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capitaine, répondit le duc avec un sourire amer, que vous jouez ou vous semblez jouer de malheur, dans les relations auxquelles le hasard vous a condamné avec moi ; vous ne terminez pas plus tôt de vous acquitter d’un devoir délicat, que vous voilà immédiatement obligé d’en remplir un autre.

— C’est vrai, monseigneur, mais que voulez-vous, la fatalité gouverne tout en ce monde ; si dures que soient ses lois, il faut se courber devant elles et s’y soumettre.

— Donc, vous dites que l’affaire dont vous désirez m’entretenir vous est personnelle ?

— En effet, c’est, monseigneur… c’est… mon Dieu, comment pourrai-je vous dire cela ; c’est une espèce de marché… oui… une espèce de marché que je voudrais proposer à V. E.

— Un marché ? prenez garde, señor, cette parole est grave ; un marché est souvent une trahison et déshonore à la fois celui qui le propose, et celui qui l’accepte.

— Rassurez-vous, monseigneur, vous n’aurez aucune trahison à redouter ! je ne suis ni votre ami, ni votre ennemi ; seulement, il dépendra de vous qu’en sortant de cette chambre, je sois l’un ou l’autre.

— Je ne vous comprends pas, capitaine ?

— Je vais m’expliquer, monseigneur ; bien que nous ne nous soyons jamais vus, que nous n’ayons jamais eu l’un avec l’autre aucun rapport direct ; cependant nous sommes liés l’un à l’autre depuis longues années par des liens, qui pour être occultes, n’en sont cependant pas moins forts.

— Définitivement, señor, vous avez fait le pari de ne parler que par énigmes ?

— Non pas ; je veux, au contraire, être clair, monseigneur, et cela d’autant plus qu’il faut que vous compreniez bien.

En ce moment, la porte s’ouvrit et un valet annonça :

— Madame la duchesse !

Le capitaine tressaillit et se penchant vivement vers le duc :