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vilissement de la servitude sous les Phanariotes, race ignoble et bâtarde des Grecs, habitants du Phanar[1]. Non, l’Europe ne saurait se faire une idée d’une situation pareille à la nôtre sous le régime de ces nouveaux maîtres, esclaves eux-mêmes de la Turquie, vils, corrompus, rampants et voués à tous les mauvais instincts de la nature déchue. »

Aux maux de la servitude se joignent les calamités des guerres. Le dix-huitième siècle tout entier est rempli par la lutte entre la Turquie et la Russie, et les Principautés deviennent le champ-clos de cette lutte. De 1711 à 1812, dans l’espace d’un siècle, elles subissent treize invasions, cinq du côté de la Russie, cinq du côté de la Turquie, trois du côté de l’Autriche. En 1755, cette dernière puissance s’était fait céder la Bukovine. En 1812, la trahison d’un Grec, Morousi, livra aux Russes une autre portion du territoire moldave, la Bessarabie[2]. C’était cette même Bessarabie qui avait entendu jadis les plaintes d’Ovide, et maintenant que le Pruth coulait entre lui et son ancienne patrie, le Roumain, étranger chez les barbares dont il ne comprenait pas la langue, put s’écrier comme le poëte exilé :

  1. Le Phanar est un quartier de Stamboul, habité par les principales familles grecques, postérieurement à la conquête. (Voyez Lettres sur la Turquie, tom. ii, pag. 59.)
  2. Traité de Bucarest, 1812.