celles-ci ne peuvent que produire la richesse. Or, quand la richesse augmente, elle s’accompagne d’orgueil, de colère et d’amour du monde sous toutes ses formes. »

Les méthodistes actuels ne fréquentent plus les Églises anglicanes, ils reçoivent les sacrements de leurs propres ministres dans leurs chapelles.

Ils ne se recrutent plus parmi les ouvriers, mais comptent beaucoup de personnes enrichies dans le commerce et l’industrie. On assure que les Rolls Royce vont de préférence aux églises wesleyennes. La propagande dans le peuple s’est continuée par l’Armée du salut du général Booth, ancien ministre de la Methodist new connexion.

Le méthodisme avait joué au début en Angleterre un rôle analogue à celui que tint un peu plus tôt le piétisme en Angleterre et sur le continent. Il prêchait le sentiment du péché et l’assurance de la justification hic et nunc. Le passage d’un état à l’autre se faisait en un instant de crise par la conversion ou new birth. La justification par la foi qu’il prêchait était plus proche de la doctrine du concile de Trente que le solifidéisme furieux de Luther, comme il disait avec dédain. Par ailleurs son arminianisme le plaçait aux antipodes de la prédestination genevoise.

Wesley mort, la séparation avec l’Église anglicane se consomme, les doctrines évoluent et le plus grand nombre se rallie à la conception de l’expérience religieuse mise en honneur par des théoriciens, tels que Schleiermacher, le père du protestantisme libéral, et William James, le prophète du pragmatisme religieux. On sait que Schleiermacher croit avoir découvert un sens religieux, intermédiaire entre la raison et le cœur ; ce sens a pour objet l’infini répandu dans l’univers et prenant conscience en chacun de nous. William James lui a imprimé un caractère de pragmatisme utilitariste. Ou est loin de l’orthodoxie désirée par Wesley.

Ce grand homme qu’on a comparé à saint Benoît pour sa piété liturgique, à saint Dominique pour son zèle apostolique, à saint François d’Assise pour son amour du Christ et son détachement, à saint Ignace de Loyola pour son génie organisateur, à saint Alphonse de Liguori, son contemporain, pour son appel terrorisant aux jugements de Dieu, a déclenché un élan bienfaisant de ferveur, non seulement chez ses disciples, mais aussi par émulation, chez les anglicans, les congrégationalistes, les baptistes, qui lui doivent un regain de vie spirituelle. Les méthodistes ont bien mérité, en appuyant les œuvres sociales et philanthropiques, écoles dominicales, anti-esclavagisme, réforme des prisons, anti-alcoolisme. Dans la liturgie, ils ont fait une large place aux cantiques qui nourrissent la piété. Ils ont donné une vigoureux élan aux missions chez les infidèles.

Il faut constater néanmoins que le vice intrinsèque du protestantisme a fait dévier le mouvement en amenant le glissement dans la doctrine, la multiplication des sectes, et qu’une réaction organisée pour réveiller la ferveur chez les anglicans endormis, a tourné insensiblement à une lutte acharnée contre les chrétiens fidèles aux traditions romaines.

M. Lelièvre, Vie de John Wesley, Paris, 1868 ; Augustin Léger, La jeunesse de John Wesley, Paris, 1910 ; W. Baum, Der Methodismus, Zurich, 1828 ; L. S. Jacoby, Geschichte des Methodismus, Brême, 1870 ; Fr. Loofs, art. Methodismus, de la Protest. Realencyclopädie ; Maximin Piette, La réaction wesléyenne dans L’évolution protestante. Étude d’histoire religieuse, Bruxelles, 1925, et Paris, 1927.

R. Hedde.

1. MÉTROPHANE CRITOPOULOS, patriarche d’Alexandrie (xviie siècle). I. Vie. II. Ouvrages. III. Doctrine

{{refa|1|I. Vie. — Il naquit à Berrhée (Βερροία, Verria) en Macédoine en 1589. A l’âge de douze ans, il fut nommé par le métropolite de cette ville πρωτοαποστολάριος, c’est-à-dire premier lecteur de l’épître. Il choisit jeune homme l’état monastique et se rendit au mont Athos. C’est là sans doute que le rencontra Cyrille Lucar, alors patriarche d’Alexandrie, et qu’il se l’attacha. Invité par Georges Abbot, archevêque de Cantorbéry, à envoyer un jeune grec intelligent en Angleterre pour y étudier, Cyrille fit choix de notre Métrophane, alors prêtre. Celui-ci arriva à Londres au milieu de 1617, et dès la rentrée scolaire de cette même année, commençait à Oxford un cycle d’études qui devait durer plusieurs années. En mars 1624, nous le trouvons encore en Angleterre. Il ne tarda pas à quitter ce pays pour l’Allemagne. Il y visita un grand nombre de villes, Hambourg, Brême, Helmstadt, où il passa l’année scolaire 1624-1625, et où il rédigea sa Confession de l’Église orientale (voir plus loin), Magdebourg, Halle, Wittenberg, Berlin, Leipzig, Cobourg, Weimar, Iéna, Frieienwalde, Altdorff, Nuremberg, Sultzbach, Augsbourg, Ulm, Stuttgart, Tubingue et Strasbourg. Après quoi il passa en Suisse. Bâle et Berne le virent tour à tour. Les Bernois lui facilitèrent les moyens d’aller à Genève et lui remirent une lettre de recommandation auprès des chefs religieux de cette ville. Le 6 octobre 1627, Métrophane fut reçu par la Compagnie des pasteurs, et procès-verbal fut dressé de l’audience. Ce document, conservé dans les Archives du consistoire de cette ville, et reproduit par Legrand, Bibliographie hellénique du xviie siècle, t. v, p. 203-206, nous apprend que Métrophane déclarait être venu dans le but de rechercher et désirer « quelque moyen d’union des Églises grecques et orientales avec les Églises d’Europe et occidentales », et se disait mandaté pour cela par « Cyrillus, patriarche ci-devant d’Alexandrie et à présent de Constantinople ». Il affirmait avoir visité, sur son ordre, les Églises et académies d’Allemagne et même souscrit, à Bâle, à une grande partie des articles de leur Confession de foi. On lui demanda des preuves qu’il avait cette mission ; il ne put les fournir ou elles parurent insuffisantes. Sur quoi, la Compagnie « lui a fait entendre que, puisqu’il n’avait commission ni mandement exprès du patriarche de s’employer à ce louable dessein, ains seulement de voir et d’apprendre ce qui est de la doctrine enseignée en nos églises, joint que ce dessein, estait général à toutes, la Comp. ne pouvait autre que louer ledit dessein et désirer que Dieu donnast le moyen de l’exécuter. »

Deux jours après, Métrophane fut admis à une audience du Conseil. La relation, conservée à l’Hôtel de ville de Genève, et reproduite par Legrand, op. cit., p. 207-208, nous le montre s’engageant plus avant dans les tentatives d’union. « Et a ledit Mytrofanes proposé trois poincts. Le premier si la parole de Dieu est pas celle qui doit décider toutes les controverses ; 2° si, quand il y a quelque passage obscur dans l’Escripture qui ne se peut expliquer par l’Escripture même, on ne peut pas recourir aux Pères. Le 3° si, au faict du rite et cérémonies, on pouvait pas (sic) se dispenser en quelque façon, moyennant qu’il n’y eust rien qui fust contraire à la parole de Dieu et à l’édification de l’Église. » La réponse du Conseil fut plutôt réservée : « Là-dessus leur Compagnie ne peut faire autre chose sinon tesmoigner un désir d’establir quelque bonne union, mais que ceste Eglise estant seule et séparée, elle ne peut rien faire, mais faut qu’il y ait consentement universel tant des Eglises de Suisse, Allemagne, Pays-Bas, Angleterre que autres.