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maison. Ils firent de leur mieux pour que le conseil d’État devînt un troisième pouvoir, mais sans succès. Il resta un peu plus qu’un conseil administrateur, mais infiniment moins qu’une assemblée législative.

La seule partie de notre œuvre qui fut traitée avec supériorité et réglée, ce me semble, avec sagesse, fut celle qui regardait la justice. Sur ce terrain la commission se retrouvait, la plupart de ses membres ayant été ou étant encore avocats ; grâce à eux nous pûmes sauver le principe de l’inamovibilité des juges ; il tint bon comme en 1830 contre le courant qui entraînait tout le reste. Les républicains d’origine l’attaquèrent pourtant et très stupidement, à mon avis, car ce principe est bien plus favorable à l’indépendance des concitoyens qu’à la puissance de ceux qui gouvernent. Le tribunal des conflits et surtout le tribunal chargé de juger les crimes politiques furent constitués du premier coup, tels qu’on les voit aujourd’hui (1851). Beaumont fut le rédacteur de la plupart des articles qui se rapportent à ces deux grandes cours. Ce que nous fîmes en ces matières est très préférable à tout ce qu’on avait essayé de faire dans le même but depuis soixante ans. C’est probablement la seule partie de la constitution de 1848 qui survivra.

On décida, sur la demande de Vivien, que la consti-