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INFLUENCE DE LA DÉMOCRATIE

politique est favorable au bien-être et même à la tranquillité des citoyens.

J’ai dit dans la première partie de cet ouvrage : « La liberté illimitée d’association ne saurait être confondue avec la liberté d’écrire : l’une est tout à la fois moins nécessaire et plus dangereuse que l’autre. Une nation peut y mettre des bornes sans cesser être maîtresse d’elle-même ; elle doit quelquefois le faire pour continuer à l’être. » Et plus loin j’ajoutais : « On ne peut se dissimuler que la liberté illimitée d’association en matière politique ne soit, de toutes les libertés, la dernière qu’un peuple puisse supporter. Si elle ne le fait pas tomber dans l’anarchie, elle la lui fait pour ainsi dire toucher à chaque instant. »

Ainsi, je ne crois point qu’une nation soit toujours maîtresse de laisser aux citoyens le droit absolu de s’associer en matière politique, et je doute même que, dans aucun pays et à aucune époque, il fût sage de ne pas poser de bornes à la liberté d’association.

Tel peuple ne saurait, dit-on, maintenir la paix dans son sein, inspirer le respect des lois, ni fonder de gouvernement durable, s’il ne renferme le droit d’association dans d’étroites limites. De pareils biens sont précieux sans doute, et je conçois que, pour les acquérir ou les conserver,