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et cherchant vainement une issue par laquelle il lui fût possible de fuir les terribles ennemis, qui avaient surpris la ville pendant son sommeil.

Une scène non moins émouvante se passait à la même heure, sur la rade.

Les trois navires flibustiers avaient paru, sous pavillon espagnol, devant Saint-Jean-de-Luz, et avaient réussi à tromper l’amiral ; il les avait laissés s’embosser presque à portée de pistolet de son escadre ; alors le pavillon espagnol fut amené et remplacé par celui de la flibuste, puis les trois navires lâchèrent leurs bordées sur les bâtiments espagnols sans défiance, et commencèrent contre eux un feu de mousqueterie terrible, en se laissant dériver sur leurs ennemis auxquels ils s’amarrèrent ; et sans donner aux Espagnols le temps de se reconnaître, ils s’élancèrent à l’abordage au cri, mille fois répété de : Flibuste ! Flibuste.

Profitant de la fumée dont ils étaient enveloppés et qui cachait presque leurs mouvements, les flibustiers avaient jeté deux cents hommes sur l’île.

Le commandant de la forteresse et ses soldats, complétement démoralisés par ce qui se passait, ignorant à quels ennemis ils avaient affaire ; de plus n’osant tirer de crainte de nuire à l’escadre espagnole, étaient en proie à une anxiété terrible, lorsque le cri de flibuste se fit entendre dans le fort même, forcé à l’improviste du côté de la terre.

La garnison fut désarmée et faite prisonnière, avant que de s’être rendu compte de cette surprise, et sans avoir le temps d’essayer de se défendre.

Depuis que l’abordage avait eu lieu, les flibustiers ne tiraient plus, qu’à de rares intervalles ; le combat n’en était que plus terrible : les frères de la Côte maniaient avec une supériorité incontestable les armes blanches ; la fumée s’était peu à peu levée, toutes les péripéties du combat devenaient visibles ; on voyait les deux derniers navires de la flotte flibustière, entrer fièrement dans la rade, et venir se ranger près de leurs navires matelots.