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MESSE EN OCCIDENT : SAINT HIPPOLYTE


celui qui prie, est la voix qui se fait entendre dans les Écritures et sanctifie l’eucharistie. L’auteur conclut que la femme, même au moment critique du mois, ne doit pas se priver de la communion. Elle possède l’Esprit, donc elle peut recevoir le ^fruit de l’Esprit, le pain sanctifié par l’Esprit, vi, 21, p. 370.

De cet ensemble de textes se dégage tout un petit traité sur l’eucharistie. Elle est une offrande rituelle. L’auteur ne la confond nullement avec l’oblation des fidèles et l’en distingue. Il parle de l’ofirande de l’eucharistie du corps du Christ et de la présentation d’un pain pur, panem mundum preeponentes. Le sens de ce verbe n’est pas douteux, il est l'équivalent de 7vpoacpîpeTS, Batiffol, op. cit., -p. 291 ; Lamiroy, op. cit., p. 321, n. 2.- A noter encore qu’offrir est employé en un endroit sans complément direct, encadré dans un contexte qui oblige, à lui donner le sens de « sacrifice » oranles offerte pro dormientibus.

L’eucharistie se célèbre le dimanche, peut-être même plus souvent, puisque, dans un pas sage où il est parlé d’elle, on mentionne une prière qui se fait sans cesse. Du moins les fidèles sont sans excuse s’ils ne viennent pas à la réunion du dimanche. Le rite se célèbre dans les assemblées ordinaires à l'église, mais aussi dans les cimetières, peut-être aux funérailles, in exitibus (le mot est obscur, Nau, La Didascalie, Paris, 1902, p. 157) et aux anniversaires : est-ce le sens de in memoriis ?

Les fidèles apportent des dons sur lesquels une part est réservée pour les pauvres. Une autre devient la part du sacrifice. C’est le pain cuit au feu. Il y a une lecture privée de la parole du salut, le dimanche du moins. Puis ont lieu des prières. C’est l'évêque qui fait l’eucharistie, mais il agit au nom de tous : aussi tous sont-ils invités à offrir avec lui : offerte. Il prie. L’Esprit qui déjà s’est fait entendre par les Écritures reçoit cette prière, « il sanctifie le pain » et avec lui « l’action de grâces ». On peut donc dire qu’elle est « son fruit ». Ainsi offre-t-on « une eucharistie agréable et qui est à l’image du corps royal du Christ. » L’action de l’Esprit est soulignée plus qu’elle ne l’a été par les écrivains antérieurs. L'équivalent du mot anlitype est aussi appliqué pour la première fois à l’eucharistie. Batifîol, op. cit., p. 292.

Autre renseignement non moins intéressant et qui n’a pas encore été relevé en Orient : on offre pour les morts, offerte pro dormientibus. Cette recommandation s’ajoute à ce qui est dit de l’eucharistie agréable à Dieu, pour démontrer qu’on attribue à l’offrande chrétienne une heureuse efficacité. L’assemblée ménage d’ailleurs aux fidèles une faveur non moins précieuse : ils y communient. Le dimanche, ils doivent se nourrir de l’aliment divin qui demeure éternellement.

En vérité, il serait difficile de trouver plus de choses en moins de mots : la Didascalie rappelle et complète toutes les dépositions des écrivains orientaux antérieurs sur le sens du rite eucharistique.

V. En Occident, jusqu'à saint Cyprien (milieu du iiie siècle). — 1° Saint Hippolyte (f peu après 235). — Dans ce qui nous reste de ses traités, on trouve de rares mais d’utiles renseignements sur le rite eucharistique.

Le Commentaire sur le Cantique en parle comme du sacrifice nouveau, donc de celui qui s’oppose aux oblations juives, et qui est comme elles une oblation proprement dite, celle qu’avait prédite Malachie. In Cant., iii, 4, dans Texte und Unters., t. xxiii, fasc. 2, p. 66. Une autre affirmation confirme la précédente : « Quand l’Antéchrist viendra, alors disparaîtra le sacrifice, Ouaîa, et la libation, cttiovSt), qui sont maintenant offerts, 7rpocrcpEpo[zé/Y], à Dieu dans toutes les nations. » Comment, in Daniel, iv, 35, édit. du Corpus de Berlin, t. i a, p. 280. Cf. De Antichristo, 43, t. i b,

p. 27. Ainsi dans la même phrase se trouvent trois mots techniques employés chez les Juifs ou les païens pour désigner le sacrifice proprement dit. C’est bien de lui qu’il s’agit, puisqu’il est parlé d’oblation prédite par Malachie comme devant être offerte pour tous les peuples, et du rite qui cessera au temps de l’Antéchrist, alors que la prière, la mortification, l’aumône ne semblent pas appelées à disparaître. D’ailleurs la parole d’Hippolyte fait allusion au texte de Daniel, ix, 27 : « Il (le Christ) confirmera son alliance avec un grand nombre dans une semaine et au milieu de la semaine cesseront l’oblation et le sacrifice, et l’abomination de la désolation continuera jusqu'à la consommation et la fin. » Or, le prophète juif parlait du sacrifice proprement dit en cet endroit.

Sur cette oblation chrétienne, les phrases citées ne nous donnent à peu près aucune indication. Hippolyte atteste qu’il y a sacrifice et libation. Les chrétiens offrent donc un aliment solide et un breuvage : « le pain et le vin que nous a préparés le Christ. » In Prov., ix, 1-5, édit. de Lagarde, p. 199. Ce pain, c’est le corps du Christ, In Gen., xxxviii, 19, édit. de Berlin, t. i b, p. 36, sa chair divine qu’il donne à manger, In Prov., ix, 1-5, édit. de Lagarde, p. 199, « chair céleste à laquelle l’humanité souhaite d’unir sa propre chair ». In Cant., iii, 4, Texte und Unters., t. xxiii, fasc. 2, p. 66. Ce viii, délicieux entre tous, In Cant., i, 5, p. 34, c’est le sang précieux que le Sauveur nous donne à boire pour la rémission de nos péchés, In Prov., ix, 1-5, éd. de Lagarde, p. 199, « sang qui est le gage de la vie éternelle pour quiconque s’en approche avec humilité ». In Gen., xxxiii, 19, édit. de Berlin, t. i b, p. 36.

On voit que la matière du sacrifice chrétien n’est pas pour Hippolyte le pain et le vin en tant que créatures. Le mot chair céleste vaut la peine d'être noté : il fait penser aux prières qui demandent que l’oblation eucharistique soit transportée sur l’autel du ciel, afin qu’ensuite nous y participions pour trouver en elle les dons divins. C’est la rémission des péchés et la vie éternelle qu’obtient le fidèle par l’eucharistie, ces grâces sont présentées ici, non comme les fruits du sacrifice, mais comme les effets de l’union de notre chair à la chair du Sauveur, si nous la recevons avec humilité. Telles sont les données que nous recueillons dans les ouvrages de saint Hippolyte parvenus jusqu'à nous.

Mais on sait que dans ces dernières années, les travaux de Schwarz et de Connolly ont permis de restituer à Hippolyte l’anaphore qui se trouve dans l’Ordonnance ecclésiastique égyptienne (œgyptische Kirchenordnung). Cette attribution semble aujourd’hui communément admise.

Il est à noter que cette anaphore suit le rite de l’ordination de l'évêque et qu’elle sert pour une concélébrât ion faite par le nouvel élu et les prêtres. Les diacres apportent l’oblation. Suit le dialogue entre le célébrant et le peuple.

L'évêque : Dominus cum omnibus vobis. — Le peuple : Cum spiritu tuo. — E. Sursum corda vestra. — P. Habemus ad Dominum. — E. Gratias agamus Domino. — P. Dignum et justum.

L'évêque dit alors suivi par ceux qui l’assistent, ' episcopum prieeuntem sequentes :

Nous te rendons grâces, Seigneur, pour ton cher Fils Jésus-Christ, que dans les derniers jours tu nous as envoyé pour Sauveur et Rédempteur, messager de ta volonté. Il est le Verbe ton inséparable, par lequel tu as tout fait et cela te fut pleinement agréable. Du ciel tu l’as envoyé dans le sein d’une vierge. Il a été fait chair, porté dans ses entrailles, il s’y est incarné. Il a été manifesté ton fils né de l’Esprit-Saint et de la Vierge. Pour accomplir ta volonté et t’acquérir un peuple saint, il a étendu ses