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AD0PTIAN18ME AU {{rom-maj|XII)e SIÈCLE

41 Die Doflmengeschicltte, part. I, Vienne, 1874, p. 103 sq. — 3° Pour la question doctrinale, consulter : S. Thomas, Sum. theol, III", q. xxiii, a. 4 ; Wirceburgenses, De incornatiune Verbi rlivini, diss. V, sect. i, a. 1 ; Franzelin, De Verbo incarnato, thés, xxxviii ; Jungmann, De Verbo incarvato, n. 159-173 ; C. Peseh, Prxlectiones dogmaticx, t. iv, n. 175-188, et en général tous les traités de l’incarnation.

II. QtJII.LlET. II. ADOPTIANISME AU XII* SIÈCLE. — I. Origine ci caractère de l’adoptianisme abélardien. II. Histoire et phases de la controverse. III. La condamnation par Alexandre III.

I. Origine et caractère du néo-adoptianisme. — 1° La renaissance de l’adoptianisme fut sans doute favorisée par l’oubli des décisions de Francfort. Mais l’origine de cette controverse, une des plus vives de la scolastique naissante, doit être cherchée dans le fond même du système d’Abélard sur l’incarnation. Cf. II. Abélard, Articles condamnés, col. 46. Tandis qu’au vnr siècle la filiation naturelle ou adoptive de Jésus-Christ était directement discutée, au {{rom-maj|XII)e le débat porte sur la constitution même de la personne de Jésus-Christ et sur le rôle de la nature humaine dans cette personne. Le néoadoptianisme ne fut qu’une conséquence de la conception erronée de l’union hypostatique chez Abélard et dans la grande école qui relève de lui. Cette erreur, comme toutes les autres de ce temps, revêtit d’abord une forme purement dialectique. Ainsi que saint Thomas l’a justement remarqué, In IV Sent., 1. III, disl. VI, édit. Parm., t. vii, p. 77, toutes les écoles anathématisaient sincèrement Nestorius et Eutychès, mais quand une analyse subtile cherchait le sens des formules catholiques « le Verbe s’est fait homme », « Jésus-Christ est Dieu, » etc., la fausse intelligence de l’union personnelle ramenait logiquement les erreurs du monophysisme ou de Nestorius.

1. D’un côté, l’identité affirmée entre le Verbe et l’humanité du Christ entraînait Hugues de Saint-Victor et ses disciples à confondre les attributs des deux natures et à placer dans l’humanité les opérations et les perfections divines, par exemple la science incréée de Dieu, la toute-puissance, et même l'éternité ou l’immensité. Hugues de Saint-Victor, De sacramentis, 1. II, part. I, c. vi, P. L., t. clxxvi, col. 383, 413 ; surtout De sapientia animas Cliristi, ibid., col. 855. Cf. Summa sentent., tract. I, c. xvi, ibid., col. 74.

2. D’un autre côté, l'école dialecticienne d’Abélard, effrayée de ces formules : Deus est homo, Homo est Deus, proclamait hardiment que, dans la rigueur logique, elles étaient impropres, figurées et fausses. Deus igitur nec caro, nec homo proprie dicendus est, écrivait Abélard dans VIntroduclio ad theol., 1. III, P. L., t. clxxviii, col. 1107. Et son disciple, l’auleur des Sentences de Saint-Florian, dansGietl, Die Sentenzen Un lancls, p. 176, exprimait la même pensée : Si proprie deberemus loqui, non concederemus : Christus est Deus, Christus est homo. A première vue, on pourrait croire à un simple oubli de la communication des idiomes. Mais l’erreur est plus profonde : ne connaissant d’autre composition que celle dont les éléments constituent une nature nouvelle, l'école d’Abélard ne conçoit pas l’union personnelle de deux natures réunies substantiellement dans une seule personnalité qui laisse à chacune ses attributs propres. Une telle union substantielle, disentils, si elle était admise, identifiant l’humanité avec la personne du Verbe, introduirait dans la Trinité une personne créée, temporelle, finie : de là, chez Abélard et les siens, une étrange frayeur de voir entrer dans la Trinité un élément créé, ou encore une quatrième personne. Cf. II. Abélard, Articles condamnés, col. 46. Ils concluaient donc que, dans les formules « le Verbe est homme, Jésus-Christ est homme », la connexion entre les deux termes est purement accidentelle. Cf. surtout Gerhoch, Epist. ad Adrianum P., dans Bach, Dogmen geschichte, t. il, p. 391-395. — Telle est l’origine dialectique des trois célèbres systèmes sur l’union hypostatique qui, exposés par Pierre Lombard, Sent., 1. III, dist. VI-XI, analysés avec profondeur par saint Thomas, In 1 V Sent., 1. III, dist. VI, constituaient toute la christologie du {{rom|xii)e siècle. Cf. Hergenrœther, Hist. de l'Église, 5 « période, S 331, trad. Belet, t. iv, p. 295 ; Hefele. flist. des conciles, § 624, Fribourg, 1886, t. v. 2° L’erreur capitale de la théorie abélardienne était ce qu’on nomma le nUiilianisme ou nihilisme christologique, condensé dans cette formule : « Jésus-Christ, en tant qu’homme, n’est point une réalité substantielle, » non est aliquid. Rien de plus étrange au premier abord, mais rien de plus logique. Ces théologiens ne contestaient pas la réalité du corps ou de l'âme de Jésus-Christ, mais ils niaient l’union substantielle qui permet d’affirmer l’identité de la personne du Verbe avec cette humanité.

1. D’après eux, le corps et l'âme du Christ ne sont pour le Verbe qu’un vêtement, tout au plus un instrument, mû par le Verbe, mais sans être un avec lui. Ils sont bien des réalités, mais non pas la réalité substantielle du Verbe incarné : ils sont plutôt sa propriété, un mode d'être. Cf. Epitome de l'école d’Abélard, c. xxvii, P. L., t. clxxviii, col. 1737. Ils aimaient ces formules enregistrées par Pierre Lombard, Sent., 1. III, dist. VI, 3 a sent. : Sccundum baditum lantum Deum hominem factum dicant ; et sic secnndiim isljs Deus dicitur homo quia hominem accepit et esse homo quia bidet hominem vel quia est badens bominem. Ou encore Gerhoch, Epist. ad Adrian., dans Bach, loc. cit., p. 393, leur reproche de répéter que l’humanité est en Dieu, sans être un avec Dieu : astruere conantur hominem esse assumptum in dei filio sive in deo, non

IN BEI FILIUM SIVE IN DEUM.

2. L’union hypostatique devenait donc une union purementaccidentelleetextrinsèque, au lieu d'être une union intimeetsubstanlielle. Saint I bornas, In I V Sent., 1. III, dist. VI, q. iii, a. 2, combat tout spécialement cette erreur. De là cette autre formule admise par Roland Bandinelli, trop fidèle alors à l’erreur abélardienne qu’il devait condamner comme pape (infra) : « Le Verbe comme homme n’est point une réalité nouvelle, il reçoit seulement un mode nouveau. » Non enim ex eo quod Christus homo est, aliquid, scd potius, si fas est, dici potest alicujus modi. Gietl, Die Sentenzen Rolands, p. 176.

3. Pour mieux exclure le caractère substantiel de l’union hypostatique, cette École niait aussi que le corps et l'âme du Christ fussent unis entre eux pour former une substance humaine. Le corps et l'âme auraient été mus par le Verbe isolément l’une de l’autre, ce qui nous ramène aux conceptions apollinaristes. Cf. Pierre Lombard, Sent., 1. III, dist. IV ; Jean de Cornouailles, Euloqium, P. L., t. cxcix, col. 1047.

3° Les textes invoqués en faveur de ces théories sont réunis par le Maître des Sentences, loc. cit. Celaient surtout Phil., il, 7, habitu invenlus ut homo, et certains passages de saint Augustin, De grat. Novi Test., c. iv ; De Trinitate, 1. IV, c. xxi, de saint Hilaire, De Trinitale, 1. X. Mais le grand argument des nihilistes était la définition si connue de la personne par Boèce. Si JésusChrist comme homme est une réalité, il ne peut être qu’une substance et une substance raisonnable : mais, d’après Boèce, toute substance raisonnable est une personne. Il y aurait donc en Jésus-Christ une personne humaine, ce qui serait le pur nestorianisme. Aussi Pierre Lombard, Sent., 1. III, dist. X, c. I, formulait-il la question en ces termes : An Christus sit, secundum quod homo, persona vel aliquid ?

4° L’adoptianisme était une conséquence nécessaire de ce nihilisme. Si le Verbe n’est point réellement homme, le Christ, comme homme, ne saurait être fils naturel de Dieu. Cette négation fut le grand scandale des docteurs fidèles à la tradition. Parmi les thèses des novateurs.