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— Il fut, je crois, emporté par son compagnon ; je ne le revis plus.

— Et vous concluez de ceci ?

— Mon Dieu, seigneurie, je ne conclus pas ; seulement je suppose que, ainsi que vous-même l’avez dit, cet homme furieux de se voir démasqué, et craignant d’être dénoncé par moi, m’a juré une haine implacable, et a voulu prendre l’avance sur moi ; il m’est impossible d’attribuer sa conduite à un autre motif.

— C’est vrai, c’est vrai, tout cela est fort grave.

— À présent, seigneurie, s’il est d’autres renseignements que je puisse vous donner, je suis tout à votre disposition.

— Non, je crois qu’il ne me reste plus rien à vous demander ; ah ! cependant attendez donc, vous n’étiez pas seul, quand on vous a arrêté ?

— Non, seigneurie, j’avais un compagnon.

— Et ce compagnon, qu’est-il devenu ?

— Ah ! par exemple, seigneurie, voilà ce qu’il me serait impossible de vous dire ! le pauvre diable a pris peur, il s’est cru attaqué par des bandits, et il s’est sauvé, sans même savoir où il allait, ni ce qu’il faisait, j’en suis convaincu.

En ce moment, le guichetier annonça au gouverneur que le capitaine de Peñaranda demandait à être introduit près du prisonnier.

— Voyez-vous quelque inconvénient à le recevoir ? dit nonchalamment le gouverneur.

— Aucun, seigneurie ; seulement je vous ferai respectueusement observer que vous m’avez gracieusement dit, il y a un instant, que j’étais libre ?

— Et je vous le répète.

— Alors, seigneurie, s’il en est ainsi, il serait préférable que je sortisse ; l’explication que j’aurais ensuite avec le capitaine serait pour moi plus facile, et surtout plus égale pour tous deux.

Le gouverneur sembla réfléchir un instant.

— Eh bien ! soit, dit-il, venez.