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connais personne plus digne que vous de recevoir cette confidence ; d’ailleurs je n’ai pas d’amis autres que vous et ceux de vos frères avec lesquels j’ai vécu, pendant mon séjour à St-Domingue ; vous m’avez donné plusieurs preuves de dévouement, qui en quelques minutes vieillissent une amitié d’un siècle. D’ailleurs, pour lever tous vos scrupules, j’ajouterai un seul mot : j’ai besoin de votre appui. J’aurai certainement besoin de vos conseils ; peut-être réclamerai-je votre concours, il est donc important que vous soyez instruit de ce secret qui, partagé entre vous et Vent-en-Panne, sera comme s’il était resté enfoui dans mon cœur.

— Vous dites vrai, monsieur le duc, il est en effet important que je sois instruit de certaines choses. Je n’insisterai donc pas davantage ; je me mets dès ce moment à vos ordres.

Le duc porta à ses lèvres un sifflet d’argent.

Un valet parut.

— Apportez des rafraîchissements, dit le duc. Priez ces dames de faire un choix parmi les marchandises qu’on leur montre, et de garder auprès d’elles le marchand, jusqu’à ce que j’aille moi-même régler la facture.

Le valet apporta des rafraîchissements sur un plateau, puis il sortit.

— À votre santé ! dit le duc en se versant un verre de limonade, qu’il but d’un trait ; je ferai ce qu’au commencement de cet entretien vous avez fait vous même, mon cher l’Olonnais ; je ne vous ennuierai point par ma prolixité, en me perdant dans d’oiseux détails ; je ne vous dirai strictement, que ce qu’il est important que vous sachiez.

Le flibustier s’inclina respectueusement.

Le duc emplit une seconde fois son verre et après l’avoir vidé, il reprit :

— Un homme, dit-il d’une voix creuse et à peine distincte, avait osé alors que Mme  de la Torre était encore jeune fille, jeter les yeux sur elle ; cet homme portait un grand