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II

OÙ LES EXPLICATIONS DU DOCTEUR SONT BRUSQUEMENT INTERROMPUES

La situation dans laquelle se trouvaient placés ces deux hommes, inconnus peut-être l’un à l’autre ; dissimulant leurs traits sous un masque et échangeant de mordantes railleries au chevet de cette malade, plongée dans un sommeil si profond qu’il ressemblait presque à la mort ; avait quelque chose d’étrange et de sinistre, qui aurait fait courir un frisson de terreur dans les veines de quiconque aurait pu les voir.

Non-seulement ils se sentaient adversaires, mais ils se pressentaient ennemis.

Tous deux, sans doute, avaient pris leur parti, peut-être même leurs précautions à l’avance ; dans leur for intérieure, ils se croyaient, l’un et l’autre, certains de sortir à leur avantage de ce singulier tournoi.

Mais cette lutte ne pouvait se prolonger encore longtemps ; l’heure approchait où le médecin se verrait contraint de donner tous ses soins à la malade ; de son côté, le marin, sous son apparente indifférence, cachait un effroi réel. Comment se débarrasser de ce témoin incommode qui semblait avoir percé à jour son incognito et être le maître de son secret ?

Rompre brusquement l’entretien ? passer de la parole aux actes ? obtenir par la force ce que son adversaire n’avait pas voulu accorder à la conciliation et aux offres brillantes qui lui avaient été faites ?