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quelques rafraîchissements, après une aussi longue course, faite dans d’aussi mauvaises conditions, s’étaient évertuées à préparer un déjeuner assez substantiel.

À la grande surprise de la duchesse et de sa fille, depuis son arrivée dans la Venta l’humeur de Fleur-de-Mai semblait complétement changée ; elle riait, plaisantait et chantait comme un pinson ; les deux dames étaient fort intriguées de cette gaieté que rien ne justifiait à leurs yeux.

— Mangez, buvez, et ne vous inquiétez de rien ; leur dit Fleur-de-Mai, nul ne peut prévoir l’avenir ; dans une situation comme celle où nous sommes, il est bon de prendre des forces, afin de faire face aux événements, qui peuvent surgir d’un moment à l’autre.

Tout en parlant ainsi, elle fit dresser la table ; puis elle câlina si bien la duchesse et sa fille, que malgré l’inquiétude qui les dévorait, elles consentirent à se mettre à table et à toucher quelques fruits du bout des dents ; lorsque le repas fut terminé, Fleur-de-Mai, qui seule, au grand ébahissement des dames, avait mangé de fort bon appétit, se leva et précéda ses compagnes dans une espèce de salon, situé à peu près au centre de l’appartement.

— Asseyez-vous ; leur dit-elle, en leur indiquant des sièges.

Puis elle alla ouvrir, les unes après les autres, toutes les portes de communication ; la duchesse et sa fille la regardaient faire sans rien comprendre à ce manège dont cependant elles étaient intriguées ; Fleur-de-Mai avait toujours ses pistolets à la ceinture et son gelin à la main ; quand toutes les portes furent ouvertes, la jeune fille vint s’asseoir entre les deux dames.

— Là, dit-elle, en jetant un regard espiègle dans cette enfilade de pièces, qui se trouvaient à droite et à gauche ; de cette façon je pourrai sans crainte d’être entendue, vous donner des nouvelles, qui j’en suis sûre, vous rendront joyeuses, et feront rentrer l’espérance dans vos cœurs.