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ne manquerais pas de raisons spécieuses pour revenir sur cette détermination, et vous aider à tenter ce coup de main ; mais quoi qu’il advienne de moi, je me souviendrai toujours que j’ai été flibustier, l’un des principaux chefs des frères de la Côte. Je me dois à moi-même, de ne pas trahir aussi vilainement ceux aux côtés desquels j’ai si longtemps et si vaillamment combattu.

— Ces sentiments vous honorent, mon cher capitaine, répondit le Chat-Tigre avec une mordante ironie ; rassurez-vous, je vous ai fait une promesse, je ne reviens jamais sur une parole donnée ; ainsi que vous l’avez dit vous-même, il ne faut jamais chasser deux lièvres à la fois, on risque de n’en attraper aucun ; la vengeance que nous méditons, si elle réussit, a de quoi pleinement nous satisfaire ; ainsi c’est bien entendu entre nous, pour ne plus y revenir, l’affaire de la Tortue est complètement abandonnée ; à présent que nous n’avons rien de mieux à faire, contez-nous donc ce qui vous est arrivé avec vos ex-amis les frères de la Côte ; et pourquoi ils vous ont si indignement chassé de leur confrérie.

— Vous le voulez, soit ; j’y consens d’autant plus, que j’ai besoin de fouetter ma haine.

Vent-en-Panne jugea inutile de demeurer davantage ; il se retira à pas lents avec précaution, et il reprit le chemin du boucan ; chemin fort difficile à suivre ; il aurait couru grands risques de s’égarer, sans la sagacité de son venteur.

Vers deux heures du matin, le flibustier atteignit le boucan, se glissa sous sa tente, et malgré ses préoccupations, la fatigue qu’il éprouvait lui procura bientôt un sommeil profond et salutaire.


FIN DE L’OLONNAIS