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APOCALYPSE

ques explications, provenant de l’ancienne méthode d’interpréter l’Apocalypse. On retrouve les mêmes principes, appliqués avec une grande variété de détails, dans Cassiodore, Complexiones in Apoc, P. L., t. lxx, col. 1405-1418 ; dans les Homiliæ in Apoc, publiées parmi les œuvres de saint Augustin, P. L., t. xxxv, col. 2417-2452 ; dans Apringius de Béja, Tractus in Apokalipsin, publié pour la première fois par dom Férotin, Apringius de Béja. Son commentaire de l’Apocalypse (Bibliothèque patrologique d’U. Chevalier, Paris, 1900, t. i) ; dans Bède, Explanatio Apoc., P. L., t. xciii, col. 129-206 ; dans Ambroise Ausbert, In Apoc. libri X (Bibliotheca Patrum, Cologne, 1618, t. ix b, p. 305-540) ; dans Beatus, In Apoc., Madrid, 1770 ; dans Alcuin, Comment. libri quinque, P. L., t. c, col. 1087-1156 ; dans Haymon d’Halberstadt, Exposit. in Apoc, P. L., t. cxvii, col. 937-1220 ; dans Walafrid Strabon, Glossa ordinaria, P. L., t. cxiv, col. 709-752 ; dans Berengaudus, Expositio super septem visiones libri Apoc., parmi les œuvres de saint Ambroise, P. L., t. xvii, col. 765-970 ; dans Anselme de Laon, Enarrationes in Apoc., P. L., t. clxii, col. 1499-1586 ; dans Bruno d’Asti, Expositio in Apoc., P. L., t. clxv, col. 605-736 ; dans Rupert, Comment, in Apoc., P. L., t. clxix, col. 827-1214 ; dans Richard de Saint-Victor, In Apoc Joa. libri septem, P. L., t. cxcvi, col. 683-888 ; dans Albert le Grand, Enarrat. in Apoc., Opera, Paris, 1899, t. xxxviii, p. 465-826 ; dans Thomas l’Anglais, Expositio in Apoc., attribuée à saint Thomas d’Aquin et publiée en deux formes différentes, Opera, Paris, 1876, t. xxxi, p. 469-661 ; t. xxxii, p. 1-424 ; dans Hugues de Saint-Cher, Postilla in universa Biblia, Cologne, 1620, t. vii ; dans Martin de Léon, Exposit. libri Apoc., P. L., t. ccix, col. 299-420 ; dans Denys le Chartreux, Comment. in universas Script. sac. libros, Cologne, 1533. Signalons, dans l’Église grecque, André de Césarée, In Apoc. comment., P. G., t. cvi, col. 215-458, dont l’ouvrage manque d’originalité et mélange des interprétations différentes ; Arétas de Césarée, Coacervatio enarrat. in Apoc., ibid., col. 499-786, qui est une chaîne plutôt qu’un commentaire. Tous ces commentaires contiennent surtout des applications morales relatives à la lutte des méchants contre les bons. Quelques-uns toutefois entendent certaines parties de l’Apocalypse de la fin des temps et renferment des données eschatologiques.

3. Cette méthode d’interprétation, qui avait eu tant de vogue depuis le ive siècle, fut supplantée au {s|xiii|e}} par l’école de Joachim de Flore. Pour lui, Expositio in Apocalypsim, Venise, 1527, l’auteur de l’Apocalypse a prédit les sept âges du monde. Le septième et dernier est arrivé, c’est l’âge des moines mendiants, surtout des franciscains, qui feront régner sur terre l’Évangile éternel. Ses imitateurs renchérirent sur ses idées. Ils supposent que l’Apocalypse est écrite pour leur époque ; l’ère des moines est prédite sous l’image du retour de Jésus-Christ sur terre ou du règne du Saint-Esprit. L’Antéchrist, c’est la papauté qui est opposée à la réalisation parfaite de la règle des moines mendiants ; la seconde Bête, l’empereur Frédéric II. Ces explications furent acceptées par Pierre-Jean Olivi, Postilla super Apocalypsi ; Ubertino de Casale, Arbor vitæ, Venise, 1485 ; Télesphore, De magnis tribulationibus et statu Ecclesiæ, Venise, 1516 ; Séraphin de Fermo, In Apocalypsim, Anvers, 1581 ; Annius de Viterbe, Pierre Galatinus et Berthold de Chiemsee, Onus Ecclesiæ'. L’exégèse fantastique de Joachim de Flore fut imitée par les précurseurs de la réforme protestante et par beaucoup de réformés. Wicleff a pris ses idées sur les derniers temps de l’Église dans la prophétie de l’abbé Joachim. Luther a fait imprimer un Commentarius in Apocalypsin, Wittenberg, 1528, qui a été composé en 1390, probablement par J. Purvæus, disciple de Wicleff, et dont tout le but est de montrer que le pape est l’Antéchrist. Après avoir lui-même traité d’abord l’Apocalypse avec défaveur, il l’accepta plus facilement, quand il reconnut le parti qu’il pouvait en tirer contre la papauté. Dans sa préface à l’Apocalypse, écrite en 1534, l’ange du chapitre x représente la papauté, et les deux Bêtes du chapitre xiii sont le pape et l’empereur. La plupart des exégètes luthériens, calvinistes et anglicans adoptèrent ces vues antipapistes et déployèrent des efforts stériles pour prouver que le pape est l’Antéchrist annoncé. W. Bousset, Die Offenbarung Johannis, p. 93-102, déclare cette exégèse « enfantine ».

4. Dans son commentaire sur l’Apocalypse, Nicolas de Lyre inaugura, en 1329, une nouvelle époque. A ses yeux, la prophétie de saint Jean est la prédiction de l’histoire de l’Église depuis sa fondation jusqu’à la fin des temps. Il la divise en sept âges. Le premier, prédit dans la vision des sept sceaux, va de Jésus-Christ à Julien l’Apostat ; le deuxième, annoncé par la vision des sept trompettes, de Julien à l’empereur Maurice ; le troisième, qui est la lutte du dragon avec l’Église, de l’empereur Maurice à Charlemagne ; le quatrième, symbolisé par les sept coupes et célèbre par ses dissensions et ses schismes, de Charlemagne à l’empereur Henri IV ; le cinquième commence à la mort de Henri IV et va jusqu’à l’avènement de l’Antéchrist. Mais comme Nicolas ne se croit pas prophète, il renonce à expliquer l’Apocalypse à partir du chapitre xvii. Cette explication se retrouve dans les commentaires d’Aureolus, d’Ederus, de Lizarazus et de Cœlius Pannonius. Un moment abandonnée, elle fut reprise, au xviie siècle, par le bienheureux Barthélémy Holzhauser. Son commentaire, édité à Vienne en 1850 seulement, fut traduit du latin en français par le chanoine de Wuilleret, Interprétation de l’Apocalypse, 2e édit., 2 in-8°, Paris, 1857. Holzhauser n’avait pas achevé son travail, qui s’arrêtait, Apoc., xv, 4 ; le traducteur l’a continué. Les sept âges de l’Église sont déjà prédits dans les lettres aux sept Églises de l’Asie Mineure et décrits avec plus de détails dans les visions des sept sceaux, des sept trompettes, de la Bête à sept têtes, des sept vases de colère, etc. M. de La Chétardie, Explication de l’Apocalypse, Bourges, 1692, admettait aussi les sept âges de l’Église. En 1762, l’abbé Joubert développa ce système d’interprétation. L’abbé d’Etémare a composé, au xviiie siècle, un commentaire analogue. Explication de l’Apocalypse, Paris, 1866. Verschræge, Claræ simplicesque explicationes libri Apoc., Tournai, 1855, est d’accord pour le fond avec Holzhauzer. Lafont-Sentenac, Le plan de l’Apocalypse et la signification des prophéties qu’elle contient, Foix, 1872, a pris pour bases de son travail les commentaires de La Chétardie et de Holzhauzer. L’abbé Drach, Apocalypse de saint Jean, Paris, 1879, accorde ses préférences à ce système. Toutefois, il ne voit pas dans les sept lettres de saint Jean une histoire symbolique et abrégée de l’Église, et il n’accepte pas non plus toutes les applications à des faits particuliers. Voir encore dans ce sens Waller, Die Offenbarung des hl. Johannes im Lichte der Geschichtstypik, Rixheim, 1882 ; Riedel, Die Apokalypse, Augsbourg, 1887.

5. Les commentateurs catholiques du xvie et du xviie siècle, surtout les jésuites, pour réfuter les explications fantastiques de la majorité des protestants, étudièrent l’Apocalypse d’une manière vraiment scientifique et suivirent deux voies un peu différentes. Ils reconnurent tous que la Babylone du royaume de Patmos était réellement Rome, mais la Borne païenne et non pas la Rome pontificale. Ribera, Comment. in Apoc., Salamanque, 1591, vit dans les cinq premières trompettes l’histoire de l’Église primitive dans ses rapports avec l’empire romain, et à partir de la sixième trompette l’annonce des derniers temps. Le commencement de l’Apocalypse concerne l’époque la plus rapprochée de l’auteur, mais la majeure partie du livre n’aura sa réali-