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ANGE D’APRES LES PÈRES

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tant passagèrement jusqu’au moment de la passion où il l’a quitté pour le laisser clouer à la croix.

Les premiers Pères eurent à réfuter ces extravagances ; parmi tant d’autres points sur lesquels ils durent faire porter l’effort de leurs réfutations, ils insistèrent sur la création, œuvre exclusivement divine, sur l’incarnation et la rédemption, que le Fils de Dieu, Dieu lui-même, est venu accomplir en prenant la réalité de la nature humaine et en versant son sang sur la croix. Ce fut l’objet des principaux travaux de saint Justin, Dial. avec Tryphon ; de saint Irénée, Cont. hær. ; de Clément d’Alexandrie, de Tertullien, Apolog. adv. Marc, etc. ; de saint llippolyte, etc. Saint Augustin refuse expressément aux anges aucun pouvoir de créer. De Gen. ad lit., IX, 15, 26, P. L., t. xxxix, col. 403 ; De civit. Dei, xii, 24, 25, P. L., t. xli, col. 373, 374.

II. ONT-ILS REMPLI D’AUTRES MINISTÈRES DANS LE monde sensible ?

Mais si les anges n’ont eu aucune part à ces grandes œuvres exclusivement divines, on admettait volontiers que c’est par eux que Dieu avait donné la loi et la révélation mosaïques au peuple juif. Act., vii, 53 ; Gal., iii, 19 ; Hebr., ii, 2. D’autre part, comment concilier ces deux textes : Millia millium ministrabant Ei et decies millies centena millia assistebant Ei, Dan. vii, 10, et Nonne omnes sunt administratorii spiritus, in ministerium missi propter eos qui hæreditatem capient salutis, Hebr., i, 14 ? Tous les anges sont-ils envoyés en mission par Dieu ou n’y en a-t-il que quelques-uns ? L’opinion généralement admise fut que tous les anges sont ou peuvent être envoyés en mission par Dieu ; car c’est là le propre de leur nature. Auteur des Questions aux orthodoxes, q. xxx, P. G., t. vi, col. 1277 ; Eusèbe de Césarée, Prsep. evang., vii, 16, P. G., t. xxi, col. 553 ; Dem. evang., iii, P. G., t. xxii, col. 193 ; Athanase, Cont. arian., orat. iii, 12, P. G., t. xxvi, col. 348 ; Grégoire de Nysse, Cont. Eunom., i, P. G., t. xlv, col. 368 ; Jérôme, In Isai., vi, 6, P. L., xxiv, col. 96. Saint Ambroise, De Spir.Sancto, i, 10, P. L., t. xvi, col. 731, et Cyrille d’Alexandrie, In lsai., , erat. iv, 6, P. G., t. lxx, col. 181, n’en exceptent même pas les séraphins. Saint Grégoire de Nazianze les appelle tous ministres de la volonté de Dieu pour vaquer aux fonctions qu’ils ont à remplir sur la terre, Xeiro’jpy&’i 0e : ov 6E>.T, [j.aTo ; , Orat., xxviii, 31, P. G., t. xxxvi, col. 72 ; saint Chrysostome les appelle tous serviteurs de Dieu comme les prophètes, ô(jlôSou).oi. In Hebr., i, 1, P. G., t. lxiii, col. 14. D’après Théodoret, ils doivent remplir les divers ministères qui leur sont confiés, quand la volonté divine les envoie au secours du genre humain. Grsec. affect. cur., iii, P. G., t. lxxxiii, col. 892. Dignes, dit saint Basile, à raison de leur sainteté, de se tenir aussi près que possible du trône de Dieu, les anges doivent être disposés à nous faire part de leur ministère, comme cela est raconté du séraphin auprès d’Isaïe. In Isai., vi, 183, P. G., t. xxx, col. 423. Et Didyme, d’après la traduction de saint Jérôme, a écrit : Et pronuntians de omnibus invisibilibus creaturis ait. S.Paul, Hebr., i, 14, easdem esse administratores spiritus. Car elles ont cela de commun qu’elles peuvent être envoyées, niissarum conso) tes. De Spir. Sancto, P. G., t. xxxix, col. 1046 ;

Ici, le Pseudo-Denys heurte de front le sentiment général des Pères. Sans doute, à prendre le mot ange au sens étymologique d’envoyé, on peut l’appliquer indistinctement à tous les ordres. De cselhier., vi, 1, P. G., t. iii, col. 196. Mais, à proprement parler, on ne doit l’appliquer qu’aux archanges et aux’anges pour indiquer leur ministère ad extra. Cependant comme la connaissance des mystères divins que les anges et les archanges annoncent ne leur vient que d’une communication faie par les ordres supérieurs, cette communication ad intra, qui fait circuler d’un ordre à l’autre l’illumination qui part de Dieu, suffit pour permettre d’appeler anges les ordres supérieurs, d’autant plus qu’ils possèdent éminemment tout ce qui appartient aux ordres inférieurs, lbid., col. 304. Or comme la première hiérarchie est continuellement et pour toujours inhérente à Dieu, De csel. hier., vi, 2 ; et comme ces premières essences se trouvent placées dans le vestibule même de la divinité, ibid., vii, 2, il s’ensuit qu’elles ne sauraient être employées à un ministère extérieur. Cela parait contraire au texte de l’Épitre aux Hébreux ; mais le Pseudo-Denys le passe sous silence. Cela paraît également contraire à l’acte du séraphin qui purifie les lèvres des prophètes ; mais le Pseudo-Denys résout la difficulté, en disant : 1° que cet ange n’était pas réellement un séraphin, mais un ange de l’ordre inférieur appelé séraphin sequivoce, ù>y.ov>)iy., ibid., xiii, 2 ; 2° ou bien que c’était réellement un séraphin agissant, non personnellement, mais par l’intermédiaire d’un ange de l’ordre inférieur, auquel il en avait donné l’ordre, ibid., xiii, 3 ; de telle sorte, remarque Cordier, qu’il n’y a, au sentiment du Pseudo-Denys, de vraiment assistentes et sans mission extérieure, que les quatre premiers ordres. Ibid., col. 307.

Saint Grégoire le Grand n’a pas eu recours à un tel effort d’exégèse. Pour lui, qui minima nuntiant, angeli ; qui vero summa, archangeli… Hi administrant Deo qui ad nos nuntiando exeunt… ad explenda officia nuntiorum veniunt.ln Evang., homil. xxxiv, 8, 12, 18, P. L., t. lxxvi, col. 1250, 1254. Sed quia in quibusdam iScripturse locis quædam per Cherubim, quædam vero per Seraphim agi didicimus, utrum per se heec faciant an per subjecta agmina agantur… nos affirmare nolumus. Ibid., col. 1254-1255. Mais il tient pour certain que les deux ordres inférieurs reçoivent des missions ad extra, que les autres (alii alios mittunt) en reçoivent ad intra, et que ceux qui sont envoyés en mission extérieure n’en continuent pas moins à jouir de la vision béatifique. Ibid., et Mor., xvii, 18, P. L., t. Lxxvi, col. 20 ; Mor., Il, 3, P. L., t. lxxv, col. 556.

III. MISSIONS CONFIÉES AUX ANGES DANS LE MONDE.

Quelles sont donc les missions dont peuvent être chargés les anges en dehors du monde angélique ? — Les Pères placent sous la surveillance et la conduite des anges le monde de la matière inorganique et animée, les astres, la terre, les éléments, les phénomènes météorologiques, les plantes, les animaux, les nations, les peuples, l’homme.

Le monde en général.

D’après saint Justin, les anges sont chargés du soin de tout ce qui est sous le ciel, Apol., il, 5, P. G., t. vi, col. 432 ; d’après Athénagore, ils exercent leur pouvoir autour de la matière. Leg., 24, P. G., t. vi, col. 915. Hermas met un ange partout, dans le monde, Simil., viii, 3, P. G., t. il, col. 974 ; auprès de chaque créature, Vis., iii, 4 ; auprès des bêtes, Fis., IV, lbid., col. 902, 911. Il en donne un aux néophytes, Vis., m, 5, col. 903 ; à ceux que Dieu a confiés à son Fils. Simil., v, 6 ; à tout homme, car il déclare que chacun en a deux : l’ange de la justice et l’ange de l’iniquité. Mand., vi, col. 928. Origène prétend qu’il y en a qui président aux éléments, à l’air, au feu, etc., In Jer., homil. x, 6, P. G., t. xiii, col. 365 ; d’autres, à la naissance des animaux, à la croissance des plantes, etc. Cont. Cels., viii, 57, P. G., t. xi, col. 1604 ; In Num., homil. xiv, 2, P. G., t. xii, col. 680 ; In Jos., homil. xxiii, 3, P. G., t. xii, col. 937. Epiphanecite lesnuées, la pluie, la neige, la grêle, la glace, le chaud, le froid, les éclairs, le tonnerre, les saisons, etc., parmi les choses soumises à un ange. De mens, et pond., 22, P. G., t. xliii, col. 276. Chrysostome dit que les anges gardent l’univers, les nations, les créatures inanimées, le soleil, la lune, la mer, la terre. Dans Photius, P. G., t. civ, col. 264. D’après Augustin, le monde entier, De lib. arb., iii, 32, P. L., t. xxxii, col. 1287 ; toute vie sans raison, De Gen. ad lit-, viii, 45, P. L., t. xxxiv, col. 390 ; toute chose