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LES QUATRE FILLES DU DOCTEUR MARSCH.

lui avait dit qu’il pouvait sans imprudence se mettre en route. Il dit à sa femme que c’était un devoir de reconnaissance pour lui de recommander M. Brooke à leur amitié. C’est en grande partie à ses veilles, dit-il, que vous devez la vie de votre père. »

M. Marsch s’arrêta juste à ce moment-là et, regardant Meg qui tisonnait violemment le feu, il jeta à sa femme un regard auquel elle ne répondit qu’en lui demandant vivement s’il ne voulait pas prendre avant le dîner une tasse de bouillon, que Jo irait lui chercher. Jo comprit sans doute pourquoi sa mère l’envoyait de préférence à la cuisine ; en y allant elle ferma vivement la porte, et, si quelqu’un avait été dans le corridor, on eût pu l’entendre murmurer :

« Les estimables jeunes gens, moi, je les hais ! et personne n’obtiendra de moi de les aimer ! »

Il n’y eut jamais un dîner de Noël comme celui de la famille Marsch. Le dindon était splendide et cuit à point lorsque Hannah l’apporta truffé, doré et magistralement servi dans un beau plat ; on le trouva tendre comme un poulet. Le plum-pudding fondait dans la bouche et, à la vue des gelées, Amy bourdonna comme une mouche devant un pot de miel. Tout était parfait. « Et c’est bien étonnant, dit Hannah, car j’avais l’esprit tellement à l’envers que c’est un miracle que je n’aie pas rôti le plum-pudding, et mis des raisins dans le dindon. »

M. Laurentz et son petit-fils étaient de la fête, ainsi que M. Brooke, auquel Jo s’efforçait, à la grande joie de Laurie, d’envoyer des regards qu’elle croyait furibonds et qui n’étaient que divertissants. Deux fauteuils, au haut bout de la table, étaient occupés par Beth et son père, qui festoyaient plus modeste-