J’ai dit qu’il fallait attribuer le maintien des institutions démocratiques des États-Unis aux circonstances, aux lois et aux mœurs[1].
La plupart des Européens ne connaissent que la première de ces trois causes, et ils lui donnent une importance prépondérante qu’elle n’a pas.
Il est vrai que les Anglo-Américains ont apporté dans le Nouveau-Monde l’égalité des conditions. Jamais on ne rencontra parmi eux ni roturiers ni nobles ; les préjugés de naissance y ont toujours été aussi inconnus que les préjugés de profession. L’état social se trouvant ainsi démocratique, la démocratie n’eut pas de peine à établir son empire.
Mais ce fait n’est point particulier aux États-Unis ; presque toutes les colonies d’Amérique ont été fondées par des hommes égaux entre eux ou qui le sont devenus en les habitant. Il n’y a pas une seule partie du Nouveau-Monde où les Européens aient pu créer une aristocratie.
- ↑ Je rappelle ici au lecteur le sens général dans lequel je prends le mot mœurs ; j’entends par ce mot l’ensemble des dispositions intellectuelles et morale, que les hommes apportent dans l’état de société.