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AGNEAU DE DIEU

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phétie d’ïsaïe, lui, 7. C’est ce dernier aspect que les autres Pères grecs ont surtout considéré. Théodore de Mopsueste, In Ev. Joan., j, 29, 7 J. G., t. lxvi, col. 736 ; S.Jean Chrysostome, In Joan., homil. xvii.n.l, P. G., t. ux, col. 109 ; S. Cyrille d’Alexandrie, In Joan. Ev., il, P. G., t. lxxiii, col. 192 ; Théophylacte, Enarrat. in Ev. Joan., P. G., t. cxxiii, col. 1172 ; Euthymius, Comment, in Joan., P. G., t. cxxix, col. 1133. Toutefois, ils n’excluaient pas le rapport avec le sacrifice quotidien de deux agneaux devant le tabernacle et au temple. L’agneau de Dieu, montré par Jean-Baptiste, avait été à la fois préfiguré par le sacrifice mosaïque et prédit par Isaïe. Cette explication paraît la meilleure, car l’idée de victime n’est pas absente de la prophétie d’ïsaïe, puisque le Messie souffrant est comparé à un agneau qu’on immole et qu’il prend sur soi les iniquités d’autrui. Jean-Baptiste avait donc en vue le Messie, juste et innocent, volontairement immolé et enlevant le péché du monde, après l’avoir pris comme à sa charge et l’avoir expié dans son sang. L’agneau qu’il montre n’est pas seulement l’agneau divin, l’agneau envoyé par Dieu ou offert à Dieu ; il est l’agneau de Dieu, au titre de propriété, le Fils de Dieu accomplissant dans les souffrances et la mort sa mission rédemptrice. Fillion, Évangile selon saint Jean, Paris, 1887, p. 21-22 ; Knabenbauer, Comment, in Ev. sec. Joan., Paris, 1898, p. 101-102 ; A. Loisy, Le témoignage de Jean-Baptiste, dans la Revue d’histoire et de littérature religieuses, 1898, t. iii, p. 229-232. — 3° L’apôtre saint Jean qui avait entendu sortir de la bouche du précurseur la belle appellation d’agneau de Dieu et avait ainsi appris à connaître Jésus, se complut à lui donner ce nom dans l’Apocalypse. Il l’a vu au ciel dans la gloire devant le trône, à l’égal de Dieu ; il l’a vu debout, comme immolé ; il n’est pas égorgé, il est vivant, mais il porte les nobles cicatrices des blessures qui lui ont donné la mort. Il a la puissance de rompre les sceaux du livre mystérieux et la science nécessaire pour en expliquer les secrets. Les quatre animaux symboliques et les vingt-quatre vieillards se prosternent à ses pieds et lui offrent les prières des saints. Avec les anges et les créatures rachetées, ils chantent l’efficacité de son sang rédempteur. Apoc, v, 6-14 ; vi, 1-12. La rupture du sixième sceau révéla les terribles effets de sa colère sur les rois impies de la terre, vi, 16. Les justes et les élus l’entouraient et l’honoraient, vii, 9, 10 ; venus de la grande tribulation, après avoir lavé leurs robes dans son sang, ils seront éternellement heureux sous sa conduite. 13-17 ; xxii, 14. Après l’ouverture du septième sceau, viii, 1, les bons anges furent vainqueurs dans leur lutte avec les mauvais par la vertu du sang de l’agneau, xii, 11. Les adorateurs de la bête n’ont pas, dès l’origine du monde (selon la meilleure interprétation, cf. xvii, 8), leurs noms écrits au livre de vie de l’agneau immolé, xiii, 8. Dans une autre vision, saint Jean vit l’agneau debout sur la montagne de Sion, entouré des élus qui portaient son nom écrit sur leurs fronts, et des vierges, les prémices de la rédemption, qui formaient sa suite et chantaient un cantique nouveau et ineffable, xiv, 1-4. Les adorateurs de la bête seront punis en sa présence, Xiv, 10 ; ses vainqueurs chanteront le cantique de l’agneau, xv, 3. Des rois combattront cet agneau, qui est le roi des rois, mais il les vaincra, xvii, 14. Les justes prendront part au festin de ses noces et leurs bonnes œuvres seront son vêtement de fête, xix, 7-9. Son épouse est la Jérusalem céleste, XXI, 9, qui est fondée sur ses apôtres, 14, et dont il est lui-même le temple et la lumière, 22, 23. Il n’entrera dans ce temple que ceux qui sont inscrits dans le livre de vie de l’agneau, 27. Un fleuve d’eau vive, resplendissant comme le cristal, jaillit des trônes de Dieu et de l’agneau, qui sont dressés au milieu de la ville sainte, xxii, 1-3. Saint Jean a donc vu l’agneau rédempteur, adoré dans le ciel à cause de son immolation et faisant participer à sa gloire tous ceux qui ont su profiter de son sang pour l’expiation de leurs fautes. Il l’a vu sur un trône a côté de Dieu, à l’égal de Dieu ; c’est le Verbe rédempteur, glorifié dans son humanité sainte et recueillant les fruits de sa victoire.

II. L’Agneau de Dieu dans l’Église. —

La gracieuse appellation d’agneau de Dieu a passé de l’Écriture dans le langage ecclésiastique. —

1° Les Pères l’ont répétée et l’ont employée dans ses diverses significations. Sans parler de nouveau des commentateurs du quatrième Évangile qui ont expliqué l’entrevue de Jésus avec son précurseur (voir plus haut), saint Ignace d’Antioche, Ad Philip., viii, 3, Funk, Opéra Patrum apostolicorum, Tubingue, 1881, t. il, p. 114, dit que la voix de Jean le prophète annonçait la passion du Sauveur, en l’appelant l’agneau de Dieu. Saint Ambroise, De Joseph palriarcha, 3, P. L., t. xiv, col. 648, assure que Jésus a été un agneau pour nous à qui il a enlevé le péché du monde. Pour Eusèbe de Césarée, Demonst. ev., x, proœm., P. G., t. xxii, col. 717, le Verbe incarné a été dans son humanité l’agneau de Dieu, destiné par lui à s’offrir en victime pour les agneaux ses frères et pour le reste du troupeau. Saint Paulin, patriarche d’Aquilée, Contra Feliceni Urgellitanum, il, 11, P. L., t. xcix, col. 432, a réuni le témoignage de Jean-Baptiste à ceux de l’Apocalypse, dans lesquels Jésus est appelé l’agneau de Dieu, pour démontrer sa divinité. L’abbé Bupert, Comment, in Apoc., iv, P. L., t. clxix, col. 932-933, a prouvé que l’agneau de Dieu n’a été glorifié au ciel que parce qu’il avait été égorgé pour le salut des hommes. — D’autres Pères de l’Église ont interprété de l’agneau de Dieu des passages scripturaires qui ne le désignent pas au sens littéral. Ainsi saint Jérôme, Comment, in Isaiam, vi, P. L., t. xxiv, col. 234-235, a appliqué au Messie la parole du prophète : Emitle agnum dominatorem terræ. xvi, 1. L’agneau, maître du monde, est le Messie qui a compté parmi ses ancêtres Buth la Moabite ; à sa venue, toute puissance du diable sera détruite et réduite en poussière. Cette interprétation n’est qu’une accommodation du texte original qui, adressé au roi de Moab, signifie : « Envoyez au maître de la terre de Juda les agneaux que vous lui devez comme tribut : » Cf. IV Beg., m, 4 ; Knabenbauer, Comment, in Isaiam, t. I, Paris, 1887, p. 344-345. Le même saint docteur, Com, in Jer., il, ibid., col. 756-757, reconnaît avec toutes les Églises que les paroles que Jérémie, XI, 19, dit de lui-même : « Je suis comme un agneau plein de douceur que l’on porte à la boucherie, » doivent être entendues du Messie dont ce prophète était la figure. Au milieu des persécutions qu’ils endurent, Jérémie et Jésus sont doux et patients comme l’agneau mené à la boucherie. Knabenbauer, Comment, in Jerem., Paris, 1889, p. 170. — 2° La liturgie romaine a consacré l’application messianique de ces deux passages. Plusieurs fois, dans les jours qui précèdent Noël, elle place sur les lèvres des bréviaristes l’ardent souhait : Emitte Agnum, Domine, dominatorem terræ. de pelra deserti ad montem filise Sion. Le jeudi saint, à l’office des Ténèbres, elle répète deux fois, en l’appliquant à Jésus-Christ, la parole de Jérémie : Eram quasi agnus innocens ; ductus sum ad immolandum, et nesciebam. Elle n’a pas oublié la comparaison qu’Isaïe a faite du Sauveur avec l’agneau innocent et muet, avec la brebis qui est égorgée sans se plaindre, et elle l’applique à Jésus-Christ, aux offices du jeudi saint et du samedi saint. L’hymne de Laudes, au temps de la Passion, nous fait chanter : Agnus in Crucis levatur immolandus stipite. Celle de la même heure, durant l’Avent, dit : En Agnus ad nos mitlitur laxare gratis debitum. Un répons du mercredi de la première semaine nous annonce : Bcx noster adveniet Christus, quem Joannes prsedicavit Agnum esse venturum. Le samedi après Pâques, un autre répons dit des nouveaux baptisés, qui devaient déposer le lendemain l’habit blanc de leur baptême : Isli sunt agni novelli, qui annuntia-