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rect de rigueur. Elle formula, sans trop de balbutiement, la question de début, et la porte s’ouvrit toute grande : — Oui, M. Marcenat recevait, ce jour.

Elle marcha devant le valet de chambre, les jambes fléchissantes. À l’idée que chaque pas l’engageait un peu plus, elle se sentait comme soudée à la terre. À l’une des fenêtres d’angle, un rideau se plissa : la jeune fille eut l’intuition que quelqu’un, derrière cette guipure, épiait sa venue. Et cette surveillance mystérieuse acheva son désarroi.

Des ordres avaient dû être donnés à son sujet, car elle se vit introduire, cette fois, non dans l’antichambre publique, mais dans le grand salon. Estelle se blottit dans un coin de l’immense pièce, où les sièges nombreux, les guéridons dispersés entre les légers paravents semblaient assemblés en secrets conciliabules. Dans le vide et le silence du grand appartement silencieux, Mlle Gerfaux s’imagina percevoir les subtiles émanations des choses. Ces vases précieux, ces bergères d’Aubusson ou de lampas broché, ces lustres aux fleurs de cristal irisé, ces jardinières de Sèvres et ces bibelots de Saxe, éparpillés sur les consoles, n’échangeaient-ils pas, en leur langage occulte, de moqueuses réflexions sur l’intruse ? Aurait-elle vraiment l’audace, cette rustaude fagotée de laine grise, coiffée d’un chapeau de dix francs, d’occuper jamais la