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MAXIME DE C1IUYS0P0LIS OU MAXIME LE CONFESSEUR


Dieu n’était gêné par aucun penchant inférieur. Il n’avait pas à lutter pour être vertueux. Les passions même n’existaient pas. t. :, p. 267. Il était à l’abri de la souffrance et devait jouir de l’immortalité. La propagation du genre humain par le mariage n’entrait pas dans le plan primitif, t. i, p. 3(Jl. Résumé et centre de la création visible, l’homme, par sa fidélité, devait réaliser le plan d’unification totale en Dieu. Le péché a ruiné ce plan. Les conséquences en furent l’ignorance, la tyrannie des passions et la mort, 1. 1, p. 96

Sur la faute originelle, saint Maxime s’exprime d’une manière obscure. Il distingue dans Adam deux âjxap-rîai, l’une volontaire et blâmable, à savoir, l’aversion du bien ; l’autre involontaire et non blâmable, à savoir la perte de l’immortalité, et la passibilité. La première est cause de la seconde, t. i, p. 94. Cette distinction a pour but d’expliquer le texte de saint Paul, II Cor., vii, 21 : Eam qui non noverat peccatum, peccatum fecit. Par amour pour l’homme, et pour l’honneur de Dieu dont le plan avait été détruit par le démon, le Verbe s’est incarné pourré parer la ruine du péché. La seule raison de la naissance humaine du Verbe a été le salut de l’homme, et c’est pourquoi il a pris tout ce qui était de l’homme, hormis le péché, P. G., t. xci, col. 1039. Saint Maxime résume bien sa conception sotériologique dans cette phrase lapidaire : yivexai tîXe’.oç àvOpwTcoç é£ ï)o_cov Si’rjuûv xa6’rju.* ;, 7rxvTa -rà f, ii, côv àvsWaTCWç syov, âu.apTÎaç Xwpiç. P. G., t. xci, col. 1309 A. Il était convenable que ce fût le Verbe, lumière et force du Père qui descendît sur la terre, où régnaient l’ignorance et la tyrannie du péché, pour donner à notre nature la lumière inextinguible de la vraie connaissance et la force des vertus. Comb., t. i, p. 254.

Le salut s’opère d’une manière opposée à celle dont Adam nous a perdus. C’est par le plaisir qu’Adam nous a perdus, c’est par son contraire, la souffrance, que le Christ vient nous sauver. Le plaisir d’Adam, qui ne procédait pas de la souffrance, a engendré la souffrance. La souffrance du Christ, qui ne procède pas du plaisir, nous rend la félicité. Par son péché volontaire et blâmable, Adam a été sujet involontairement aux passions, que Maxime appelle péché non blâmable. En acceptant volontairement ce péché-châtiment, le Sauveur a détruit l’empire du péché volontaire. Ce qui domine surtout dans la sotériologie de notre auteur, c’est l’idée de la miséricorde divine. Le Verbe s’est incarné non pour lui, mais pour nous. Comb., t. i, p. 201. Tout est conçu en vue de la instauration de l’homme. L’idée de la réparation de l’offense faite à Dieu n’apparaît aucunement. Si la justice brille dans la rédemption, c’est dans ce fait que Jésus-Christ a mérité la destruction de l’empire du péché et de la mort, en acceptant volontairement, sans y être sujet, la malédiction et le châtiment du péché. L’économie est donc conçue en fonction du salut de l’homme et non de la satisfaction à Dieu. Encore moins est-il question d’une rançon à donner au démon, car celui-ci est voleur et parjure, et a été chassé d’un lieu qui ne lui appartenait pas, 1. 1, p. 228.

Au sujet du sort final des damnés, saint Maxime, dans le but de donner un sens orthodoxe à un passage difficile de saint Grégoire de Nysse, expose une sorte d’apocatastase mitigée, qui consiste en ceci que les âmes, quand tous les siècles seront révolus, perdront le souvenir du péché et parviendront à Dieu par une certaine connaissance, Tyj èm^ôiæi, mais non par la participation de ses biens, où Tfl xz§lc, z<. twv iyaôûv, t.i, p. 304. ; |

Autres points de doctrine.

1. Sur Dieu. — Dieu

est connu par l’ordre et la grandeur de l’univers créé comme son auteur et son artisan, P. G., t. xci,

col. 1176. Les raisons des choses, Xoyoi twv ovtcov, sont en lui dès avant les siècles. Sa prescience et sa providence éternelle règlent le monde et y ordonnent toutes choses, ibid., col. 1328-1329. La connaissance que nous avons de Dieu concerne son existence et ce qu’il n’est pas. En lui-même, iï demeure incompréhensible, ibid., col. 1229. Sur notre science de Dieu, Maxime a naturellement les mômes conceptions que Denys, le maître qu’il commente.

2. Ail sujet de la Trinité, Maxime reproduit l’enseignement des Pères antérieurs. Il y a lieu seulement de rappeler ici que son témoignage a été invoqué au concile de Florence, et a inauguré la conciliation entre les Grecs et les Latins. Il déclare en effet expressément, dans une lettre à Marin, que la formule des Latins Filioque n’est point opposée à l’orthodoxie, mais marque la parfaite consubstantialité des personnes divines. Comb., t. ii, p. 70. En plusieurs autres endroits, il enseigne que le Saint-Esprit procède du Père par le Fils, et de telle manière qu’il est impossible de l’interpréter autrement que d’une production véritable du Saint-Esprit par le Fils, t. i, p. 238-239, 313, 671 (ces deux derniers textes sont identiques sauf la ponctuation).

3. Sur l’âme.

Maxime prouve philosophiquement l’existence de l’âme, sa simplicité, son immortalité, sa rationalité, t. ii, p. 354-361. La définition qu’il en donne est celle-ci : Ouata àoa)(j.aToç, voepâ, èv cwjjKXTi 7roXt.Teuoo.Ev7 ;, Çmtjç TOtpama, ibid., p. 361. Pour lui, il y a union intime entre les deux substances diverses de l’âme et du corps pour former une seule espèce. Entre eux, il y a une relation essentielle que la mort même ne supprime pas : P. G., t.xii, col. 1101 BC. Les facultés principales de l’âme sont la raison, l’irascible et le concupiscible, Xôyoç, 61>o.oç, êTtt.6u[jia. Comb :, 1. 1, p. 337. L’âme, après la mort, garde toutes ses opérations, t. ii, p. 245-246.

4. Au sujet de la primauté romaine, les témoignages de notre auteur sont des plus explicites. « Depuis l’incarnation du Verbe, écrit-il, toutes les Églises chrétiennes du monde entier n’ont eu et n’ont encore d’autre base et fondement que cette Eglise très sublime. » T. ii, p. 72, 73. Il affirme ailleurs que le seul moyen pour Pyrrhus de prouver son orthodoxie est « de faire amende honorable au très saint pape de Rome, c’est-à-dire au Siège apostolique qui a reçu du Verbe incarné lui-même et des saints conciles le pouvoir de commander à toutes les saintes Églises de Dieu dans le monde, entier, ainsi que le droit et la puissance de lier et de délier en tout et pour tout. » T. ii, p. 76. Cf. également Acla Maximi, t. ii, p. 17 ; Comb., t. i, p. lv-lvi.

5. Théologie ascétique et mystique.

Saint Maxime est avant tout un moine profondément pénétré de vie intérieure. Ses tendances et sa tournure d’esprit se ressentent beaucoup de sa fréquentation de Denys l’Aréopagitc. Il se l’est assimilé en le commentant. Il y a ajouté de son fonds beaucoup de vues élevées et originales. Il est à regretter qu’il ne les ait pas ramassées lui-même en un système cohérent et logique, et qu’aucun ouvrage n’ait encore paru qui en donne une synthèse fidèle et complète. Nous nous contenterons ici de montrer les principales idées qui dominent dans l’ascèse et la mystique de Maxime. C’est l’idée du Verbe incarné, auteur et modèle de notre sainteté, et l’idée de la charité ou de l’amour de Dieu.

Le Verbe incarné est pour Maxime le centre de sa théologie mystique comme de sa théologie spéculative, si tant est qu’on puisse distinguer ces deux domaines. La fin de l’homme est Dieu. L’homme devait arriver à la possession par l’innocence, mais, par son péché, il a perdu ce bonheur. L’ignorance et les passions, suites du péché, sont pour l’homme un obstacle éternel à sa