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GOUVERNEMENT FÉDÉRAL.

avec une surprenante facilité les obligations nées des lois du Congrès et celles dont l’origine est dans les lois de son État, et qui, après avoir distingué les objets placés dans les attributions générales de l’Union de ceux que la législature locale doit régler, ne pût indiquer le point ou commence la compétence des cours fédérales et la limite ou s’arrête celle des tribunaux de l’État.

La constitution des États-Unis ressemble à ces belles créations de l’industrie humaine qui comblent de gloire et de biens ceux qui les inventent, mais qui restent stériles en d’autres mains.

C’est ce que le Mexique a fait voir de nos jours.

Les habitants du Mexique, voulant établir le système fédératif, prirent pour modèle et copièrent presque entièrement la constitution fédérale des Anglo-Américains leurs voisins[1]. Mais en transportant chez eux la lettre de la loi, ils ne purent transporter en même temps l’esprit qui la vivifie. On les vit donc s’embarrasser sans cesse parmi les rouages de leur double gouvernement. La souveraineté des États et celle de l’Union, sortant du cercle que la constitution avait tracé, pénétrèrent chaque jour l’une dans l’autre. Actuellement encore, le Mexique est sans cesse entraîné de l’anarchie au despotisme militaire, et du despotisme militaire à l’anarchie.

Le second et le plus funeste de tous les vices, que je regarde comme inhérent au système fédéral lui-même, c’est la faiblesse relative du gouvernement de l’Union.

  1. Voyez la constitution mexicaine de 1824.