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n’était autre que notre ancienne connaissance Pedro Garcias, venait de lui remettre.

Depuis quelques minutes la conversation était interrompue. Le duc releva la tête et fixant un regard interrogatif sur son respectueux interlocuteur :

— Ainsi, lui dit-il, señor don Pedro Garcias, les choses se sont bien passées comme vous me le rapportez ?

— Oui, monseigneur, le récit que j’ai eu l’honneur de faire à Votre Excellence est de la plus rigoureuse exactitude, répondit l’haciendero en s’inclinant.

— Mais si cela est ainsi, cet homme a commis un acte de la plus haute illégalité ? c’est presque un guet-apens !

— Telle est, en effet, l’opinion générale, monseigneur ; mais je ferai respectueusement observer à Votre Excellence, que nous sommes ici non pas en Espagne, mais dans la nouvelle Espagne, où chacun s’arroge le droit d’interpréter les lois selon son bon plaisir et son intérêt, et où la raison du plus fort est toujours la meilleure.

— Ce n’est malheureusement que trop vrai ; murmura le duc ; ainsi vous connaissez ce jeune homme ?

— J’avais l’honneur d’être lié avec lui, monseigneur, j’avais été son hôte à Medellin, depuis lors je ne l’ai pour ainsi dire pas perdu de vue ; si je l’ai bien jugé, c’est un caractère loyal et un homme de cœur.

— Vous ne vous êtes pas trompé, señor ; il est tout cela.

— C’est seulement hier au soir, très-tard, que j’ai appris ce qui s’est passé ; supposant que dans la triste situation où il se trouve, il pouvait avoir besoin de voir un ami, ce matin au point du jour, je me suis rendu à la forteresse ; grâce à un de mes compères, qui occupe un emploi assez important, j’ai réussi à le voir et à lui parler ; c’est alors qu’il m’a chargé de remettre à Votre Excellence, cette clé et cette lettre que Votre Excellence tient encore entre ses mains ; mon compère, en homme prudent, prétendait que je ne devais pas accepter cette