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MESSIANISME, LES DERNIERS LIVRES CANONIQUES


logique. Le poète exprime d’abord l’espoir ferme que Jahvé qui trône éternellement se lèvera un jour pour délivrer les Israélites et restaurer Sion, 13. Il ose même dire qu’il est temps de leur faire miséricorde « l’heure en est venue », 14. « Oui, Jahvé rebâtira Sion, il y apparaîtra dans sa majesté », 17. « Alors les nations craindront le nom de Jahvé et tous les rois de la terre ta gloire », 16. Tous les peuples se rassembleront, ainsi que les royaumes, pour servir Jahvé, 23. Le psalmiste regarde donc, comme Aggée et Zacharie, la reconstruction du temple et de la ville sainte comme le prélude de l’ère messianique. Il relève expressément que, même si le salut ne se réalise pas tout de suite, il sera la part de la génération future pour laquelle il fixe par écrit sa prophétie, 19-22.

Dans le ps. cxlix, le poète contemple l’avenir d’Israël non seulement avec le plus grand optimisme, mais avec un enthousiasme exalté. II invite ses coreligionnaires à glorifier Jahvé par un cantique nouveau, à le louer en dansant, à le célébrer avec le tambourin et la harpe : « car Jahvé aime son peuple, il donne aux humbles le triomphe pour parure », 4. Cette joie exubérante est sans doute causée par une victoire remportée sur les ennemis. Par suite du succès, les Israélites

6. ont à la bouche les louanges de Dieu

et à leur main un glaive à deux tranchants,

7. Pour tirer vengeance des nations

et châtier les peuples.

8. Pour lier leurs roi avec des chaînes

et leurs princes avec des entraves de fer, [écrit.

9. Pour exécuter à leur égard le jugement tel qu’il est Telle est la gloire réservée à tous ses serviteurs.

D’après ces paroles les Israélites sont appelés à être les instruments de la justice divine, les ministres de Jahvé dans l’établissement de son règne sur les nations. Par là le psalmiste ne veut pas faire de prédiction, il veut au contraire constater que les anciens oracles que les prophètes ont autrefois publiés et fixés par écrit sont en train de se réaliser.

Le psaume respire donc un véritable enthousiasme messianique. D’après la plupart des exégètes celui-ci aurait été causé par les victoires éclatantes du temps des Machabées. Mais, en face de cette fixation exacte de la date du psaume, Gunkel invite avec raison à la réserve. On pourrait seulement dire que le chant a été composé durant la domination étrangère, et qu’il est postérieur aux oracles des prophètes.

La prière qui se lit ps. cxxvi, 4-6, est parallèle à celle du psaume lxxxiv, 10-14. Après avoir décrit aux versets 1-3 la joie qui animait les Israélites lors du retour de Babylone, le poète fait allusion à la situation pauvre et triste dans laquelle les rapatriés se trouvaient durant les premières années. Il supplie le Très-Haut d’accorder bientôt à son peuple la complète restauration. Il est tellement convaincu que Dieu ne tardera pas à la réaliser qu’il compare ses contemporains à des laboureurs qui, après avoir semé pleins d’inquiétude, récoltent avec joie.

Duhm rapporte le psaume tout entier à la restauration messianique de l’avenir. D’après lui, il serait le plus beau de tous les psaumes, et contiendrait l’expression la plus touchante et la plus tendre de l’espérance eschatologique. A son exemple, Lagrange, Bertholet, Pérennès, Gunkel appliquent non seulement les versets 4-6, mais aussi les trois premiers versets au rétablissement à venir. Cette exégèse de 1-3 ne nous semble pas justifiée ; car déjà le parallélisme avec le psaume lxxxiv, où il est d’abord quesion de la restauration préalable et ensuite seulement de la restauration définitive, recommande l’explication reçue ; en outre le verbe défini du premier

DICT. DE THÉOL. CATHOL.

verset est un parfait et rien dans le contexte n’invite à le prendre pour un parfait prophétique.

4° Très peu nombreux sont les psaumes postexiliens où l’on a voulu, à notre avis sans raison, trouver des idées messianiques.

L’explication messianique que proposent de ps. cxliii, 12-15, Stærk, Kittel, Bæthgen, est rejetée par Gunkel ; à juste titre, nous semble-t-il, car il s’agit d’une description du bonheur matériel présent des Israélites.

Quant au ps. cxlviii, 14, qui fait sans doute allusion au rétablissement d’Israël après l’exil, il n’y a pas de raison péremptoire de considérer ce mot comme une allusion au bonheur messianique à venir. Contre Kittel, cf. Lagrange, loc. cit., p. 201.

XI. TOBIE, JUDITH, LE / or LIVRE DES MACHABÉES,

L’ecclésiastique. — En dehors des prophètes postexiliens, les idées messianiques se rencontrent non seulement dans les psaumes, mais aussi dans les écrits historiques et didactiques du judaïsme.

Dans le Livre de Tobie, au cantique que le vieux père entonne après la disparition de l’archange Raphaël, xin, Il sq., la future gloire de Jérusalem est décrite avec enthousiasme : La ville qui est maintenant châtiée par Dieu sera un jour reconstruite avec magnificence. « Les portes seront bâties de saphirs et d’émeraudes, toute l’enceinte de ses murs de pierres précieuses, toutes ses places publiques seront pavées de pierres blanches et pures. » Elle retentira de chants d’allégresse ; car les captifs et les dispersés y reviendront et les peuples y arriveront pour apporter des présents et pour adorer le Seigneur. — Avant de mourir le vieillard annonce à son fils et à ses petits-fils la destruction de Ninive et la restauration d’Israël : « Toute la terre déserte d’Israël sera repeuplée, et la maison de Dieu, qui y a été brûlée, sera rebâtie de nouveau ; et là reviendront tous ceux qui craignent Dieu et les nations abandonneront leurs idoles, elles viendront à Jérusalem et elles y habiteront, et tous les rois de la terre se réjouiront en elle, adorant le roi d’Israël », xiv, 7-9.

Judith dans son cantique d’action de grâces crie malheur aux peuples qui s’élèvent contre Israël : « Le Seigneur tout-puissant se vengera d’eux et les visitera au jour du jugement. Il mettra du feu et des vers dans leur chair afin qu’ils brûlent et hurlent éternellement », xvi, 20-21.

Au 7° livre des Machabées, Mathathias dans ses paroles d’adieu mentionne la promesse faite à David que son trône existera toujours, ii, 57.

L’Ecclésiastique professe à trois reprises l’espérance messianique. D’abord dans la prière du c. xxxvi qu’il adresse à Dieu pour qu’il sauve son peuple de sa situation misérable : il supplie le Très-Haut de se manifester bientôt, de renouveler les grands miracles d’autrefois, de détruire les ennemis qui maltraitent Israël, de remplir Sion de sa divine majesté et le temple de sa gloire, et de montrer ainsi à tous les habitants de la terre qu’il est le Dieu éternel, 6-22. Ensuite dans l’éloge des saints d’autrefois : après avoir parlé du malheur dont Israël fut accablé après la mort de Salomon, Jésus Sirach se basant sur II Reg., vii, 15 sq., III Reg., xi, 39 et Is., xi, 1, exprime la conviction que Jahvé n’extirpera pas entièrement son élu, mais qu’ « il laissera à Jacob un reste et à David un germe », xlv, 22. Finalement, lors de la mention d’ÉIie, le Siracide répète ce que le prophète Malachie avait annoncé à son sujet : « Il est destiné pour un temps déterminé afin d’adoucir la colère de Dieu et d’unir le cœur des pères et des fils, et de rétablir les tribus d’Israël », xlviii, 10. La pensée de l’époque où tout cela se réalisera le fait tressaillir de joie et il s’écrie : « Heureux celui qui te [Élie] verra et

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