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MESSE DANS L'ÉGLISE LATINE, DUNS SCOT


est, quando eucharistia servatur in pyxide et lamen non hanc mquivalel Ecclesia, sicut quando ofjertur in missa, et sive hoc indistincte dicatur oblatio eucharistia, sive sit consecratio, sive perceptio, sive oblatio, vel operalio aliqua sacerdotis in persona Ecclesiæ. Ultra ergo bomim contention in eucharistia, requiritur oblatio eucharistie. Quodl., xx, n. 21, t.xii, p. 529.

D’après Duns Scot, l’oblatio særamenti se distingue des autres prières de la messe : elle suppose dans son intégrité la double consécration ; elle est « l’immolation » du corps et du sang du Christ dont la communion nous fait participants. 7/i 7Vum sent., dist. XIII, q. il. t. vin. p. 810. Tenendum est ut quotiescumque sacerdos corpus et sanguinem immolai, loties perceptioni corporis et sanguinis participent se præbeat. Dist. VIII, q. iii, t. viii, p. 460.

b. L’oblation sacrificielle de l’autel implique la représentation objective du sacri/ice de la croix. Identique à ce sacrifice à raison de la victime offerte toujours la même, elle s’en distingue toutefois à un double titre comme une représentation réelle se distingue de la chose représentée, comme une prière se différencie du motif puissant invoqué pour la faire aboutir : Fil missa tam reprœsenlando illam oblationem in cruce quam per eam obsecrando, ut scilicel per eam Deus acceptel sacrificium Ecclesiæ. Obsecratio autem communiter fit per aliquid magis acception ei qui rogatur, quam sit sibi supplicatio obsecrantis. Quodl., xx, n. 22, t.xii, p. 529.

Sans doute y a-t-il aussi d’autres rites qui évoquent la passion, mais, à la différence de ces rites, la messe contient une commémoraison plus spéciale de l’oblation offerte par le Christ sur la croix. En effet, la victime offerte à l’autel est celle du Calvaire. Ce n’est point cependant le Christ qui offre immédiatement le sacrifice de la messe ; il ne s’est offert de cette façon qu’une fois : Elsi hic ofjeratur, non lamen hic immédiate offert sacrificium juxla illud, Hebr., ix, « neque ut seepe offerat semetipsum », et ibidem : Christus semel oblatus est », supple a seipso afférente, alioquin videretur quod unius missæ celebratio itquivalerel passioni Christi, si idem esset offerens immédiate et oblatus. Ibidem.

Le Christ reste toutefois le prêtre principal de la messe, Quodl., xx, n. 2, p. 515, car s’il n’y concourt point immédiatement, il l’offre en quelque façon en ce sens qu’il la fait offrir : Eslo quod acceptaretur ratione voluntatis Christi ut offerentis hoc est inslituenlis oblationem, et dantis sibi valorem et aeceptalionem, lamen non sequivalerel, nec acceptaretur ut passio. Ibid.

Le prêtre immédiat de l’oblation eucharistique, la volonté qui offre actuellement la victime sacrée et la rend particulièrement digne d'être acceptée, c’est la volonté de l'Église, au nom et dans la dépendance de qui le sacrifice est offert : Missa non solum valet virtute meriti personalis sacerdotis offerentis, sed etiam virtute meriti generalis Ecclesige in cujus persona per ministrum communem ofjertur sacrificium. Quodl., xx, n. 1, p. 515.

c. En quoi consiste à la messe cette représentation objective de l’oblation du Calvaire ? Scot ne le dit pas clairement. A lire ces mots du commentaire des Sentences, en dehors du contexte général de la doctrine de Scot, ofjertur hostia non consecrata et lune est sacrificium et non sacramentum. In 7Vum sent., dist. XIII, q. ii, n. 5, t. viii, p. 811, on serait tenté de croire que le Docteur subtil voit dans l’offertoire la partie essentielle de la messe. Cette phrase, comme celle de saint Thomas, ofjertur eucharistia ut sacrificium, consecratitr et sumitur ut sacramentum. Sum., III a, q. ixxxiii, a. 4, veut être entendue d’une façon large. Il s’agit ici, pour les deux grands docteurs, de l’oblation dans sa phase initiale, sans exclure le développement de cette

oblation qui a son point culminant dans l’offrande du Christ présent sur l’autel. L’oblation proprement sacrificielle présuppose logiquement la consécration. Celle-ci produit le Christ pour qu’il soit offert. C’est dans la répétition de ce qu’a fait le Christ à la cène, que se trouve plus spécialement la représentation commémorative de l’oblation de la croix. Certum est autem quod missa non xquivalet passioni Christi, licel specialius valeat pro quanlo ibi est specialior commemoralio oblationis quam Christus obtulit in cruce juxla illud., Luc, xxii et I Corinth., xi, « Hoc facile in meam commemoralionem ». Quodl., xx., n. 22, p. 529.

La double consécration a sans doute, selon Scot, pour but de figurer l’alimentation intégrale. In 7Vum sent., dist. VIII, q. i, t. viii, p. 408. Mais ne signifiet-elle point aussi à ses yeux, comme pour saint Thomas, la séparation réelle du corps et du sang du Christ. C’est du moins ce que l’on peut conclure de ces paroles : Hoc ergo tenendum est quod corpus Christi, ut est primum signalum specie panis et contentum, non includit animam, nec accideniia nec sanguinem. In 7Vum sent., dist. X, q. iv, t. viii, p. 532.

d. Rapports des doctrines de Duns Scot et de saint Thomas. — Quoi qu’il en soit de ce détail, il reste que Duns Scot, comme saint Thomas, voit dans la messe, avec la tradition, une représentation objective de l’immolation du Calvaire et une oblation renouvelée de cette immolation.

Mais, plus que le Docteur angélique, il pousse l’analyse de la distinction qui existe entre la représentation et la chose représentée ; plus que lui, il met l’accent sur l’idée d’oblation comme trait essentiel du sacrifice eucharistique, plus loin que lui et ses prédécesseurs, il pousse jusqu'à ses conséquences extrêmes l’analyse de cette vérité traditionnelle si fortement énoncée dans l'Épître aux Hébreux : 7/ n’y a qu’une oblation du Christ faite par lui-même, pour assurer d’une manière absolument satisfaisante le salut ; en conséquence la messe qui se répète à travers le temps et l’espace ne peut être qu’un sacrifice subordonné à celui de la croix, c’est l’oblation, le sacrifice de l'Église. Sans doute, dans l’un et l’autre sacrifice c’est toujours la même victime qui est offerte : de ce point de vue il y a identité absolue entre la croix et l’autel. C’est le sentiment commun de la tradition. Mais au point de vue de l’initiative immédiate du sacrificateur, il n’y a qu’identité relative.

Saint Thomas l’avait déjà noté d’un mot, soit en présentant le sacrifice du Calvaire comme seul offert par le Christ et celui de l’autel comme offert par les membres de son corps mystique, soit en répondant à l’objection qui niait l’identité des deux sacrifices par une distinction : Sacerdos gerit imaginem Christi in cujus persona et virtute pronunliat ad consecrandum et ila quodammodo idem sacerdos et hostia. Duns Scot va s’appliquer à caractériser davantage la différence qui existe entre l’oblation du Christ et l’oblation de l'Église, et à analyser la part respective du Christ et de l'Église à l’autel.

A l’autel, le Christ n’est pas le sacrificateur immédiat. Autrement, une seule messe équivaudrait à la passion : Unius misses celebratio œquivalerel passioni Christi, si idem esset offerens immédiate et oblatio. Quodl., xx, n. 22, t.xii, p. 529. Comme l’a remarqué le P. de la Taille, Esquisse du mystère de la foi, p. 68 et 69, elle est assurément ignorée de saint Thomas aussi bien que de Duns Scot, étrangère à toute la tradition scolastique aussi bien qu'à la tradition patristique (du moins à la tradition augustinienne) l’opinion qui multiplie les offrandes personnelles du Christ de messe en messe. « S’il y a intervention personnelle, réitérée, du Seigneur en qualité d’oblatcur actuel et formel, d’oblateur qui répète son geste d’oblation indéfi-