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LES QUATRE FILLES DU DOCTEUR MARSCH.

— Et d’abord, en voici une. »

Prenant la main de Meg, M. Marsch lui montra de nombreuses piqûres d’aiguille qui marquaient l’extrémité d’un de ses doigts.

« Meg, ma chère, lui dit-il, je suis fier de toucher cette travailleuse petite main. »

Si Meg avait eu besoin d’une récompense pour ses heures de travail patient, elle l’aurait reçue dans le sourire d’approbation et l’affectueux regard de son père.

« Et pour Jo ! Dites quelque chose de très agréable à Jo, père, car elle a fait tous ses efforts et a été si bonne pour moi, » murmura Beth à l’oreille de son père.

Il sourit en regardant la grande fille qui, assise en face de lui, avait, sur sa bonne figure, une expression de douceur peu habituelle.

« Malgré ses cheveux courts, je ne vois plus le « fils Jo », que j’avais laissé ici, il y a un an, dit M. Marsch ; je vois à sa place une jeune fille qui met son col droit, lace bien ses bottines, ne siffle pas, et ne se couche plus sur le paillasson comme autrefois. Sa figure est un peu maigre et pâlie par les veilles et l’anxiété, mais j’aime à la voir ainsi. En prenant un soin maternel d’une certaine petite personne que ses brusqueries d’autrefois auraient agitée, elle s’est transformée. J’aimais certes ma fille sauvage ; mais je crois que, si j’ai bientôt à sa place une jeune fille tendre, dévouée, forte encore, mais civilisée, j’aurai gagné au change. Je sais déjà que, dans tout Washington, je n’aurais rien pu trouver qui valut les vingt-cinq dollars que cette chère tête ronde m’a envoyés. »

Les yeux perçants de Jo devinrent humides, et le rose monta à son visage quand, en recevant les louanges