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ABSOLUTION DES PECHES SOUS FORME DEPRECATOIRE


cution. En ce cas les formules ne seront pas purement déprécatoires, mais potestatives ; elles constitueront des jugements aussi bien que la forme Ego te absolvo. En vue des applications que nous aurons à faire tout à l’heure, distinguons trois classes de formules déprécatoires dont la validité est plus ou moins probable et admise par un plus ou moins grand nombre d’auteurs.

l n classe. — Elle renferme les formules qui, tout en priant Dieu de remettre les péchés, lui demandent de le faire par le ministère du prêtre. Tous les théologiens qui ont examiné ces formules semblent en avoir admis la validité, aussi bien ceux qui ont écrit avant Morin, que ceux qui sont venus après lui. De Lugo, loc. cit., n. 106, dit que la forme Absolvat te Deus per me parait tout à fait valide, videtur omnino valida, et nous lisons dans l’ouvrage le plus récent qui ait été publié sur cetle matière, à notre connaissance, Sasse, De sacramentis Ecclesiæ, de pœnitentia, c. xxxii, t. ii, p. 206, que personne ne conteste la validité de la forme Deus te absolvat per ministerium mcum. Le P. Lehmkubl, qui a édité cet ouvrage de son confrère défunt, ajoute avec raison en note, que cela est vrai à condition que la formule soit prononcée avec l’intention de donner l’absolution sacramentelle.

2e classe. — On peut placer dans une seconde classe les formules déprécatives qui, sans parler du ministère du prêtre, rappellent à Dieu l’institution du sacrement de pénitence et les paroles du Christ : Quorum remiseritis peccata remittuntur eis. Ces formules marquent moins clairement que les précédentes qu’il y a jugement du prêtre. Cependant elles le signifient aussi et il semble par conséquent très probable qu’elles équivalent à la formule Ego te absolvo.

3e classe. — Une formule qui demanderait le pardon des péchés, sans mentionner le ministère du prêtre, ni rappeler l’institution du sacrement de pénitence, comme la formule : Deus te absolvat, Deus rcmilte liuic… ne pourrait-elle pas aussi être considérée comme équivalente à la formule Ego te absolvo, en raison de cette circonstance qu’elle est prononcée par le prêtre en vertu de son sacerdoce, sur un pénitent qui vient de se confesser pour recevoir l’absolution sacramentelle ? Le P. Billot, loc. cit., le savant professeur du Collège romain, le croit. Cette opinion a sa probabilité, car les difficultés qui ont empêché les auteurs anciens <’e l’adopter, ne sont pas insolubles. Ils se disaient que, s il y avait une forme valide d’absolution dans les formules déprécatives Misereatur… Indulgenliam dont le rituel romain fait précéder les mots Ego te absolvo, les pénitents seraient absous, avant que le prêtre prononçât ces mots, qui sont pourtant la vraie formule de l’absolution latine. Mais on peut répondre que les prêtres latins, en prononçant ces diverses formules, ont l’intention de se conformer aux enseignements de leur Église. que par conséquent ils ont (au moins implicitement) l’intention d’absoudre par les mots Ego le absolvo, d’où il résulte que les paroles précédentes ne remettent pas les péchés dans leur bouche. On peut objecter encore la déclaration du concile de Trente que ces prières, qui accompagnent les mots Ego te absolvo, n’entrent pas dans l’essence de l’absolution. La réponse est facile. Lorsque ces formules déprécatoires accompagnent les mots Ego te absolvo, elles ne sont pour rien dans la forme qui est tout entière dans ces mots. Mais pourquoi ne pourraient-elles entrer comme partie essentielle dans d’autres formules valides d’absolution ?

n. RÉro.xsE APPLIQUÉE. — 1°I1 est certain que toutes les formules employées dans l’Église catholique, par ordre ou avec le consentement du Saint-Siège, sont valides dans chaque rite qui s’en sert. Par conséquent la validité des formes déprécatoires usitées jusqu’au XIIIe siècle dans l’Église latine et de celles qui sont encore en usage aujourd’hui chez les grecs et les coptes unis ne saurait

être mise en doute. — 2° Du moment que, dans les essais d’union et dans les controverses des latins avec les orientaux schismatiques ou hérétiques, on ne leur a jamais demandé de changer leur manière d’administrer le sacrement de pénitence, il y a aussi là une preuve en faveur de la validité des formules d’absolution dont ils se servent. Cette preuve n’a pas d’importance pour les grecs et les coptes schismatiques, puisque leurs formules sont en usage et par conséquent valides chez les catholiques de même rite. Elle en a pour les syriens nestoriens ou jacobites, parce que les diverses Églises syriennes unies ont abandonné les formes déprécatoires des nestoriens et des jacobites, pour prendre la forme indicative des latins. — Ainsi, laissant de côté’les arméniens qui ont la forme indicative, il y a lieu, uniquement en raison de la pratique, de tenir pour certainement valides les formules déprécatoires des grecs et des coptes admises dans les éditions de la Propagande, et pour probablement valides, les formules des syriens nestoriens ou jacobites. Reste à concilier cette solution avec les principes de la théologie catholique. On l’a fait en bloc pour tous les rites ; on peut aussi le faire en entrant dans le détail, et en examinant les formules de chacun d’eux.

Réponse en bloc.

La théorie de Morin que nous avons exposée plus haut justifie d’une manière générale toutes les variations de la formule d’absolution. On se souvient qu’elle attribue à l’Église le pouvoir de déterminer, même dans les parties essentielles pour la validité, les rites sacramentels que Jésus-Christ n’aurait établis que d’une façon générale. Nous verrons au mot Sacrement que c’est là une opinion qui peut être soutenue, au moins, si l’on excepte le baptême et l’eucharistie. L’école de Morin en conclut que les formules déprécatoires sont valides pour l’absolution, aussi bien que les formules indicatives, à toutes les époques et dans tous les lieux où l’Église les a employées ou les emploie. Cette conclusion est très exacte, lorsqu’il s’agit de formules usitées dans la véritable Église. Mais est-il besoin de ce pouvoir qu’on attribue à l’Église pour expliquer la validité des diverses formules d’absolution qui ont été et qui sont encore en usage dans son sein ? Oui, si ces formules ne sont pas équivalentes pour le sens. Non, si toutes expriment suffisamment ce qui est essentiel dans la forme : Ego te absolvo, qui répond le mieux aux termes de l’institution du sacrement de pénitence par Jésus-Christ ; car d’après ce que nous avons dit plus haut, toutes les formules qui expriment ce qui est essentiel dans cette forme, sont par le fait même valides, sans qu’il soit besoin que l’Église exerce aucun pouvoir particulier pour leur donner cette validité. Dans le cas contraire, il faudra recourir à la théorie de Morin. Examinons donc les formules en cause, chacune en particulier.

2° Réponse pour les diverses formes déprécatoires.

— Nous possédons un critérium pour apprécier si les formules déprécatoires des grecs, des coptes et des syriens expriment ce qui est essentiel dans la forme : Ego te absolvo. Ce critérium, ce sont les règles que nous avons établies plus haut, dans la réponse que nous avons appelée théorique, pour juger si elles sont équivalentes à la formule : Ego le absolvo. Appliquons donc ces règles.

1. Toutes les formules déprécatoires grecques, prononcées après la confession des péchés, sur le pénitent, renferment la mention du ministère du prêtre. La plus usitée porte : « Que Dieu te pardonne par moi et en ce monde et dans l’autre. » Les autres expriment la même chose en des termes identiques ou équivalents. Voir VII Absolution chez les grecs, col. 200 sq. Or nous avons vu que tous les auteurs qui ont écrit avant ou après Morin regardent cette formule (que ne -s avons placée, col. 219, dans la première classe) connue exprimant ce