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LE RETOUR DE JACQUES CLOUARD

Adèle ne se leva pas. Elle semblait n’avoir rien entendu.

— Allons, viens ! répéta-t-il. Moi j’avais pris un cabinet meublé pour huit jours : quatre francs de fichus en l’air ! si j’avais su… Mais, quatre francs, ce n’est pas une affaire… Allons, houp !… Y a-t-il loin, d’ici chez toi ?

Elle était comme clouée sur le banc. Jacques, stupéfait, la vit secouer la tête, faire signe que non.

— Pas plus chez moi que chez toi !… dit-elle avec fermeté. Ni ce soir, ni les autres jours !… Jamais !

— Jamais ?

Cette fois, ce n’était plus de la colère, mais une immense angoisse. Ce nouveau coup lui retournait le cœur. Et il restait là, debout devant Adèle, inerte et muet, hébété.

Elle lui prit encore affectueusement les mains, le fit se rasseoir, releva même son chapeau qui venait de tomber. Puis, doucement, avec des précautions, dans son naïf langage de femme du peuple, mais avec une délicatesse de sœur de charité mettant à nu une plaie vive, voilà qu’elle lui apprenait tout. Elle lui ouvrit les yeux. Elle lui fit comprendre qu’ils étaient morts désormais l’un pour l’autre, qu’il existe des faits accomplis, irréparables, que les joies détruites ne recommencent plus. Certes, ce n’était, ni gai, ni consolant, ce qu’il entendait là ; mais, au fond de son être,