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lier du premier étage, déchargea ses pistolets sur les flibustiers qui montaient l’escalier en courant ; puis dégainant son épée et la tenant de court, il se jeta à corps perdu au milieu de ses ennemis, avec un rugissement de fauve aux abois.

Il y eut une mêlée horrible dans les ténèbres ; une lutte acharnée, entrecoupée de cris et d’imprécations ; d’autant plus terrible, que les combattants, resserrés dans un espace très étroit, ne pouvant qu’imparfaitement se servir de leurs armes, risquaient de se blesser les uns les autres, en voulant atteindre leur ennemi.

L’audacieuse résolution du Chat-Tigre le sauva ; le projet insensé qu’il avait conçu réussit contre toute prévision ; excepté quelques blessures dans les chairs, blessures sans importance, il atteignit la rue sain et sauf ; courut désespérément jusqu’au rempart, se lança dans le fossé, grimpa le taillis opposé et disparut dans la campagne ; sans être atteint par un seul des coups de fusil tirés contre lui, pendant cette course affolée.

Vent-en-Panne était désespéré ; une fois encore son ennemi avait glissé comme un serpent, entre ses doigts prêts à l’étreindre, et s’était joué de lui ; ce fut en proie à un profond découragement, convaincu à l’avance de l’inutilité de ses recherches, qu’il se résolut à les commencer presque machinalement, et par acquit de conscience.

En effet tous les meubles étaient vides ; les papiers avaient disparu. Avant de fuir, le Chat-Tigre avait tué raide un engagé de Vent-en-Panne et blessé trois autres ; sa retraite avait été celle du Jaguar acculé par les chasseurs ; l’avantage lui était resté ; le vieux flibustier sortit de la maison la tête basse, mâchonnant des imprécations, et ruminant dans sa tête les plus terribles projets de vengeance.

Comme la ville était prise, le pillage à peu près terminé, Vent-en-Panne se dirigea vers l’ayuntamiento, rendez-vous assigné aux flibustiers, pour partager le butin conquis.