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— Merci, caballero, je n’attendais pas moins de votre justice, dit le Mexicain ; vous allez voir à présent que vous n’avez pas obligé un ingrat.

— Nous vous écoutons, señor ; s’écrièrent curieusement les quatre hommes.

— Mon récit sera court, mais intéressant, je l’espère ; à deux lieues d’ici, au milieu d’une Forêt-Vierge se trouve une aldea presque ignorée, qui n’est en somme qu’un rendez-vous de contrebandiers et qu’on nomme El Potrero ; dans cette aldea, il existe une hacienda dont la construction remonte à la conquête, c’est une espèce de maison forte : malgré son état de délabrement, elle peut encore, bien défendue, résister à un coup de main. Il y a quelques heures, je buvais dans une tienda, où certaines affaires urgentes exigeaient ma présence, quand je vis arriver à l’aldea une vingtaine de drôles, tous à cheval, escortant une litière fermée ; ces bribones que je connais tous, avaient pour chef un bandit de leur espèce, que je connais encore mieux et que l’on nomme el Gato-Montès ; ma surprise fut grande, lorsque la litière s’étant arrêtée, j’en vis descendre une jeune fille, à laquelle, sur la prière de votre ami Pitrians, j’avais servi de guide la nuit dernière, pour entrer dans la ville, et pénétrer dans la prison de cet autre camarade ; et il désigna l’Olonnais.

— Fleur-de-Mai ! s’écrièrent les flibustiers.

— Oui, reprit le Mexicain, je crois que tel est son nom, une charmante jeune fille ressemblant bien plus à un ange qu’à une femme, et qui avec cela paraît aussi brave et aussi résolue que n’importe quel homme ; je ne pus lui parler ; mais elle m’aperçut ; le regard qu’elle échangea avec moi était tellement significatif, que cela me suffit ; je compris qu’elle avait besoin d’un prompt secours ; je montai aussitôt à cheval, pour venir à la Vera-Cruz, résolu à trouver mes deux braves amis, n’importe par quel moyen. Voilà mon histoire, caballeros.

— Allons, allons, dit Vent-en-Panne, Dieu est pour nous ! merci, caballero, ajouta-t-il en serrant chaleureu-