Page:Aldebrandin de Sienne-Le régime du corps, 1911.djvu/70

Cette page n’a pas encore été corrigée

LE REGIME DU CORPS ET SES SOURCES A une époque où le latin était l'organe en quelque sorte officiel des publications didactiques, il peut paraître surpre- nant que, rompant avec une habitude séculaire, Aldebrandin écrivît en français et fut, selon l'expression de M. Thomas, le premier médecin ayant osé employer la langue vulgaire. Pourtant, si l'on tient compte que dédié à une princesse française, le Régime du Corps, manuel de vulgarisation plutôt que traité réellement scientifique, s'adressait par son sujet même au grand public, aux gens du monde soucieux de «  garder leur cors en santé et remouvoir les maladies », on comprendra pourquoi l'auteur préféra notre langue au latin et à son idiome maternel, l'italien. Séduit sans doute par l'éclat de notre civilisation et par l'influence qu'elle com- mençait déjà à exercer à l'étranger, Aldebrandin dut obéir aux mêmes motifs qui décidèrent le florentin Brunetto Latino, son contemporain et compatriote, à écrire en fran- çais son Livre dou Tresor, « por ce que la parleüreestPlus deli- table et plus commune à toutes gens » Les plus anciens manuscrits d'Aldebrandin étant rédigés en wallon (B. N. 2021,14822,12323, Ars. 2510, 2059, Sloane 2435), faut-il en déduire que le traité fut primitivement composé dans ce dialecte par son auteur lui-même, ou que ces mss. ne sont que des versions wallonnes dues à des scribes du nord de la France ? Cette question paraît bien difficile à 1. BRUNETTO LATINO, mort en 1294, écrivit son Trésor, en France, vers 1265. — Rappelons aussi que MARTINO DA CANALE écrivit sa Chronique des Vénitiens en français « por ce que la lengue françoise cort parmi le monde et estplus delitable à lire et à oïr que nule autre », et que le Vénitien MARCO POLO rédigea également en français ses Voyages.