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— Merci, merci ! dit Muñoz d’une voix faible, ne songez pas à moi ; ne vous occupez que de ma maîtresse et de sa fille.

Les flibustiers quittèrent alors le palais, mais ils eurent la précaution de refermer solidement derrière eux la porte de la rue, dont ils emportèrent les clés. Puis ils se rendirent à la Plaza Mayor, où le rendez-vous général avait été assigné.

Au moment où les deux hommes pénétraient sur la place, Vent-en-Panne et le duc de la Torre avaient, depuis environ dix minutes, entamé de nouveaux pourparlers, pour la reddition et le rachat de la ville.

Si vive que fût l’impatience de l’Olonnais, si poignante que fût son inquiétude, il fut obligé, à son grand regret, d’attendre silencieusement la conclusion des négociations.

Le duc de la Torre, ainsi que cela avait été convenu, avait réuni dans l’église de la Merced, les bourgeois notables et les principaux négociants de la ville ; le duc ne se faisait pas d’illusion sur la situation précaire dans laquelle se trouvait la Vera-Cruz. De plus, ses relations intimes avec les flibustiers lui avaient permis d’apprécier combien était peu étendu, en réalité, le pouvoir de leurs chefs dans une expédition. En effet, quelque fût le respect des frères de la Côte pour Vent-en-Panne, leur dévouement à sa personne, le duc savait qu’ils n’hésiteraient pas à le déposer et à nommer un autre chef, s’ils le supposaient capable de les tromper, ou du moins de ne pas exécuter fidèlement son devoir, par une faiblesse ou une bienveillance nuisibles à leurs intérêts. Dans ces conditions, le duc jugea qu’il devait poser nettement la question aux notables, et surtout obtenir d’eux une solution rapide ; ce qu’il avait fait.

Un appel de trompettes avait annoncé la reprise des négociations.

— Eh bien ! demanda Vent-en-Panne au duc, après l’avoir salué ; où en sommes-nous ? cette fois allons-nous pouvoir traiter avec une liberté entière ?