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rou. Vos vaisseaux seront toujours reçus dans ses ports, soit pour se garantir de la tempête, soit pour se ravitailler, soit enfin, pour chercher protection contre un ennemi.

— Messieurs, dit alors M. de Lartigues, les remerciements que je vous adresserais pour les services que vous avez rendu à mon vaisseau, n’exprimeraient que très-faiblement la reconnaissance que j’éprouve pour vos généreux procédés. Dans trois mois, je serai de retour en France ; bientôt je l’espère, vous aurez la preuve que j’ai vu le roi, et que je lui ai rendu compte de votre conduite.

Les adieux se prolongèrent quelques instants encore, enfin on se sépara.

L’Olonnais avait le cœur navré ; sa souffrance était d’autant plus grande, qu’il était seul, et ne pouvait épancher sa douleur dans le sein d’un ami.

Au lieu de rentrer chez lui, où il lui aurait été impossible de trouver le calme dont il avait besoin, il alla tristement errer sur la plage, espérant que la solitude rendrait un peu d’équilibre à son esprit, et réveillerait son courage ; il prolongea ainsi sa promenade jusqu’à un bloc de rochers déchiquetés par la mer, et qui aux rayons de la lune prenait des proportions presque fantastiques.

Là, il s’assit, cacha sa tête dans ses mains, et s’absorba dans sa douleur.

Plusieurs heures s’étaient écoulées, sans qu’il eut changé de position ; les étoiles commençaient à s’effacer dans le ciel, lorsqu’une main se posa légèrement sur son épaule, et une voix harmonieuse murmura doucement à son oreille :

— Pourquoi pleures-tu ainsi ? cette séparation était prévue ; elle était inévitable, ne t’abandonne pas à ta douleur ; sois homme ; l’adversité grandit le cœur.

L’Olonnais releva la tête ; il vit devant lui, comme un blanc fantôme, Fleur-de-Mai dont un sourire triste éclairait le gracieux visage.