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— Pardonnez-moi, capitaine ! la langue m’a fourché ! je voulais dire… Ah ! mon frère ! mon pauvre frère !

Et succombant à son émotion, le brave garçon fondit en larmes.

— Pleure, mon gars, cela te fera du bien.

— Oh ! oui ! mon pauvre frère !

— À nous deux, l’Olonnais, reprit le boucanier. Ainsi, tout ce que vous m’avez dit est vrai, n’est-ce pas ?

— À quoi faites-vous allusion, capitaine ?

— À ce que vous m’avez raconté de votre histoire.

— Hélas ! capitaine ! tout n’est que trop vrai ! Vous le voyez, je n’ai même pas de nom.

— Peut-être parce vous en avez trop ? fit Vent-en-Panne d’une voix sourde. Mais reprenant aussitôt un accent enjoué : Il ne s’agit pas de tout cela, dit-il. Nous sommes pays.

— Vous êtes des Sables d’Olonne, capitaine ! s’écria l’Olonnais avec surprise.

— À peu près ; à quelques lieues à peine ; donc nous sommes pays. Je vous ai vu à l’œuvre, je sais que vous êtes un homme. Je ne me lie pas facilement, et pourtant je me sens entraîné vers vous.

— Sur Dieu ! c’est comme moi, capitaine ; j’éprouve pour vous une sympathie dont je ne saurais me défendre.

— Gardez-vous bien d’y résister ; car, vrai, je vous aime de tout mon cœur. Que comptez-vous faire ?

— Je voudrais rester sur la côte.

— Qui vous en empêche ?

— Rien ; murmura l’Olonnais en rougissant.

— Bon, vous avez un secret ! gardez-le. Nous ne nous connaissons pas encore assez pour que j’en demande ma part. Êtes-vous résolu à rester avec nous ?

— Oui, quoi qu’il puisse m’arriver.

— Bon, vous craignez l’esclavage ? dit Vent-en-Panne, avec un sourire narquois.

— Je ne crains qu’une chose, capitaine, dit l’Olonnais d’une voix ferme.