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Pourquoi donc, Rodolpho, cette pâleur soudaine ?
Dis-moi, pourquoi ces yeux par l’horreur dilatés ?
Les rideaux de nouveau se sont donc agités ?
Elle dort, c’est le vent qui passe dans la plaine.
Une étreinte d’amour fait tressaillir le lit,
Un bruit, un long baiser dans l’ombre retentit.
Elle dort ! elle dort ! c’est un bruit de l’espace,
Dans la verdure en fleur c’est la brise qui passe.
Mais vois donc, le parfum s’achève en pétillant :
Ces flacons sont brisés, cette nappe est rougie.
Mais ne dirait-on pas les suites d’une orgie…
Elle dort ! elle dort ! Rodolphe, elle t’attend !

Elle est blonde pourtant. Quelle est la chevelure
Qui, si noire, en longs flots ruisselle sur ses bras ?
Tu connais bien sa voix. Quel est donc le murmure
Qui s’élève du lit, ne lui ressemblant pas ?
Elle a donc les pieds forts et les jambes nerveuses ?
Sa gorge n’est donc pas blanche comme le lait ?
Ses épaules, dis-moi, ne sont donc pas soyeuses,
Qu’un corps, brun et nerveux, sur le lit t’apparaît ?
Mais tu trembles, je crois. Cours vite, elle t’appelle ;
Cours vite l’embrasser, lui dire : Me voilà !
Tu le sais, mon amour, l’attente est si cruelle…

Ah ! tu l’as donc compris qu’un autre homme était là !

Rodolpho s’accouda sur le balcon de pierre,